24 février 2011

homélie du 20 février 2011-comment devenir parfaits ?


Homélie du 7ème dimanche du temps Ordinaire - Année A

Je voudrais vous parler de deux choses, aujourd’hui, la première concerne le « nerf de la guerre», et la seconde les textes d’aujourd’hui.

Nous lançons, aujourd’hui, notre « souscription annuelle » ; tout d’abord, une histoire vraie : peut-être connaissez-vous la plus grosse librairie du monde, amazon.fr … son fondateur, Denis Terrien est un entrepreneur français, catholique ; un jour, alors qu’il discutait avec un ami protestant, celui-ci lui demande : « et toi, tu donnes combien à ton Eglise ? » ; après un silence, il répond : « eh bien, avec ce que je donne à la quête le dimanche, ça doit représenter un ou deux pour cent de mon salaire … » ; « un ou deux pour cent ??? Mais dans la Bible, il est écrit dix pour cent ! Tu devrais faire un effort et donner au moins trois ou quatre pour cent … » ; Denis Terrien témoigne qu’il décida, l’année suivante, de donner vraiment la « dîme (10%)» et qu’il a –je cite- « reçu le centuple de ce qu’il avait donné » … reste à savoir de quel centuple il s’agit !

En tous les cas, je dois noter avec joie deux points : l’augmentation des dons qu’on a noté l’année dernière et l’augmentation du nombre de donateurs ; merci, car vous êtes sollicités de toutes parts, et vous vous montrez tout de même très généreux.

Si vous n’avez pas un gros budget, vous vous souviendrez que « les petits ruisseaux font les grandes rivières », et si au contraire vous avez de gros moyens, souvenez-vous que les gros ruisseaux aident aussi les grosses rivières ! Que chacun donne selon son porte-monnaie et son cœur (un zéro, deux zéro, trois zéros, quatre zéros si vous voulez !)

A quoi cela va servir ?
A sécuriser le chauffage (protection de la cuve à fioul, ce sont des travaux assez lourds) et si la somme est importante, refaire la sonorisation, qui est un sujet récurrent dans les conversations après la messe !

Quant aux textes d’aujourd’hui, je voudrais m’attarder sur ce « proverbe » bien connu que Jésus cite dans l’Evangile : « Œil pour œil, dent pour dent » ; ce proverbe correspond, il me semble, à la deuxième des trois périodes de l’histoire de la vengeance
1)      Il fut un temps ou la vengeance était pire que l’offense, c’était la barbarie des premiers temps
2)      Avec « œil pour œil … » la vengeance devient équivalente à l’offense, ce qui est un pas considérable vers la civilisation
3)      Avec le Christ, Dieu reprend ce qu’il avait en fait déjà dit mais que le peuple élu n’avait pas écouté : pas de vengeance et même amour des ennemis !

Il faut bien constater, et c’est une joie, que cette parole de Jésus a toujours été vécue et respectée dans l’Eglise … je pense à Saint Etienne qui déclarait, tandis qu’il était lapidé par ses frères de race : « ne leur compte pas ce péché »; je pense à Sergeï Kourdakov, commissaire politique de l’Union Soviétique qui entendit un jour une jeune femme prier pour lui tandis qu’il la frappait (on peut lire son histoire dans le livre « pardonne-moi Natacha »), évènement qui marqua sa conversion ; je pense à Tim Guénard, martyrisé par ses propre s parents et qui a puisé en Dieu la force de les aimer à nouveau, et bien d’autres encore … qui tout au long de l’histoire ont montré que cette parole était audible, finalement et même réalisable.

"Soyez parfaits, je suis parfait" … "soyez saints, je suis saint" : j’attire votre attention sur ce détail syntaxique qui consiste à accoler ces deux affirmations. Dieu « pose » sa sainteté tout près de la nôtre, il « pose » sa perfection tout près de la nôtre, et c’est qui rend possible la mise en application de tels propos. C’est parce que Dieu pose son être tout près du nôtre que notre être peut se perfectionner et se sanctifier, c’est la fréquentation de Dieu qui divinise.

En fait, il se produit comme une sorte de « capillarité » spirituelle. La capillarité, dit le dictionnaire, est « la tendance d'un liquide à remonter vers le sommet d'un tube très fin. » Le jour de notre baptême, nous recevons le don du Saint-Esprit, et donc le don de la sainteté de Dieu, et ensuite, l’âme s’élève, l’âme « grimpe », comme l’eau dans le tube, vers la perfection évangélique.

Et puis l’héroïsme n’est pas une réalité extraterrestre, justement, il est proprement humain ! Vous connaissez cet épisode fameux de Guillaumet, aviateur français, qui en 1930 « s’échoua » dans la cordillère des Andes et marcha 4 jours et 4 nuits dans des conditions que personne n’oserait imaginer (« Es imposible », ont déclaré les habitants de la région), en pensant à son épouse et à ses camarades. Il déclara alors, à Saint-Exupéry : « Ce que j’ai fait, je te le jure, jamais aucune bête ne l’aurait fait ». L’héroïsme n’est ni animal ni divin, il est proprement humain ! Pas animal, bien sûr, c’est évident, mais Dieu non plus n’est pas héroïque : il est ordinaire que Dieu fasse l’extraordinaire. C’est en tant qu’homme que le Fils de Dieu, Jésus, s’est montré héroïque dans sa passion et dans sa mort, pas en tant que Dieu.

Bref, ce serait une grande défaite pour Dieu, si nous baissions les bras et que nous renoncions à la perfection. Pourquoi ne serions-nous pas des héros, après tout ? Des héros ordinaires, mais des héros quand même … avec la grâce de Dieu !

Ste Bernadette, notre sainte Patronne, n’a pas été canonisée pour avoir vu la sainte Vierge, mais pour avoir ressemblé à la sainte Vierge, à force de la fréquenter ; le chapelet, sa prière préférée, est la cause principale de cette transformation en sainte Bernadette ;

Et puis je pense à cette phrase merveilleuse de la Vierge : « voudriez-vous me faire la grâce de venir ici pendant 15 jours ? ». Eh bien aujourd’hui, la Vierge nous dit : « voudriez-vous me faire la grâce de devenir des saints ?" La sainte Vierge n’est pas Dieu, elle n’a pas l’autorité pour dire « soyez saints », car Dieu est le seul saint, et il veut partager sa sainteté, c’est-à-dire sa joie, sa bonté, son enthousiasme, et il a le pouvoir de le faire. La Vierge, elle dirait plutôt : « voudriez-vous me faire la grâce de devenir des saints ?"

 P. Emmanuel d'Andigné

17 février 2011

Homélie du 13 février 2011-qu'est-ce que la Géhenne ?

Homélie du 6ème dimanche du Temps Ordinaire - Année A

Un mot est prononcé trois fois dans cet Evangile, qui n’appartient pas à notre vocabulaire, et qui est étranger à notre culture : la « Géhenne » : il s’agit, en fait, tout simplement d’une des vallées qui bordent Jérusalem, au sud-ouest de la ville, et que l’on pourrait désigner comme la « déchetterie » de Jérusalem, à laquelle de temps en temps, on mettait le feu, afin de purifier l’atmosphère et les lieux. C’est delà que vient l’image du feu que Jésus utilise pour décrire l’Enfer, et qui a fait florès dans l’art …

Mais on pourrait utiliser d’autres images, de prime abord fort différentes. Par exemple, dans le roman « Mr Ouine » de Bernanos ou dans les chroniques de Narnia, l’enfer est froid. Je cite : « On parle toujours du feu de l'enfer, mais personne ne l'a vu. L'enfer, c'est le froid », écrit Bernanos. Et puis les enfants savent bien que la sorcière blanche, dans Narnia, est celle qui plonge la terre dans un hiver continuel (100 ans), tandis que Alsan, le symbole du Christ, ramène la chaleur et le printemps en revenant à Narnia. La mentalité moderne a découvert l’individualisme et l’absence de relations, et elle craint plus le froid que le chaud …

Nous le voyons bien, il n’y a pas de contradiction avec l’Evangile : les images de Jésus sont valables surtout pour son époque, et éventuellement pour la nôtre, mais pas forcément … ce qu’il faut retenir, c’est le principe !

Quel est le principe de l’Enfer ? Quel est le principe de la Géhenne ? A l’époque de Jésus, le principe est la destruction de ce qui est inutile (les déchets), surtout, et en attendant, la mise à l’écart de ces choses devenues inutiles dans la vie de tous les jours.

Le principe donc, c’est la séparation et la mort … L’Enfer, qui existe bel et bien puisque jésus nous l’a révélé, c’est la séparation de Dieu, l’éloignement de Dieu, la mise à l’écart de Dieu … et tout ceci conduit à la mort …

Comment ne pas penser aujourd’hui à ce que nous montrent les apprentis sorciers qui cette semaine ont annoncé la naissance d’un « bébé médicament » (il faudra expliquer à cet enfant, plus tard, qu’il n’a pas été voulu pour lui-même –ce qui est très agréable sans doute, à apprendre-, mais pour guérir sa grande sœur, sans compter que pour le « fabriquer –il n’y a pas d’autres mots- il a fallu détruire un certain nombre d’autres embryons pas assez parfaits pour être des « médicaments »*  [voir note] ) ? En s’éloignant de Dieu, on commence à vivre l’Enfer, et Jean-Paul II avait raison de parler d’une « culture de mort » pour désigner ces choses très graves.

Pendant des années, y compris dans l’Eglise, on a cessé de parler de l’Enfer, dans le but très louable de montrer que Dieu voulait nous faire vivre, avant tout, et c’est certainement vrai …

Mais on n’a jamais vécu sans écarter ce qui nous empêche de vivre ! Parler du Ciel sans parler de l’Enfer, c’est aussi logique que de parler d’écologie sans jamais parler de pollution … et c’est ce que Jésus fait, en mettant sous nos yeux comme deux « pentes » : une pente ascendante, vers Jérusalem, qui demande un effort, vers le haut, vers la vie, vers l’amour … et une pente descendante, plus facile, vers le bas, vers la mort, vers la privation définitive d’amour, vers la géhenne.

La 1ère lecture le fait aussi avec netteté, lorsqu’elle dit : « Le Seigneur a mis devant toi l'eau et le feu : étends la main vers ce que tu préfères. La vie et la mort sont proposées aux hommes, l'une ou l'autre leur est donnée selon leur choix. »

On pense aussi au fameux passage du Deutéronome (chapitre 30, versets 19 et suivants) : « Je prends aujourd'hui à témoin contre toi le ciel et la terre : je te propose de choisir entre la vie et la mort, entre la bénédiction et la malédiction. Choisis donc la vie, pour que vous viviez, toi et ta descendance, en aimant le Seigneur ton Dieu, en écoutant sa voix, en vous attachant à lui ; c'est là que se trouve la vie, une longue vie sur la terre que le Seigneur a juré de donner à tes pères, Abraham, Isaac et Jacob »

« Tel Père, tel Fils », Jésus présente les choses à la manière du Père !

Tout ceci me fait penser au baptême des tout petits enfants : lorsqu’un bébé naît, une des premières choses que l’on fait est de le laver … et on recommence souvent ce geste (à vrai dire toute notre vie), en éliminant, en fait, les peaux mortes, et tout ce qui est mauvais pour notre santé.

Eh bien le baptême fait la même chose : il opère un grand nettoyage, une grande purification (il purifie du péché originel) et toute notre vie consiste à enlever tout ce qui ne peut que mourir, dans une vie qui plaise à Dieu. C’est la raison pour laquelle Saint Pierre dit (1Pierre 3) : « être baptisé, ce n’est pas être purifié de souillures extérieures, mais c’est s’engager envers Dieu avec une conscience droite et participer ainsi à la résurrection de Jésus »

On ne ressuscite pas automatiquement, on participe à la résurrection de Jésus par une vie qui lui plaise… mais comment plaire à Dieu ?

Eh bien Dieu nous a donné la réponse : en écoutant son Fils parler sur la montagne.

Je vous propose donc un exercice pratique :
Lire le sermon sur la montagne (Mathieu, 5-6-7), et sur une feuille à côté, résumer l’enseignement, pour en tirer la « substantifique moelle », comme dirait Rabelais …

Cependant, à la fin de l’exercice, je recommande une vérification de l’interprétation, au moyen du Catéchisme de l’Eglise Catholique, ou alors en bombardant de questions un prêtre lors d’une soirée Abraham … un prêtre, c’est comme une voiture, il s’use plus vite si on ne sert pas !

Cette « vérification » a deux intérêts :
1)      Eviter une lecture seulement morale de l’Evangile, dans laquelle nous tombons spontanément (il y a bien d’autres richesses que la morale dans l’Ecriture)
2)      Eviter une interprétation hâtive qui pourrait nous induire en erreur

Bonne lecture !

* Note : sur 270 000 embryons fécondés in vitro en France, seuls 14 000 voient le jour chaque année (source : Mission d'information sur la révision des lois de bioéthique, janvier 2010) : cela représente 19 embryons "perdus" pour une naissance.

P. Emmanuel d'Andigné

Homélie du 06 février 2011-comment rester "le sel de la terre" ?

Homélie du 5ème dimanche du Temps ordinaire - Année A

Quel est le point commun entre le sel et la lumière ? Car ce n’est pas la même chose tout de même … eh bien, leur point commun est de n’être pas utiles à eux-mêmes : ils servent d’autres réalités, qui apparaissent à nos yeux plus importantes : le sel relève le goût des aliments, la lumière n’est jamais ou presque regardée pour elle-même, elle permet de voir quelque chose d’autre …

Je voudrais d’abord vous faire remarquer que Jésus ne dit pas « ce serait bien si vous étiez un peu plus lumineux … tâchez donc d’être le sel de la terre », il dit bien « vous êtes !... » ; cela veut dire que nous devons prendre conscience de notre dignité et ne pas feindre une fausse humilité.

Nous sommes la lumière du monde, c’est une certitude puisque Jésus nous le dit, et cela provoque en nous, espérons-le, une saine humilité : d’un côté, sans nous, le monde aurait moins de goût et il serait dans les ténèbres, de l’autre, nous savons bien que la source de la lumière n’est pas en nous, mais en Dieu ; le tout est de ne pas s’attribuer l’origine du goût et de la lumière …

En entrant dans cette église, pas un d’entre vous ne s’est amusé à mesurer les photons grâce auxquels vous pouviez y voir clair : vous vous êtes concentrés sur ce que vous montrait la lumière et vous avez bien fait. L’Eglise n’est pas faite pour elle-même, mais pour Dieu et pour les hommes.

Ensuite, je souhaiterais vous faire remarquer que Jésus semble inquiet : « ils risquent de s’affadir … » semble-t-il nous dire. Tous les parents ici présents savent bien que lorsqu’un adulte est inquiet, il « transmet » son inquiétude à son entourage, surtout aux enfants. Eh bien, il serait beau que nous aussi nous ayons cette inquiétude sur notre propre tiédeur et que nous prenions les moyens de ne pas nous « éteindre ».

Ceci dit, comment faire pour ne pas perdre le goût ? Comment demeurer « la lumière du monde » ?

Eh  bien, tout d’abord, la première lecture nous donne un critère infaillible pour savoir si nous avons encore du goût : sommes-nous au service des pauvres ? Bien sûr, c’est vrai, il y a plusieurs sortes de pauvretés, et on le dit aujourd’hui beaucoup, mais il demeure vrai que la pauvreté matérielle est un point d’attention premier dans l’Eglise depuis les origines et nous devons la maintenir vive !

Ensuite, je pense à ce grand trésor qu’est pour nous la messe du dimanche : n’est-elle pas un « plein » de sel et de lumière ? Quelle chance nous avons d’y participer et de raviver ainsi en nous le don de Dieu ! Non seulement, nous satisfaisons à la justice (aller à la messe le dimanche, c’est faire justice à Dieu, lui donner ce à quoi il a droit, un jour par semaine), mais en plus, nous y trouvons la nourriture nécessaire pour être vraiment ce que nous sommes !

P. Emmanuel d'Andigné

09 février 2011

Lettre au maire d'Angers

Voici le texte d'une lettre envoyée à la mairie d'Angers, à propos de l'actualité de l'affichage ...

Emmanuel d’Andigné
Prêtre
7, rue de Locarno
49000 ANGERS


Objet : affichage du salon de l’érotisme


Angers, le 05 février 2011


Monsieur le Maire,
Comme vous le savez, depuis deux ans, je crois, sont affichées régulièrement dans les rues d’Angers des publicités pour le « salon de l’érotisme », qui se tiennent à Tours, Nantes, et maintenant ces jours-ci  Rennes. Comme vous le savez également, ce salon est en fait une banalisation de la pornographie, grave atteinte à la dignité humaine, et en particulier de la dignité des femmes, que l’on expose aux regards à la façon des « vedettes » du salon de l’agriculture …

Je suis soucieux de la dignité de l’être humain et de l’amour, tout autant que de la liberté des personnes qui se rendent à de telles manifestations (et c’est bien leur droit), mais je m’interroge sur les conséquences d’un tel affichage sur la conception de l’amour que l’on installe ainsi, peu à peu, dans le cœur et l’intelligence  des jeunes et des enfants. Que signifiera, demain, le mot « amour » pour eux ? Nous en sommes responsables.

Votre prédécesseur, Jean Monnier, avait interdit, en son temps, l’affichage du « minitel rose » à Angers, pour que sa ville n’encourage pas la prostitution et donc l’exploitation d’êtres humains ; Il serait tout à votre honneur d’en faire autant pour un affichage dont la portée anti-éducative est beaucoup plus grave qu’à cette époque, et sur le fond, et sur la forme, à savoir l’accès à Internet qui est largement à la portée des enfants.

Je vous prie de recevoir, Monsieur le Maire, l’expression de mon meilleur souvenir.

E d’Andigné

04 février 2011

Homélie du 30 janvier 2011-l'âme aussi doit se nourrir ... de Dieu !

Homélie du 4ème dimanche du Temps ordinaire - Année A

Pour les collégiens, samedi soir :
Kévin-Emmanuel vous a préparé un dessert surprise pour la réunion de ce soir : or il se trouve que j’ai parlé de nourriture, justement, aux enfants du catéchisme mercredi dernier, et je trouverais dommage que vous soyez vous, privés de cette réflexion : ils ont sans doute compris ce que j’ai dit, mais je pense que vous la comprendrez encore mieux, car vous vivez certaines choses qu’ils ne connaissent pas encore …

Il existe, pour le corps, trois sortes de nourriture : la nourriture indispensable, mais pas forcément agréable (elle est bonne), agréable, mais pas forcément indispensable (bonne aussi), et la mauvaise nourriture. Le poisson, la viande, les fruits et les légumes sont indispensables … les fromages, desserts, apéritifs et digestifs sont agréables … les champignons vénéneux et la nourriture avariée sont mauvais !

Il en est de l’âme comme du corps : on pourrait appliquer, analogiquement, ces trois catégories aux « nourritures de l’âme : Indispensable / Agréable / Mauvaise.

La nourriture indispensable, c’est Dieu lui-même ! Dans sa parole, mais aussi dans son corps et son sang. On peut qualifier d’agréable la culture, tout type de savoir, et c’est là que la frontière entre indispensable et agréable mais non indispensable est plus difficile à fixer pour l’âme … en revanche, la mauvaise nourriture est assez facile à identifier : musique satanique, littérature dépravée, mauvais spectacles sur Internet, ou même à la télévision …

Pour tous, aux autres messes :
La liturgie de la Parole, aujourd’hui, notre nourriture indispensable de chaque semaine, est un puissant appel à l’humilité

Sophonie le dit clairement : « cherchez l’humilité ! » ; le psaume, lui, mentionne opprimés, affamés, enchaînés, aveugles, accablés, étrangers, veuve, orphelin, qui sont tous des humiliés, par définition , quant à Saint Paul, il rappelle que ce qu’il a de fou, de faible, d’origine modeste et méprisé dans le monde fait l’objet du choix de Dieu.

Il y a un intrus, très important, dans le psaume, cependant : les justes ! Ca n’est pas parce que l’on est petits et souffrants qu’on est forcément justes … et voilà pourquoi, ce qui est exalté n’est pas ce qui est petit, c’est ce qui est petit et juste !

L’Evangile, lui, continue la liste des humiliés : pauvres de cœurs, ceux qui pleurent, les affamés, les persécutés. Cependant, notez que sont déclarés heureux, aussi, les doux, les miséricordieux, les cœurs purs, les artisans de paix : convenez avec moi qu’il ne s’agit pas forcément de petites gens …

Tout le monde connaît bien « le chêne et le roseau » (jean de la Fontaine) : c’est une peinture grossière, mais juste, de l’humilité qui tient debout (le roseau) et de l’orgueil qui s’écroule (le chêne). Avec la parole de Dieu, la peinture est plus subtile, comme vous le voyez.

Et je crois qu’il suffit d’ajouter deux choses : la première est une invitation à la lecture, la seconde est une invitation à rencontrer quelqu’un

La lecture : je recommande la découverte du chapitre 4 du livre de l’Apocalypse, le voici : J'ai vu une porte ouverte dans le ciel. Et la voix, que j'avais déjà entendue, pareille au son de la trompette, me disait : « Monte jusqu'ici, et je te ferai voir ce qui doit arriver par la suite. » Aussitôt je fus saisi par l'Esprit. Un trône était dressé dans le ciel, et sur le Trône siégeait quelqu'un. Celui qui siège ainsi a l'aspect du jaspe ou de la cornaline ; et tout autour du Trône, il y a un halo de lumière, avec des reflets d'émeraude. Tout autour de ce Trône, vingt-quatre trônes, où siègent vingt-quatre Anciens, portant des vêtements blancs et des couronnes d'or. Et du Trône sortent des éclairs, des clameurs, des coups de tonnerre, et sept torches enflammées brûlent devant le Trône : ce sont les sept esprits de Dieu. Devant le Trône, il y a comme une mer, aussi transparente que du cristal. En face du Trône et autour de lui, quatre Vivants, ayant des yeux innombrables en avant et en arrière. Le premier Vivant ressemble à un lion, le deuxième à un jeune taureau, la figure du troisième est comme celle d'un homme, le quatrième ressemble à un aigle en plein vol. Les quatre Vivants ont chacun six ailes, avec des yeux innombrables au-dehors et au-dedans. Et ils ne cessent pas de proclamer jour et nuit :« Saint ! Saint ! Saint, le Seigneur, le Dieu tout-puissant, celui qui était, qui est et qui vient. » Chaque fois que les Vivants rendent gloire, honneur et action de grâce à celui qui siège sur le Trône, à celui qui vit pour les siècles des siècles, les vingt-quatre Anciens tombent à genoux devant celui qui siège sur le Trône, et ils adorent celui qui vit pour les siècles des siècles ; ils jettent leur couronne devant le Trône en disant :  « Notre Seigneur et notre Dieu, tu es digne de recevoir gloire, honneur et puissance puisque c'est toi qui as créé toutes choses :par ta volonté elles existent et elles ont été créées. »

Je voudrais vous faire remarquer les couronnes, qui signifient que Dieu leur a fait de grands dons, mais qu’ils ne gardent pas pour eux et attribuent à Dieu pour que la louange lui revienne. L’humilité consiste à reconnaître ce qu’il y a de beau et de réussi en soi, et à l’attribuer à Dieu ! Se lamenter sur les défauts entraîne la tristesse, et la tristesse connaît bien son maître (ce n’est pas Dieu …), Dieu est maître en joie. Voilà pour l’invitation à la lecture …

Pour l’invitation à rencontrer une personne, il faut revenir à Sophonie : « Cherchez l’humilité », dit-il. Mais auparavant, vous l’avez entendu, il déclare : « cherchez le Seigneur »

L’humilité en personne, c’est Dieu, l’humble par excellence, c’est Dieu, lui qui est le seul, pourtant, à avoir tous les motifs d’être orgueilleux … et d’ailleurs, tout le monde sait bien que les huit béatitudes sont en réalité un autoportrait de Jésus ; c’est d’ailleurs l’origine de son autorité, ce qu’il enseigne, il le fait.

Qui se ressemble s’assemble : à fréquenter le Dieu humble, on s’humilie un peu, et on ressemble de plus en plus au roseau, qui ploie, mais ne rompt pas : c’est ce que je vous souhaite de tout cœur !

P. Emmanuel d'Andigné

Homélie du 23 janvier 2011-Jésus veut l'unité de son Eglise

Homélie du 3ème dimanche du temps ordinaire - Année A

« Je vous exhorte, au nom de notre Seigneur Jésus-Christ, à être tous vraiment d’accord ; qu’il n’y ait pas de divisions entre vous, soyez en parfaite harmonie de pensées et de sentiments. » C’est ce qu’écrivait Saint Paul dans sa première lettre aux Corinthiens, comme nous l’avons entendu tout à l’heure. Ces exhortations de l’Apôtre conviennent particulièrement bien pour cette semaine de prière pour l’unité des chrétiens.

Rappelons, pour les plus jeunes, mais peut-être aussi pour d’autres, que cette semaine est due à l’initiative d’un prêtre français, l’Abbé Paul Couturier ; Ces sept jours, du 18 au 25 janvier, réunissent depuis 1936 des chrétiens autour de célébrations et manifestations diverses. Née à Lyon, cette semaine a pris de l’ampleur, puisqu’elle est désormais fêtée un peu partout dans le monde, entre chrétiens catholiques, anglicans, orthodoxes et protestants ; Elle est organisée par le Conseil Pontifical pour l’unité des chrétiens et par le Conseil œcuménique des Eglises. Elle est clôturée à Rome à la basilique Saint-Paul Hors-les-murs, le 25 janvier, jour de la fête de la conversion de Saint Paul, au cours d’une cérémonie présidée par le Pape.

Si les divisions entre humains sont toujours regrettables, elles sont d’autant plus choquantes lorsqu’elles sont le fait de personnes professant la même foi en Jésus-Christ Fils de Dieu. C’est lui, qui, au soir du jeudi saint, a prié son Père devant des disciples en disant : « je prie pour ceux qui croient en moi : que tous soient un, comme toi, Père, tu es en moi et que je suis en toi, qu’ils soient un en nous, eux aussi, afin que le monde croie que tu m’as envoyé et que tu les as aimés comme tu m’as aimé. » C’est donc le témoignage des chrétiens qui est en jeu.

Concrètement, pour notre pays, les statistiques nous donnent les chiffres approximatifs suivants : 64 % des français se disent catholiques, 2 % se disent protestants, 0,5 % orthodoxes, 5% d’autres religions (Islam, bouddhisme) et 28% sans aucune religion.

Pour le Christianisme universel, rappelons que la séparation des orthodoxes date de 1054. C’est la rupture entre le pape Léon IX et le patriarche de Constantinople. Le début du protestantisme est de 1517 avec Luther. L’anglicanisme date de 1531, avec le roi Henri VIII.

Concernant cette religion, un évènement très important a eu lieu à Londres il y a huit jours, le 15 janvier, dans la Cathédrale de Westminster : trois anciens évêques anglicans ont été ordonnés prêtres catholiques. La raison principale de leur rupture avec l’Eglise anglicane était l’ordination des femmes prêtres, autorisée depuis 1992, et la perspective de femmes évêques. Une cinquantaine de prêtres anglicans suivront l’exemple de ces trois anciens évêques au cours de la semaine de Pâques. Le pape Benoît XVI a créé un « ordinariat » pour accueillir des nouveaux prêtres catholiques, dont beaucoup sont mariés et continueront à vivre normalement dans le mariage ; N’oublions pas que de gros problèmes pratiques ont dû être résolus à leur sujet.

En dehors de ces cas très particuliers, les dialogues entre les différentes Eglises chrétiennes se poursuivent ; Si l’on regarde en arrière, on voit que d’énormes progrès ont été accomplis depuis un siècle, mais les obstacles à franchir sont encore nombreux, même avec les orthodoxes, dont les positions doctrinales ne diffèrent pas, pourtant, de celles des catholiques. Mgr Farrell, Secrétaire du Conseil Pontifical pour l’unité des chrétiens reconnaît qu’il faut procéder « lentement et avec précaution ».

Et Benoît XVI a écrit : « nous devons être en mesure de faire entendre, dans l’époque qui est la nôtre, une voix commune sur les grandes questions,  et de témoigner de la présence du Christ comme Dieu vivant ; nous ne pourrons pas établir une unité parfaite dans un délai prévisible, mais nous faisons ce qui est possible pour remplir une vraie mission et apporter un témoignage authentique, ensemble, en tant que chrétiens dans ce monde. »

Comme nous le voyons, la route sera encore longue. Il est tellement plus facile de se diviser, de s’exclure, que de se raccorder et se pardonner ; avant la communion, nous demandons au Seigneur : « Pour que ta volonté s’accomplisse, donne toujours à ton Eglise cette paix et conduis-la vers l’unité parfaite. » Cette prière est toujours d’actualité.

P. Jean Rouillard

Homélie du 16 janvier 2011-les 4 sens de l'Ecriture


Homélie du 2ème dimanche du Temps Ordinaire - Année A

En 2008 a eu lieu le 12ème synode des évêques à Rome, avec pour thème « la Parole de Dieu » ? Deux ans plus tard, en 2010, Benoît XVI reprend les conclusions du synode et ajoute sa touche personnelle : c’est l’exhortation post-synodale « verbum Domini » ? Dans ce texte, le Saint-Père aborde évidemment ce que l’on appelle les « quatre sens de l’Ecriture ». Cette expression, qui nous vient des Père de l’Eglise, nous présente en réalité deux catégories : le sens littéral et le sens spirituel des Ecritures.

Le sens littéral, c’est ce qui est dit effectivement, les mots qui sont prononcés, ou ce qui est dit historiquement –du moins quand le texte est de nature historique. Le sens spirituel, lui, est plus profond, il contient trois « étages » : le sens moral, le sens allégorique (aïe ..), et enfin le sens anagogique (pardon pour tous ces gros mots !). En dépit des mots, que vous n’utilisez sans doute pas le matin au petit déjeuner, la réalité est finalement assez simple et accessible à tous …

Le sens littéral, c’est ce qu’il y a de plus simple

Le sens moral, quant à lui, n’est pas compliqué non plus : il s’agit, en écoutant le texte, de savoir ce qu’il faut faire ou éviter

Le sens allégorique, signifie que grâce à ce texte, nous savons ce qu’il faut croire, ce qu’il faut savoir sur Dieu, sur l’homme, sur le monde : le je crois en Dieu, finalement, c’est un concentré d’allégories tirées de l’Ecriture, c’est un résumé efficace et fiable, de tout ce que l’on a extrait de la parole de Dieu, comme sens profond et général

Le sens anagogique (et c’est le dernier gros mot pour aujourd’hui) est la manière dont la parole de Dieu nous conduit au ciel, nous donne le goût du Ciel, nous fait entrouvrir la porte du Ciel, nous donne déjà un petit air de Ciel, nous fait comprendre un peu quelque chose du Ciel.

Pour le dire autrement, Benoît XVI utilise un célèbre adage du Moyen-Age (Verbum Domini, N°37) : « Le sens littéral enseigne les événements, l’allégorie ce qu’il faut croire, le sens moral ce qu’il faut faire, l’anagogie vers quoi il faut tendre». Alors allons-y !

Le sens littéral de cet Evangile : on écoute à nouveau le récit du baptême (comme la semaine dernière, mais « façon Saint Jean », à la manière de Saint Jean … On sait que cet évènement prend place après une longue période de « vie cachée » à Nazareth et que cela inaugure trois années, sans doute de vie publique (on a calculé cette période de trois années sur une base très logique : il y a trois Pâques mentionnées dans l’Evangile selon saint Jean …).

On peut maintenant passer à la suite, nous allons donc devoir « décoller » un peu, mais avouez que si on ne décolle pas dans une église, à quoi sert une église !?

Avant de passer à l’étape suivante, un principe important : jamais le sens spirituel n’annule ou ne remplace le sens littéral. Et en tous les cas, nous ne devons pas en rester au sens littéral, car, dit Saint Paul : «la lettre tue, mais l’Esprit donne la vie» (2 Co 3, 6)

Le sens moral de cet Evangile, c’est que, curieusement, nous devons passer devant Jésus ; on rencontre d’abord Jean-Baptiste puis Jésus, d’abord le chrétien, prêtre, prophète et roi puis Jésus …mais dès qu’on nous a rencontrés, nous devons nous effacer et permettre la rencontre directe avec le Christ.

A cet égard, je puis raconter une anecdote : nous avions fondé, sur la proposition du directeur d’un collège de Cholet, un groupe de prière ; nous commencions donc nos « séances » sur un petit discours sur la prière, l’art de la prière, comment prier etc … eh bien il ne a pas fallu plus de deux ou trois séances pour nous apercevoir que finalement, nous faisions « écran » entre Dieu et les collégiens, à force de discours ou de dire tout haut « nos » prières. Nous avons appris, sur le tas, à présenter les enfants à Dieu, à présenter Dieu aux enfants, et à laisser, ensuite, la conversation s’établir entre eux !

Pour les parents, c’est donc cela, apprendre la prière aux enfants : leur présenter leur père des Cieux, et laisser s’établir la confiance et l’amour.

Le sens allégorique, maintenant : il nous révèle deux choses, au moins : Jésus est le Fils de Dieu, et depuis notre baptême, nous connaissons la même réalité. A ce sujet, je note avec vous un fait curieux : Jean-Baptiste, qui n’est autre qu’un cousin de Jésus, déclare à son endroit « je ne le connaissais pas » ;  c’est pour le moins étrange, mais cela nous révèle que nous avons beau savoir qu’il y a un Dieu et même savoir qui il est, mais « connaître » Dieu, voilà qui est plus difficile, et plus intéressant encore !

Le sens anagogique, pour terminer : nous le savons, au Ciel, il y a le Père, le Fils et le Saint-Esprit, ils sont tous trois présents dans cet évangile : Jésus, bien sûr, l’Esprit, sous l’apparence d’une colombe, et le Père (« celui qui m’a envoyé baptiser dans l’eau m’a dit … »).

Au Ciel, nous serons emportés dans ce mouvement trinitaire, nous serons dans les bras du Père, comme le Christ, et nous serons aussi confiants et heureux qu’un enfant contre sa mère, comme dit le psaume (130).

Demandons à l’Esprit Saint d’avoir un regard pénétrant sur la Parole de Dieu, telle qu’elle resplendit dans l’Ecriture et dans la tradition. Invoquons l’Esprit-Saint, Il nous conduira dans la vérité toute entière.

 P. Emmanuel d'Andigné