17 novembre 2009

Homélie du 15 novembre 2009

33ème DIMANCHE DU TEMPS ORDINAIRE – ANNEE B


15 novembre 2009


Dans quinze jours, le dimanche 29 novembre, nous célébrerons le premier dimanche de l’Avent. Ce sera le début de la nouvelle année liturgique. Ce qui veut dire que nous approchons de la fin d’une année liturgique. Nous sommes donc dans le temps où l’Eglise, chaque année, nous fait relire des textes concernant la fin des temps, la fin du monde, et de ce fait la fin de notre vie personnelle.

Ces chapitres des Ecritures sont bien différents des paraboles, souvent pittoresques, employées par Jésus pour faire comprendre par des images simples et un langage familier les réalités de la vie spirituelle et le comportement que nous devons corriger pour devenir de meilleurs chrétiens.

Même s’il y a une comparaison avec le figuier et ses nouvelles feuilles, qui donnent une image concrète et fraiche, reconnaissons que ces chapitres sont particulièrement austères et sévères. Et pourtant ils annoncent la venue du Fils de l’Homme, vainqueur du péché et de la mort.

Comme le plus souvent, la première lecture et l’Evangile se répondent assez précisément. Entre les deux, la lettre aux Hébreux fait le lien entre l’Ancien et le Nouveau Testaments. Dans l’Ancienne Alliance, les prêtres offraient chaque jour, debout, avec respect, les mêmes sacrifices « qui n’ont jamais pu enlever les péchés. » Jésus-Christ au contraire s’offrant lui-même, par son unique sacrifice supprime tous les péchés. Il a accompli sa mission sur terre. Et, comme nous le redisons chaque dimanche dans notre Profession de Foi, le Symbole des Apôtres, « il s’est assis à la droite de Dieu le Père tout puissant », expression imagée qui signifie la divinité du Fils.

« Il a mené pour toujours à leur perfection ceux qui reçoivent de lui sa sainteté. » C’est au passé car le sacrifice du Christ est accompli. Mais il appartient à chacun d’actualiser en lui-même ce sacrifice, de s’y associer pleinement. C’est la raison d’être de la messe, qui rend présent ce sacrifice, et des sacrements qui en découlent.

Revenons au Livre de Daniel, qui met en jeu Michel le chef de l’armée céleste, qui va présider à la délivrance finale. Les textes prophétiques sont toujours difficiles à interpréter, car ils superposent le temps présent et l’au-delà, qui échappe à la chronologie. Il ne faut donc pas chercher une annonce datée de la fin du monde.

Les termes utilisés par Daniel correspondent à la représentation imagée de son époque. C’est ainsi que pour lui dans le ciel sont tenus à jour les registres qui contiennent les noms des vivants, destinés à devenir les membres de la Nouvelle Jérusalem.

« Beaucoup de gens qui dormaient dans la poussière de la terre s’éveilleront. » C’est déjà une annonce de la résurrection. Dieu triomphe du dernier ennemi, la mort personnifiée, et il lui arrache les fidèles qu’elle avait indûment engloutis.

Dans les textes les plus anciens, nous disent les spécialistes, le thème de la résurrection était compris d’une façon symbolique et collective. La promesse de la résurrection individuelle est la réponse prophétique au problème posé par la mort des martyrs.

Ces paroles transmises par Daniel sont empreintes d’une grande espérance. La promesse de la résurrection, pour lui, vise en premier lieu les chefs spirituels du peuple, les « sages » qui l’ont maintenu dans la vraie foi : Dieu seul justifie, mais par leur enseignement ils ont conduit la multitude vers la justice, et vers la vie éternelle, qui n’est pas directement décrite. Mais la lumière du firmament et des étoiles sert de symbole pour évoquer la transfiguration des ressuscités.

« Restez éveillés et priez en tout temps – nous disait le verset de l’Alléluia – ainsi vous serez jugés dignes de paraître debout devant le Fils de l’homme.

C’est la leçon que nous avons à retenir de ce dimanche, qui nous invite à partager les sentiments exprimés par le psaume : « Mon cœur exulte, mon âme est en fête… Tu ne peux m’abandonner à la mort… Tu m’apprends le chemin de la vie… Devant ta face, Seigneur, débordement de joie ! »

Amen
Père Jean Rouillard

09 novembre 2009

Homélie du 08 novembre 2009

Homélie du 32ème dimanche du Temps Ordinaire - Année B
Connaissez-vous la luminothérapie ? On l’utilise dans le traitement de la dépression saisonnière et des troubles du sommeil ; il s’agit d’une projection de lumière censée stopper la production de mélatonine (l’hormone qui nous fait dormir) et stimuler la production de sérotonine (l’hormone qui nous donne la pêche !). Je ne me lance pas dans le débat médical, je souligne simplement le principe, qui est simple et qui se repose sur l’expérience : vous conviendrez avec moi que ces jours-ci, les jours raccourcissent, il pleut, les feuilles tombent … tous les ingrédients sont là pour que nous ayons le moral dans les chaussettes …ajoutez à cela un ou deux journaux télévisés et une épreuve dans votre famille, et le tour est joué ! Et donc, il est bien vrai que quand il fait froid, quand il pleut, quand il fait sombre, il est plus difficile d’être joyeux !

Or, il y a deux sortes de froid, il y a deux sortes de pluies, il y a deux sortes d’obscurité : le froid matériel, la pluie matérielle, l’obscurité matérielle et le « froid » spirituel, incarné par la « sorcière blanche » de « Narnia », cette « obscurité » spirituelle, où nous ne savons plus ce qui est bien vrai, beau, et enfin cette « pluie » du cœur que Verlaine a si bien décrite …

Je propose donc, en ce mois de novembre, une « luminothérapie spirituelle » : elle consiste à s’exposer au soleil de la présence de Dieu, par la prière. Je pense à l’événement désormais régulier des 24h d’adoration (le 28 novembre prochain), mais je pense aussi à quelque chose de régulier, sans quoi on ne pourrait pas parler de « thérapie » …

De la sorte, nous pourrions produire (pardon pour le terme) de la « Dieutonine », qui serait en nous le principe de la joie, non pas une joie superficielle, qui dépende du temps ou des aléas de la vie, mais une joie profonde, une lumière permanente, qui nous fait traverser l’hiver victorieusement, l’hiver matériel et les hivers spirituels …

Dieu est une richesse que personne ne peut prendre, celui qui a Dieu a tout, il n’a besoin de rien d’autre (« que rien ne te trouble, que rien ne t’effraie, celui qui a Dieu possède tout, seul Dieu suffit », disait Sainte Thérèse de Jésus )

Jean 16 "La femme qui enfante est dans la peine parce que son heure est arrivée. Mais, quand l'enfant est né, elle ne se souvient plus de son angoisse, dans la joie qu'elle éprouve du fait qu'un être humain est né dans le monde. Vous aussi, maintenant, vous êtes dans la peine, mais je vous reverrai, et votre coeur se réjouira ; et votre joie, personne ne vous l'enlèvera."

Je ne saurais décrire avec précision ce que j’éprouvais à chaque fois que, à Rome, j’entrais dans le réfectoire des petites sœurs de l’Agneau (communauté nouvelle née en France d’inspiration dominicaine), réfectoire qui respirait à la fois la pauvreté et la joie. Je sentais bien qu’il y avait ce cocktail de joie et de pauvreté, mais je ne me l’expliquais pas bien, pendant le temps de mon séminaire. Aujourd’hui, je le comprends mieux : la pauvreté sans Dieu est une misère double, la pauvreté avec Dieu pour richesse est plus puissante que la richesse même et elle provoque une joie indestructible. Jean 15 : « Je vous ai dit cela pour que ma joie soit en vous, et que vous soyez comblés de joie ! »

Si nous pouvions quitter cette vie en connaissant cette joie et en la portant autour de nous, alors nous nous aurions réussi notre vie, et c’est bien ce que les saints ont fait : le mois de novembre est le mois des saints, il commence par la Toussaint et il est une invitation à la joie en compagnie de Dieu.

Mais la luminothérapie spirituelle ne suffit pas, il est bon de connaître ce que St Ambroise appelait « les trois morts » : en étudiant la Bible, il en déduit qu'il existe trois types de mort :
- la séparation de l’âme et du corps

- la mort au péché, qui consiste à faire mourir dès cette vie tout ce qui a goût de mort, tout ce qui s’oppose à Dieu, formalisé dans les dix commandements

- la mort spirituelle, celle qui consiste, au contraire, tandis qu’on est encore vivant, à être mort à l’intérieur, par l’abandon volontaire de Dieu. C’est de cette mort-là que Jésus parlait lorsqu’il disait « laisse les morts enterrer leurs morts ».

St Paul enseigne en effet que c’est le péché qui fit entrer la mort dans le monde, voilà pourquoi aujourd’hui, la mort fait partie de la nature, de la nature blessée de l’homme et les deux autres morts s’annulent l’une l’autre dans une vie qui sera conforme au Christ

Tous saints !!! C’est le cri de la Toussaint, puissant appel à devenir des êtres lumineux ! Invoquons la Vierge Marie, sainte entre tous, pour qu’elle nous guide sur ce chemin de lumière.

P. Emmanuel d'Andigné

04 novembre 2009

Homélie du 1er Novembre - Toussaint 2009

Homélie de la fête de tous les saints

Avant de vous faire un rapport de voyage de mon escapade à Taizé, je voudrais vous signaler un mot grec que la traduction liturgique a choisi de rendre par le mot « pleurer », penthéo, mais il est bon de savoir que ce mot, dans le Nouveau Testament désigne dans 9 cas sur 14 (tout de même …) la situation précise du deuil ; les 5 autres cas parlent de tristesse sans précision, tout en sachant qu’il pourrait s’agir du deuil …

Cela signifie que l’on aurait pu traduire la fameuse béatitude (certains l’ont fait) par « heureux ceux qui prennent le deuil, ils seront consolés … »

On sait bien, en effet, que la Toussaint fait penser tout le monde à la question de la mort, eh bien l’Evangile de la Toussaint n’est pas seulement là pour nous montrer que la sainteté consiste à vivre conformément aux Béatitudes (c’est une bonne chose de le savoir …), mais aussi une puissante annonce de la résurrection, et que toutes les peines d’ici-bas, dont la mort est sans doute la reine, je cite « sont sans proportion avec la gloire qui doit être révélée en nous » (Rm 8,18)

Mais je ne quitte pas la fête de tous les saints, en vous faisant un premier rapport de voyage de mon court séjour à Taizé, avec quelques centaines de lycéens, cette semaine : je ne m’attarderai que sur deux toutes petites choses

Cette semaine à Taizé, il y a eu une canonisation ! En effet, au cours d’une conversation entre jeunes, l’une d’eux déclara : « Frère Roger, puisqu’il est saint, … »

On sait bien que, objectivement, il est impossible de le canoniser, puisqu’il n’était pas catholique, mais je retiens de cette « canonisation du cœur » une certaine définition de la sainteté et cette définition s’inspire de la vie de cet homme : la sainteté, c’est de l’œcuménisme intérieur. Le saint, c’est sans doute quelqu’un d’unifié, il n’y a pas deux personnages en lui, il n’y en a qu’un. Cela produit deux effets en lui : une grande paix intérieure, et un rayonnement spirituel qui n’échappe à personne.

Comme vous le savez, comme vous l’avez compris, le pontificat du Pape Benoît XVI est très fortement marqué par l’œcuménisme . En effet, le jour de son élection, il prononça une parole qui passa pratiquement inaperçue, mais que certains ont saisi comme une allusion, en fait très claire, à l’œcuménisme : « Andiamo avanti ! » Quelques années auparavant, le Cardinal Ratzinger avait expliqué, dans son livre « voici quel est notre Dieu » que cette expression convenait particulièrement aux grands oecuménistes …

L’histoire a donné raison à ceux qui avait saisi l’allusion, puisque le Saint-Père multiplie, depuis 2005, les gestes dans toutes directions possibles, afin de surmonter les divisions de l’unique Eglise du Christ. Et voici ce qu’il déclara dès 1982 : « mon diagnostic sur les rapports entre l’Orient et l’Occident dans l’Eglise est le suivant : une unité ecclésiale est théologiquement possible en principe entre l’Orient et l’Occident, mais elle n’est pas encore assez préparée spirituellement, et donc, pratiquement, pas encore mûre »

Cela signifie que la recherche de l’unité doit être préparée par « l’œcuménisme intérieur », à savoir la sainteté !

Et lorsque les jeunes se penchent un peu sur eux-mêmes, en particulier dans la préparation du sacrement du pardon, ils finissent par découvrir que leur être est comme « éclaté » par mille désirs, mille directions contradictoires, mille gadgets électroniques et découvrent l’extraordinaire simplicité de Dieu dans une communauté comme Taizé ou dans n’importe quel monastère.

Les divisions dans l’Eglise ne sont que le reflet de nos divisions intérieures, que la fréquentation de Dieu contribue à éliminer.

Je me souviendrai toute ma vie de la question que le cardinal Lustiger nous avait posée, en 1997, sur le champ de Mars, pour l’ouverture des JMJ de Paris : « quel est votre désir ? ». « Quel est votre désir ? » au singulier ! Il faisait appel à ce qu’il y a de plus profond en nous et non aux mille sollicitations qui dispersent notre être. Et ceci n’est pas réservé à la jeunesse …

A tous ceux qui, comme nous, pourraient être découragés à l’idée de se lancer dans cette unifcation un peu exceptionnelle que l’on voit chez les saints, le curé d’Ars disait : « les saints n’ont pas toujours bien commencé, mais ils ont toujours bien terminé »

Parole encourageante, pour que nous recommencions, aujourd’hui, à unifier notre être pour l’orienter vers Dieu.

A propos de parole encourageante, j’ai relevé une partie de l’enseignement d’un frère de Taizé qui parlait des béatitudes, justement, et qui faisait remarquer aux jeunes que le tout début de l’enseignement de Jésus (les béatitudes) était un encouragement, suivi d’ailleurs par un autre encouragement : « vous êtes le sel de la Terre »

Le curé, d’Ars, encore lui, disait à l’envi qu’il fallait passer plus de temps à encourager le bien qu’à dénoncer le mal : mal qu’il dénonçait abondamment, bien qu’il soulignait encore plus …
Nous avons là une indication sur la pédagogie de Dieu à notre égard et donc sur celle que nous devons avoir dans nos relations avec les jeunes et les enfants avec, donc, ce léger déséquilibre en faveur de l’encouragement.

Heureux sommes-nous, en effet, de préparer un bonheur éternel avec Dieu et d’éprouver déjà un peu ce bonheur, dans la foi, dans l’Espérance et dans la charité !
P. Emmanuel d'Andigné