08 mars 2007

Homélies

Homélie du 04 mars - 2ème dimanche de carême année c

Que retiendrions-nous si nous avions à résumer en trois mots les textes ce 2ème dimanche de carême. « Regarder le ciel ».
Dieu fait une promesse à Abraham et celui-ci est inquiet. Comment Dieu va-il pouvoir réaliser sa promesse à partir d’un couple stérile ? Et Dieu de lui répondre qu’il doit s’arracher à une interprétation trop humaine de sa situation pour rejoindre par la foi, le regard de Dieu sur les événements.
C’est une démarche de foi qui est admirablement suggérée dans le rituel de la première alliance. Le cadre de l’obscurité qui l’entoure, souligne que c’est une démarche qui n’est pas donnée. Relisons la première lecture. Le soleil s’est couché, des « ténèbres épaisses » enveloppent la terre, un « sommeil mystérieux s’empare d’Abraham, une sombre et profonde frayeur le saisit ». L’impuissance du patriarche - et la nôtre - à percevoir l’action mystérieuse de Dieu qui prépare dans le secret son dessein de salut est ici insinuée.
Pourtant, avec celui qui, comme Abraham, obéit à sa Parole, Dieu conclut une alliance, mais c’est de nuit ; il accomplit pour lui sa promesse, mais au moment où il ne l’attend plus. C’est pourquoi le Psalmiste nous exhorte à la patience et à la persévérance, les yeux fixés sur le Dieu fidèle. Si nous « recherchons sa face », nous en sommes sûrs : « nous verrons les bontés du Seigneur sur la terre des vivants ». Seulement tout est au futur et c’est là que tout se complique car il va falloir persévérer.
Est-il facile de se comporter comme des « citoyens des cieux » dans un monde qui « ne tend que vers les choses de la terre » ? Est-il aisé de regarder le ciel quand presque tout sur la terre nous fait oublier que nous sommes de passage ? Autant de questions qui arrachaient déjà des larmes à l’apôtre Paul et qui demeure plus que jamais des questions d’actualité dans un monde hypermoderne où Dieu, la foi et toutes les questions qui s’y apparentent sont reléguées au second plan. La question reste actuelle dans un monde où les préoccupations terrestres sont de véritables freins aux possibles et naturels élans aériens de l’Esprit. « Beaucoup de gens dit saint Paul, vivent en ennemis de la croix du Christ »
Ne pensons pas trop vite à notre entourage : ne sommes-nous pas nous aussi contaminés par la mentalité hédoniste dont saint Paul dénonce le caractère idolâtrique ?
Le Carême est un temps de grâce au cours duquel le Seigneur multiplie ses efforts pour nous ouvrir les yeux sur nos compromissions avec les exigences évangéliques. Il nous invite avec fermeté et douceur, par la voix de son Apôtre, à redresser la tête : « Si donc vous êtes ressuscités avec le Christ, recherchez les réalités d’en haut, c’est là qu’est le Christ, assis à la droite de Dieu. Tendez vers les réalités d’en haut et non pas vers celles de la terre.
Dans la foi nous sommes invités à monter avec Pierre, Jacques et Jean sur la montagne pour y contempler Jésus en prière, parfaitement uni au Père dans l’Esprit. Dans la foi nous sommes invités à entendre le Père nous redire « Celui-ci est mon Fils, celui que j’ai choisi, écoutez-le ». Dans la foi nous sommes invités à pénétrer dans la nuée, car nous avons besoin de lire l’histoire du monde et la nôtre à la lumière de cette gloire divine pour en comprendre le sens.
Certes, une telle attitude pourrait apparaître comme une fuite hors du réel, vers un monde illusoire où tout se réaliserait selon notre désir. Peut-être était-ce un tel rêve que nourrissait saint Pierre lorsque, sorti de cette même torpeur qui avait saisi Abraham, il crut bon de proposer à Jésus de s’installer en ce lieu béni : « Maître il est heureux que nous soyons ici ; dressons trois tentes, une pour toi, une pour Moïse, et une pour Elie ». Si nous voulons le rejoindre dans la gloire cependant, comme il nous y appelle, il nous faut certes regarder vers les hauteurs pour échapper aux séductions d’ici-bas, mais tout en continuant notre pèlerinage et en mettant nos pas dans ceux de Notre-Seigneur, qui s’est rendu du Thabor au Golgotha. Nous entendrons alors et toujours le Seigneur nous dire « Celui-ci est mon Fils, lui que j’ai choisi pour vous ouvrir le chemin et vous conduire jusqu’à moi : écoutez-le ». Tout à l’heure, il répondra à nos appels et dans le pain et le vin il descendra. Accueillons-le avec grand appétit, exposons-nous ainsi à la gloire de Dieu qui est bien réellement présent en son Eucharistie, afin d’être capables de garder nos yeux tournés vers Lui.

Père Joseph Kinda

01 mars 2007

Catéchèses

Catéchèse du 26 février 2007
l’exposé

Le Credo nous dit : « Il a été conçu du Saint-Esprit, est né de la Vierge Marie »

Tâchons de répondre à la question suivante : que signifient ces deux affirmations ? Quelles en sont les conséquences pour nous ?

Jésus a été conçu dans le sein de la Vierge Marie sans le concours d’un homme, nous le savons bien : c’est l’Esprit-Saint qui est en quelque sorte « descendu » en elle et qui a provoqué la conception de Jésus. Après une grossesse parfaitement ordinaire (en dépit d’un début extraordinaire !), Jésus est né de Marie, il est vraiment son fils, de la même façon que nous sommes tous fils de notre mère. Voilà pour le fait même de la conception et de la naissance de Jésus. Ces deux affirmations ont l’avantage de nous faire préciser quatre réalités fondamentales de notre foi, et qui ont (c’est un hasard) la particularité d’être « abonnées » au chiffre 2 ! Nous allons voir comment :

Il y a deux grands types d’hérésies concernant le Christ (l’hérésie est une doctrine fausse, une erreur sur la foi). Ces deux hérésies sont toujours prêtes à resurgir, même aujourd’hui, et il est bon de les connaître. Le premier type consiste à prétendre que Jésus est seulement un homme, mais qu’il n’est pas Dieu (l’exemple le plus fameux est l’arianisme, nous en avons déjà parlé). Le deuxième type d’hérésie consiste à prétendre le contraire, qu’il est seulement Dieu et qu’il a fait semblant d’être un homme pendant 33 ans (le docétisme). Parfois, on a même fait un mélange des deux en prétendant que le Christ était comme un composé de divinité et d’humanité (Nestorianisme).
Bien au contraire, la foi chrétienne a toujours dit que Jésus était pleinement homme et pleinement Dieu, il faut tenir les deux ensemble, même si c’est fort difficile à penser pour nos esprits limités.

On peut dire (c’est notre deuxième « couple » d’affirmations), par conséquent que Jésus a deux natures : la nature humaine (il est né de Marie, il est vraiment homme), la nature divine (il a été en Marie « conçu du Saint-Esprit », il est pleinement Dieu et éternellement Fils de Dieu).

Troisièmement, nous devons constater que en Jésus, il y a deux volontés : une volonté divine, puisqu’il est Dieu, et une volonté humaine, puisqu’il est vraiment homme. Ceci est pour nous important, car cela veut dire que, depuis Jésus, il y a comme une complicité, une connivence entre la volonté de Dieu et la nôtre. Tout le travail de notre vie chrétienne consiste donc à imiter Jésus au plus près, de façon à ce que notre volonté devienne de plus en plus proche de la sienne, « que ta volonté soit faite », dit-on dans le Notre Père !

Enfin, et c’est notre dernier tandem, il y a deux missions divines. Je m’explique : le Père a envoyé en mission sur la terre l’Esprit et le Fils, afin de révéler aux hommes qui il était et ce qu’il voulait de nous. La mission de l’Esprit est évidemment invisible, tandis que la mission du Fil a été visible. La mission invisible, celle de l’Esprit, a consisté, par exemple, à inspirer les textes de l’Ecriture, à inspirer les prophètes, à donner naissance sur la terre au Fils de Dieu, à faire comprendre à l’Eglise la marche qu’elle devait suivre pour faire la volonté de Dieu. La mission visible, celle de Jésus, a consisté à donner un visage humain à Dieu, à guérir, enseigner, mourir et ressusciter pour obtenir au genre humain le pardon des péchés et la vie éternelle.
Terminons en évoquant Marie, mère de Jésus et donc « mère de Dieu ». Marie est le modèle de l’Eglise, et elle est même la fine pointe de l’Eglise, puisque, comme elle et grâce à elle, l’Eglise est à la fois Vierge et Mère. Elle enfante des élus, elle « met au monde » le Christ (sans l’Eglise, comment le Christ pourrait-il aujourd’hui se manifester au monde ?), et elle réalise tout cela « sans le concours d’une homme », c’est-à-dire surtout grâce à Dieu, sans qu’un être humain soit à l’origine du bien qu’elle fait. Les hommes qui composent l’Eglise se comportent, en principe, comme des instruments de Dieu, conscients que l’Esprit « couvre de son ombre » l’Eglise et que toute conception est Son œuvre à Lui et non celle d’un humain. Je recommande la lecture des livres de Lucienne Sallé, qui a beaucoup réfléchi sur la « féminité de l’Eglise », car la présence des femmes dans l’Eglise devrait nous rappeler la dimension de fécondité et d’accueil de la Grâce, tandis que les hommes, eux, continueront à apporter à l’Eglise leur grâce propre, qui est plutôt une grâce d’organisation et d’efficacité qui elle aussi est importante et nécessaire à l’Eglise.
P. Emmanuel d'Andigné