24 juin 2012

Homélie du 17 juin 2012-Jésus et sa pédagogie


Homélie du 11ème dimanche du Temps Ordinaire - Année B

Jésus, par de nombreuses paraboles semblables, leur annonçait la Parole, dans la mesure où ils étaient capables de la comprendre.

En bon pédagogue, il avance pas à pas afin que son auditoire le suive petit à petit, là où il veut les emmener, c’est-à-dire dans la connaissance de Dieu, de leur créateur.

La première parabole nous invite à la confiance et à la patience.

Une fois le grain en terre, il pousse et rien ne l’arrête … Tout se fait sans intervenir et un jour il suffira de prendre la faucille : ce sera le temps de la moisson.

Il est inutile de s’affoler ou de s’inquiéter, le jour de la moisson arrivera nécessairement.

Nous aimerions bien que les choses avancent plus vite par notre action. Nous aimerions bien que nos problèmes se résolvent plus vite, que nos proches réagissent plus vite à nos conseils et que nos prières soient plus rapidement exaucées.

Lorsqu’un enfant fait une demande particulière à ses parents, est-ce qu’il obtient tout de suite ce qu’il désire ? Non, pas forcément. Les parents éduquent à la patience. Eh bien, Dieu fait de même avec nous.

Dieu est patient envers nous et envers tous ceux qui nous entourent. Il est discret dans ce qu’il fait. Il laisse mûrir, il ne force pas, il laisse libre. Faisons de même. Labourons, semons et attendons l’heure de la moisson.

Sinon, nous risquons de nous décourager, de baisser les bras, de nous sentir incompris, mal aimés, rejetés et de nous mettre à douter de tout.

Et si le temps qui nous est imparti avant la moisson, c’est-à-dire avant de voir le résultat de nos actes, de nos relations, de nos démarches auprès des autres, … nous en profitions pour en faire un temps de prière avec le Seigneur, un temps de réflexion, un temps de retraite (les vacances approchent) pour approfondir ce qui nous fait vivre, ce qui nous fait grandir, ce qui nous fait pousser dans l’attente de la moisson.

Nous saurons donner du temps pour l’autre que si nous savons prendre du temps pour nous-mêmes.

Sachons aussi accepter la moisson telle qu’elle se présente.

La graine que l’on sème est ce qu’elle est, le temps donné à l’autre dans l’écoute et dans l’annonce de la Parole est ce qu’il est.

Lorsque nous jetons du grain dans le champ, il faut de la patience et de l’espérance car il y a de bonnes années, il y en a de moins bonnes.

Parfois, on est déçu par la récolte, parfois c’est une année exceptionnelle. Sachons rendre grâce dans les deux cas et remercier le Seigneur.

A quoi pouvons-nous comparer le règne de Dieu ? Par quelle parabole allons-nous le représenter ?

Ce n’est pas facile, et Jésus aimerait bien nous donner une explication simple.

Eh bien, le règne de Dieu est comme une graine de moutarde. C’est tout petit, mais quand la graine grandit, elle dépasse les autres plantes et elle est un refuge pour les oiseaux du ciel.

Ceci, pour nous montrer que Dieu aime ce qui est petit, humble, ce qui n’est pas clinquant, avec toujours cette idée que le temps est nécessaire pour arriver à maturité.

Il en est ainsi de Jésus, qui est né sans faire de bruit, qui a grandi d’abord à l’ombre de Marie et de Joseph, a pris du temps pour mener à bien le projet que son Père avait sur lui, puis a souffert sa passion, est mort et est ressuscité.

Il nous rassemble aujourd’hui auprès de lui, dans son Eglise qui a pris toute sa maturité en recevant l’Esprit le jour de la Pentecôte. L’Eglise auprès de laquelle nous pouvons en confiance nous reposer et espérer.

Cette petite graine de moutarde, c’est aussi le chrétien qui se sent sans doute impuissant devant le monde qui l’entoure, la pauvreté, l’indifférence, … mais qui va faire grandir sa foi et sa vie spirituelle.

Il pourra alors être un appui, une branche, sur laquelle on viendra se reposer. Il sera un frère, un ami qui saura écouter, partager son temps, son expérience, ses compétences, son argent, sa fraternité, sa prière, sa foi.

Jésus se servait de paraboles, mais il prenait aussi du temps avec ses disciples pour aller plus loin dans l’explication.

Car la foi n’est pas une science exacte : chapitre un, paragraphe deux, …

Non, c’est une relation avec le Christ, avec son Père, avec l’Esprit qui les anime.

Jésus nous demande d’avancer vers lui en confiance et en espérance. Le temps indispensable pour cela doit nous permettre d’approfondir notre relation d’amour avec lui.

Apprenons à nous nourrir de la Parole en accueillant les dons que Dieu nous donne.

Nous grandirons alors comme un palmier, nous pousserons comme le cèdre du Liban planté dans les parvis du Seigneur, et nous grandirons dans la maison de notre Dieu (Ps 91).

Ainsi soit-il.

Jean-Paul Rousseau, diacre

11 juin 2012

homélie du 10 juin 2012-la messe et le cosmos


Homélie du jour de la fête-Dieu (Corpus Domini) - Année B

En méditant sur ces textes, il m’a été difficile de ne pas penser au livre de l’Apocalypse, et je vais vous expliquer pourquoi

Ce livre consiste essentiellement en une vision (étrange au premier abord, c’est le moins que l’on puisse dire), dont le style (apocalyptique) était très en vogue à l’époque de saint Jean. Au cours de ladite vision se déroule une liturgie et on peut même carrément dire une messe, mais cette messe se déroule sur le monde et même sur tout l’univers : c’est une messe cosmique !

Car Saint Jean avait l’expérience de la messe, tout comme nous, et il a visiblement pensé à la liturgie dans certains de ses passages.

1) Cela signifie deux choses, je crois : d’abord que même la plus simple des messes a une dimension cosmique, en ce sens qu’elle relie le cosmos tout entier à son créateur (on ne fait pas une « prière universelle » simplement parce que c’est marqué comme ça dans le rituel ! On porte vraiment, spirituellement, le monde et même le cosmos dans notre prière). C’est si vrai que, à la messe, nous n’apportons pas seulement nos personnes, mais aussi, du pain, du vin, de l’eau, des fleurs, de la musique, des chants, nos familles, nos pays … ça fait beaucoup de choses !!!

Et là, il faut donner une précision : les adeptes du New Age prononcent beaucoup ce mot « cosmique », mais ce qui est comique, plutôt que cosmique, c’est qu’ils ont ce mot à la bouche sans arrêt, alors que la réalité est inverse : dans les rites et les discours, tout est centré sur le petit groupe fermé ou sur le gourou ou la personne seule, de sorte que cela n’a plus rien de cosmique ; à l’inverse, les messes catholiques sont économes dans l’emploi de ce mot, mais portent une réalité réellement cosmique !

Ainsi, la plus simple et la plus petite des messes a, malgré ses apparences, des dimensions incalculables et démesurées, parce nous présentons à Dieu la louange de toute l’humanité et de toute la création, un peu comme lorsqu’une grand-mère prie pour toute sa famille, y compris les nourrissons qui ne savent pas encore prier, ou les adultes qui ont cessé de le faire. D’ailleurs, il y a pas mal de grands-mères dans des messes toutes simples, partout dans le monde.

2) cependant, il y a une deuxième chose : je vous ferais remarquer que, en ce moment-même, au décalage horaire près, le monde entier se prosterne devant l’Agneau de Dieu, partout en France et dans le monde, des chrétiens aujourd’hui réalisent la vision de Saint Jean !

A l’époque où il écrit, combien y avait-il de chrétiens ? Quelques milliers ? Saint Jean ignorait l’existence des Amériques et des Indes, il n’avait aucune idée du globe terrestre, il ne pouvait pas imaginer avec des moyens humains qu’il puisse y avoir des esquimaux ou des malgaches … aujourd’hui, nous savons que sa vision s’est réalisée !

Par ailleurs, nous avons tous plus ou moins le souvenir que ce livre de l’Apocalypse est rempli de scènes assez terrifiantes, de combats, la vie et la mort s’y entrechoquent assez durement …

Eh bien tout cela est vrai ! Quand quelqu’un est entre la vie et la mort, quand un père de famille lutte contre un cancer, quand une société envisage de se débarrasser des personnes trop dépendantes par le moyen de l’Euthanasie, quand une société se débarrasse déjà depuis un certain temps des enfants handicapés … n’est-ce pas violent et grave ? Ils sont nombreux, hélas, les exemples qui montrent le réalisme des visions de Saint Jean …

Cette réalité est offerte à Dieu durant l’offertoire : « tu es béni, Dieu de l’univers, toi qui nous donnes ce pain, fruit de la terre et du travail des hommes » ; nous n’offrons pas que du pain et du vin, c’est toute la création, avec ce que cela comporte de très beau et de très dur aussi parfois, afin que Dieu transforme non seulement le pain et le vin en corps et sang du christ, mais toute la création en une réalité transfigurée, restaurée, rétablie dans sa dignité.

Et puis, plus simplement, nous savons que nous sommes mortels, et nous nous tournons vers l’Agneau qui a été immolé sur la croix et qui est maintenant vivant, ressuscité et qui nous entraîne avec lui dans la vie éternelle …

En fait,  le livre de l’Apocalypse décrit assez bien le mystère de la venue du Christ dans la liturgie !

Les trois évangiles « synoptiques (saint Matthieu, saint Marc et saint Luc) » ont décrit de quelle manière et avec quels mots Jésus a institué l’Eucharistie –et c’est précieux ! Saint Jean, lui, montre le caractère mystérieux et grandiose de cet « exercice » familier qu’est la messe : avons-nous bien conscience que ce que nous célébrons maintenant est grandiose et mystérieux ?

Autrefois, une publicité pour une eau de toilette (Darling) mettait en scène des hommes qui bafouillaient pour décrire l’effet que faisait sur eux cette nouvelle eau de toilette portée par leurs femmes, pour conclure que « ce sont les hommes qui en parlent le mieux » … eh bien ce qui est vrai d’un parfum l’est encore bien plus de la Messe ! Il est vraiment difficile d’enfermer la messe dans des mots, même pour mieux la comprendre ; alors on raconte comment elle est née (Mt, Mc, Lc), et puis on bafouille, tout en sentant que quelque chose de très grand est en train de se passer (Jn).

La prière eucharistique (III) dit ceci : « C'est pourquoi nous te supplions de consacrer toi-même les offrandes que nous apportons. Sanctifie-les par ton Esprit pour qu'elles deviennent le corps et le sang de ton Fils, Jésus-Christ, notre Seigneur, qui nous a dit de célébrer ce mystère. »

Entrons dans le mystère !

P. Emmanuel d'Andigné

10 juin 2012

Homélie du 03 juin 2012-le Dieu des chrétiens est bien plus simple que d'autres !


Homélie de la fête de la Sainte Trinité - Année B

Aujourd’hui, c’est la fête des mères … Bonne fête, Mesdames ! J’ai une suggestion à vous faire, à tous : pourquoi ne diriez-vous pas un Je vous salue Marie pour votre maman, aujourd’hui ? En tous les cas, c’est le jour que nous avons fixé pour renouveler notre « consécration à Marie », consécration qui consiste en fait à renouveler les promesses de son baptême : il s’agit de se consacrer à Dieu, bien sûr, mais en même temps de confier toute l’entreprise à la Vierge Marie.

Et puisque nous fêtons la Sainte-Trinité, je voudrais mentionner un détail sur la façon dont Saint Louis-Marie Grignon de Montfort disait son chapelet : il commençait –comme il se doit- par trois « je vous salue Marie », mais il ajoutait « Fille bien-aimée du Père » au premier, « Mère bien-aimée du Fils » au second et « Epouse fidèle du Saint-Esprit »au troisième, tant il est évident qu’elle est certainement le meilleur  « professeur de Trinité » qui soit ! Essayez d’aller à ses cours, ils ont lieu le jour ou la nuit, selon votre convenance, et vous en saurez long sur le sujet en la fréquentant assidûment …

Nous fêtons la Sainte Trinité : il est beaucoup plus simple, selon moi, d’avoir affaire à un Dieu Trinitaire, que d’avoir affaire à un Dieu solitaire, « seulement » unique …

D’un point de vue strictement intellectuel, ça n’est pas le cas : 1+1+1 = 1, ça ne marche pas en principe. Mais je vous propose de considérer Dieu du point de vue de la révélation, ainsi que nous y invite l’oraison de ce jour (« Dieu notre Père, tu as envoyé dans le monde ta Parole de vérité et ton Esprit de sainteté pour révéler aux hommes ton admirable mystère ; donne-nous de professer la vraie foi en reconnaissant la gloire de l’éternelle Trinité, en adorant son Unité toute-puissante. »)

Imaginons, un instant, que nous soyons juifs ou musulmans : en apparence, c’est plus simple : il y a un seul Dieu, point à la ligne. Mais le problème reste entier : que veut dire ce mot, … « Dieu » ?

« Dieu », cela veut dire qu’il n’est pas humain, qu’il n’est pas animal, qu’il n’est pas végétal, qu’il n’est pas minéral, qu’il n’est pas sidéral … et c’est pourquoi nous l’appelons « Dieu », autrement dit : celui dont nous n’avons aucune expérience physique, le « totalement mystérieux » !

Le mot Dieu est un mot finalement « rapide » pour désigner quelqu’un qu’on ne peut pas connaître : comme il est inaccessible, on l’appelle Dieu … ce mot qui veut tout dire et qui ne dit rien.

Vous conviendrez avec moi que l’image d’un grand barbu est insuffisante : ce grand personnage est-il rigide ou       au contraire bonasse, selon notre éducation les uns ou les autres? Il n’est pas rigide, il est rigoureux … il n’est pas bonasse, il est bon ! Et c’est ainsi que la théologie procède volontiers par élimination (la théologie négative), avant de passer aux affirmations sur ce grand mystère.

La Trinité, donc, simplifie beaucoup notre approche de Dieu : je vous invite à vous réjouir de ce que Dieu s’est montré ainsi plus précis dans la révélation de lui-même.

Avant Jésus, Dieu n’avait pas de visage (d’où l’interdiction, dans le judaïsme, de représenter Dieu), maintenant il en a un …

En fait, on le savait plus ou moins : le livre de la Genèse (Beréshit pour les juifs) affirme que Dieu a créé l’homme à son image, ce qui veut bien dire qu’il y a une certaine forme de réciproque, et que Dieu ressemble à l’homme ! En voyant un être humain, on voit un reflet de Dieu (pensez-y regardez votre voisin …) : c’est la raison pour laquelle Saint Jean dit que l’amour de Dieu et l’amour du prochain ne sont que les deux faces de la même pièce, leur objet est finalement le même.

Depuis Jésus, nous connaissons Dieu beaucoup mieux !

Dans le judaïsme ancien, Dieu était déjà considéré comme « un Père pour Israël (Jr 31, 9) », mais cette « paternité » était analogique, assez lointaine. Jésus a enseigné (et saint Paul vient de le dire dans la deuxième lecture) que Dieu est un Papa, qu’on appelle en araméen « abba » (« papa », littéralement). Il y a en Dieu la tendresse que l’on trouve chez un vrai père.

Don du Fils, Don de l’Esprit … la deuxième et la troisième personne de la Sainte Trinité sont comparées par Saint Irénée comme « les deux mains du Père ». Regardons maintenant le don de l’Esprit.

Le rôle de l’Esprit est de révéler qui est Dieu, Père et Fils. Ne croyez-vous pas qu’il il vaut mieux que ce soit Dieu qui se présente lui-même, plutôt que de laisser quelqu’un d’autre le présenter ? C’est ce que fait l’Esprit, qui est Dieu.

D’Esprit à esprit, il communique à l’homme la connaissance et l’amour du Père et du Fils, qu’il enseigne d’autant mieux que c’est lui qui est en personne cet amour du Père et du Fils.

Et puis il précise encore les choses concernant l’union de l’humanité et de la divinité en Jésus : 1 Cor 12, 3 « personne n'est capable de dire : ‘Jésus est le Seigneur’ sans l'action de l'Esprit Saint. »

Même « Dieu tout-court » serait parfaitement inaccessible sans l’Esprit de Dieu …

Je voudrais bien terminer par ce avec quoi j’ai commencé l’année dernière : Dieu s’est révélé être Père, Fils et Saint-Esprit, c’est ainsi … et il est convenable de respecter cet état de fait, avec réalisme ; votre époux, vous êtes bien obligée, Madame, de le recevoir comme il est … votre épouse, vous êtes bien obligé, Monsieur, de la recevoir comme elle est … vos paroissiens, vous êtes bien obligé, Mon Père, de les recevoir comme ils sont … votre curé, vous êtes bien obligés, frères et sœurs, de les recevoir comme il est ! Ayons vis-à-vis de Dieu le même réalisme avec lequel on reçoit celui qui se présente à nous dans la vie courante.

Conclusion : il faut rendre grâce à Dieu d’avoir « précisé son identité » et le remercier de nous faire confiance pour le « présenter » aux hommes de ce temps ; contemporains à qui nous dirons la très belle dignité de chaque être humain, qui a pour vocation de ressembler à Dieu et qui a pour destination de reposer en Dieu, en vrai fils adoptifs.

Nous sommes bien heureux, nous sommes très heureux d’être chrétiens !

P. Emmanuel d'Andigné

08 juin 2012

Homélie du 27 mai 2012-les yeux fixés sur Jésus-Christ


Homélie du jour de la Pentecôte 2012 - Année B

Au cours de la Formation à l’Evangélisation, mercredi, j’ai prononcé une phrase trop rapidement, Dieu sait si pourtant elle est importante, et je voudrais m’attarder sur elle : « les yeux fixés sur Jésus-Christ »

Alors allons-y, fixons nos yeux sur Jésus, et demandons-nous comment nous allons pouvoir l’imiter et évangéliser comme lui ; c’est bien ce que semble indiquer Paul VI dans Evangelii Nuntiandi, lorsqu’il donne au chapitre deuxième le titre suivant : « du Christ évangélisateur à l’église évangélisatrice ».

Ce titre indique clairement, qu’il ne s’agit pas seulement d’une imitation, mais plutôt d’un prolongement : l’Eglise, c’est le Christ continué.

L’Evangile d’aujourd’hui est l’aboutissement de tout l’itinéraire de Jésus sur la terre, rien qu’en le regardant, nous savons comment évangéliser, dans les grandes lignes.

Bethléem : Jésus naît dans la pauvreté : il faut une certaine « pauvreté de moyens » dans l’évangélisation, de façon à ce que soit bien la puissance de Dieu qui soit à l’œuvre, et non la nôtre. Aux USA, on le sait bien, on ne peut pas devenir président si on est pauvre (il faut financer sa campagne) : pour l’évangélisation, c’est le contraire.

Nazareth : Jésus apprend une langue, une culture, un métier … Les missionnaires, on le sait, lorsqu’ils vont à l’autre bout du monde, apprennent eux aussi tout cela, c’est exactement la même démarche que celle du Fils de Dieu. Quant à nous, il nous faut être attentifs à la culture d’aujourd’hui en France, afin « d’apprendre la langue » de l’homme du XXIème siècle et lui annoncer l’Evangile de façon compréhensible pour lui. On peut prendre l’exemple de l’écologie : il est très prégnant aujourd’hui, il faut donc y être sensibles nous aussi, pourvu que l’on rattache clairement ce sujet de l’écologie au respect de la création et donc au respect du Créateur.

Au jour de son « baptême »,  Jésus « reçoit » l’Esprit Saint, pas au sens où nous le recevons nous –car il l’a toujours « eu », mais « pour nous, et pour notre Salut ». Nous avons reçu l’Esprit Saint au baptême, afin de pouvoir devenir missionnaires et « envoyés » comme Jésus.

Juste après son baptême, Jésus passe quarante jours au désert : il n’y pas d’évangélisation possible, au vrai sens de ce terme, sans la prière ; on peut même ajouter que la prière est ce qui distingue l’évangélisation du prosélytisme (celui-ci consiste à agrandir un groupe avec des moyens humains, pour faire du chiffre : l’évangélisation, elle, « fait les présentations » entre Dieu et la personne, puis se retire, en apprenant par le moyen de la prière à laisser Dieu agir)

La vie publique de Jésus commence par le choix des apôtres et les deux messages de Jésus : cela veut donc dire que celui-ci ne veut pas évangéliser sans l’Eglise et qu’il donne à l’Eglise le mandat de délivrer ces deux messages. Le « premier » message est celui de la vie : charité, bonté, tendresse, soin des pauvres. Le « deuxième » message consiste en la vérité dans la parole, quel qu’en soit le prix.

Lors de la semaine sainte –la première de toutes-, Jésus « abat son jeu » : il est venu combattre le péché et la mort ; cela veut dire que la question qui sous-tend à l’évangélisation, c’est le salut, il nous faut nous en souvenir toujours ! Il est vrai que si nous n’avons pas besoin d’être sauvés du péché et de la mort, alors l’évangélisation est inutile …

Nous en arrivons aux apparitions du ressuscité : celui-ci envoie formellement, en plus du baptême, l’Esprit Saint. Depuis ce jour, le sacrement de la confirmation est par excellence le sacrement de la mission.

Jn 20 mentionne deux personnages très différents, aux deux missions très différentes, et qui s’articulent toutes deux autour du ministère des apôtres, il s’agit de Marie-Madeleine et de Marie, mère de Jésus.

Marie-Madeleine –qu’on surnomme l’apôtre des Apôtres- a pour caractéristique de courir partout pour évangéliser ; en effet, on imagine qu’elle n’a pas réservé aux seuls apôtres l’annonce de sa rencontre avec le Christ vivant !

Quant à Marie, mère de Jésus, elle reste au cénacle, lieu de l’institution de l’Eucharistie, elle prie avec les apôtres, d’une façon plus évidemment « contemplative », dirait-on aujourd’hui …

Voilà les deux poumons de l’évangélisation : la prière discrète et silencieuse, l’élan missionnaire actif dans le monde, par la beauté de la vie et le témoignage de la rencontre de Jésus.

Pour aujourd’hui, c’est suffisant, mais on peut aller encore beaucoup plus précisément dans l’Evangile pour « fixer nos yeux sur Jésus-Christ », et résoudre des difficultés plus précises dans chaque situation : demandons à l’Esprit Saint de venir et de venir encore, pour nous éclairer à ce sujet et goûtons la présence indispensable de la Vierge Marie.

P. Emmanuel d'Andigné

02 juin 2012

Homélie du 20 mai 2012-l'amour et le sentiment

Homélie du 7ème dimanche de Pâques - Année B

Le temps pascal s’avance. Nous entrons dans la septième et dernière semaine de cette période qui ne cesse de célébrer la résurrection du Seigneur.


La liturgie de ce dimanche exprime la joie, la confiance en la présence du Christ dans son Eglise, malgré son départ apparent, son Ascension au Ciel : « Le Seigneur ne vous laisse pas orphelins, il reviendra vers vous, alors, votre cœur connaîtra la joie. » « Bénis le Seigneur, ô mon âme, n’oublie aucun de ses bienfaits. »

On peut voir dans les textes de ce jour comme une méditation sur les grands évènements fondamentaux pour notre foi.

Jésus demande à son Père de garder ses disciples dans la fidélité … pour qu’ils soient un comme eux-mêmes sont un.

Les Actes des Apôtres –la première lecture- nous rappelait le terrible égarement de celui qui s’est séparé des onze autres, Judas. Il avait pourtant reçu sa part du ministère des Apôtres. Puisqu’il n’a pas rempli sa mission, il a fallu qu’un autre prenne sa place, un autre qui a été témoin de la résurrection. C’est dans la prière que se fit le choix de celui qui comblerait le vide laissé par Judas.

Dans le passage de la lettre de Saint jean on compte huit mots qui ont pour racine le verbe « aimer » : « Mes bien-aimés, puisque Dieu nous a tant aimés, nous devons nous aussi nous aimer les uns les autres. » « Si nous nous aimons les uns les autres, Dieu demeure en nous et son amour atteint en nous la perfection. »

L’Apôtre Saint Jean redit de multiples façons ce qui est pour lui l’essentiel, ce qu’il a réalisé très profondément au contact du Sauveur. C’est dans cette lettre que l’on trouve ces trois mots si simples et qui disent tout : « Dieu est amour ».

Ce n’est pas tant une question d’affectivité ou de sentimentalité. Saint Jean insiste vigoureusement sur l’authenticité de cet amour.

Comment saurons-nous si nous aimons Dieu ? Se demande l’Apôtre. « Si nous gardons ses commandements. Celui qui dit ‘je le connais’, mais ne garde pas ses commandements, est un menteur, et la vérité n’est pas en lui. » « Mais celui qui garde sa parole, en lui, vraiment, l’amour de Dieu est accompli. »


Retenons un autre mot qui revient avec insistance dans la bouche de Dieu : la Vérité. « Mes disciples ne sont pas du monde … Père, consacre-les dans la vérité : ta parole est vérité. » Saint Jean reprendra cette affirmation : « si nous disons ‘nous sommes en communion avec Dieu’ tout en marchant dans les ténèbres, nous mentons et nous ne faisons pas la vérité. » « Si nous disons ‘nous n’avons pas de péché, nous nous égarons nous-mêmes et la vérité n’est pas en nous. »

« Celui qui prétend être dans la lumière tout en haïssant son frère est toujours dans les ténèbres … qui aime son frère demeure dans la lumière. »

Jésus prie son Père afin que ses disciples demeurent dans la fidélité, dans la vérité, dans la lumière et dans l’amour.

Quel est le fruit d’un tel comportement ? Jésus répond : « je parle ainsi en ce monde, pour qu’ils aient en eux ma joie et qu’ils en soient comblés. »

« Je ne demande pas –dit le Christ à son Père- que tu les retires du monde, mais que tu les gardes du mauvais. »

A quelques jours de la fête de la Pentecôte, écoutons cette parole du Seigneur Jésus : « Si vous demandez quelque chose à mon Père en invoquant mon nom, il vous le donnera. Jusqu’ici, vous n’avez rien demandé en invoquant mon nom ; demandez, et vous recevrez, ainsi, vous serez comblés de joie. »

Après l’Ascension, les Apôtres, tous, y compris Matthias, étaient d’un même cœur assidus à la prière, avec la Vierge Marie.

A leur exemple, demandons, plus spécialement au cours de cette semaine, à l’Esprit Saint de nous guider sur le chemin qui mène à la vraie joie.

Et chantons, avec le psaume de cette messe : « Bénis le Seigneur, ô mon âme, n’oublie aucun de ses bienfaits. Toutes les œuvres du Seigneur, bénissez-le, sur tout l’univers. » Amen

P. Jean Rouillard

homélie du 17 mai 2012-les vertus d'en-haut et les vertus d'en bas

Homélie du jour de l'Ascension 2012 - Année B


Il y a les vertus « d’en-bas » et les vertus « d’en-haut » … autrement dit les vertus « humaines » et les vertus théologales (Foi, Espérance et Charité). La vertu reine de l’ascension, c’est l’Espérance, c’est celle que nous cultivons particulièrement aujourd’hui.

A force de poser des actes bons, on finit par acquérir une vertu ; une vertu est quelque chose que l’on acquière, on ne naît pas vertueux : c’est bien pour cela qu’il faut éduquer les enfants, afin qu’ils deviennent vertueux.

Le code de la route est un exemple classique : au tout début, un enfant ne le respecte pas du tout, puis il le respecte sans le comprendre, puis il le respecte en l’apprenant comme une règle absolue et sans nuance, et parvenu à l’âge adulte, il s’arrête au feu en pensant à ceux qui vont dans l’autre sens et qu’il faut respecter tout autant qu’on veut l’être soi-même.

Les vertus « d’en-bas », les vertus humaines, ont quatre reines :  Prudence, Justice, Force Tempérance. Elles sont fondamentales et structurantes, et c’est pourquoi on les appelle « cardinales », comme les quatre points cardinaux, elles nous permettent de nous repérer dans le monde des vertus.

Exemple : la vertu de religion (qui est une vertu humaine !) est en fait une application à Dieu de la vertu de Justice, laquelle consiste à donner à chacun ce à quoi il a droit.

La religion cherche Dieu … mais ne trouve celui-ci que si Dieu se révèle et donne ses vertus « d’en-haut » !

Les vertus théologales ont pour fonction de nous adapter à Dieu, elles nous permettent de toucher Dieu. La Foi est un lien filial avec Dieu (et non seulement des convictions intellectuelle). L’Espérance consiste à habiter au ciel avec le cœur et l’intelligence, en attendant d’y être tout à fait. La Charité consiste à faire descendre l’amour de Dieu, la charité divine sur la terre (ne regardez pas au Ciel, disent les anges aux apôtres le jour de l’Ascension, la Charité a été répandu sur la terre, elle n’est pas restée au Ciel !)

La Foi est à la religion ce qu’est la monture aux verres dans une paire de lunettes : le plus important est la Foi (les verres), mais sans monture (sans la religion), les verres ne tiennent pas !

Lorsque nous disons notre chapelet (aujourd’hui, ce serait bien !!!), nous demandons en méditant sur Pâques (premier mystère joyeux) une augmentation de Foi, en méditant sur l’Ascension une plus grande Espérance, en méditant sur la Pentecôte une plus haute Charité.

Quant à l’Espérance, faisons-lui la part belle en citant Péguy :

Au commencement était l'espérance...
L'espérance est une toute petite fille.
La foi est celle qui tient bon dans les siècles des siècles.
La charité est celle qui se donne dans les siècles des siècles.

Mais ma petite espérance est celle
qui se lève tous les matins...
qui tous les matins nous donne le bonjour,
qui dit bonjour au pauvre et à l'orphelin...

La foi est un grand arbre et sous les ailes de cet arbre,
la charité abrite toutes les détresses du monde.

Et ma petite espérance n'est rien
que cette promesse de bourgeon,
qui s'annonce au fin commencement d'avril...
C'est lui qui a l'air de se nourrir de l'arbre...
et pourtant c'est de lui que tout vient au contraire.
Sans un bourgeon qui est une fois venu, l'arbre ne serait pas...

La foi ça ne m'étonne pas.
Ça n'est pas étonnant :
j'éclate tellement dans ma création
que pour ne pas me voir il faudrait
que ces pauvres gens fussent aveugles.

Mais l'espérance dit Dieu,
voilà ce qui m'étonne
Moi-même.
Ça c'est étonnant
Quelle ne faut-il pas que soit ma grâce
et la force de ma grâce pour que cette petite espérance,
vacillante au souffle du péché, tremblante à tous les vents ,
anxieuse au moindre souffle, soit aussi invariable,
se tienne aussi fidèle, aussi droite, aussi pure.

Ce qui m'étonne, dit Dieu, c'est l'espérance.
Et je n'en reviens pas.
Cette petite espérance qui n'a l'air de rien du tout.
Cette petite fille espérance.
Immortelle.
Car mes trois vertus, dit Dieu
Les trois vertus mes créatures
Mes filles mes enfants
Sont elles-mêmes comme mes autres créatures
De la race des hommes.
La Foi est une Épouse fidèle.
La Charité est une Mère.
Une mère ardente, pleine de coeur.
Ou une soeur aînée qui est comme une mère.
L'Espérance est une petite fille de rien du tout.
Qui est venue au monde le jour de Noël de l'année dernière.
Qui joue encore avec le bonhomme Janvier.

Amen

 P. Emmanuel d'Andigné

Homélies du 13 mai 2012-ceci est mon corps livré pour vous !


Homélies du 6ème dimanche du Temps ordinaire- Année B

Homélie pour les premiers communiants ( 11h)

Mes amis, vous avez un cœur, un corps et une intelligence … Jésus a dit « ceci est mon corps livré pour vous » ; il n’a pas dit « ceci est mon cœur livré pour vous » ou alors « ceci est mon intelligence livrée pour vous » ; cela signifie que c’est important de déplacer son corps à la messe, et non simplement son cœur ! Bien entendu, si vous êtes présents dans toutes vos dimensions, c’est l’idéal, et c’est ce que je vous souhaite !

Que veut dire "donnez du fruit et que votre fruit demeure" ?
Regardez ces graines dans le pot : elles sont une promesse de fleurs ; regardez maintenant ce bouquet splendide (merci à celles qui se cassent le dos chaque semaine pour fleurir l’église !) : il est la réalisation de cette promesse. Dans vos cœurs, aussi, trois graines ont été semées : la Foi, l’Espérance et la Charité : eh bien, le « bouquet magnifique », c’est l’Eglise, composée de fleurs épanouies, et qui sont rassemblées en plusieurs bouquets (les paroisses !). Vous êtes mille fois plus beaux et précieux que ces fleurs qui sont devant vous.

Pourquoi Jésus dit-il "qu'il n'y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ses amis" ?

Jésus n’a pas seulement dit cela … il l’a fait ! La croix, c’est la plus belle preuve d’amour de Jésus. La messe, vous le savez, est un sacrifice (« Ceci est mon corps livré pour vous » est une phrase qui indique clairement un  sacrifice). Le plus important est de comprendre qu’il nous aime. Une seule question : est-ce que nous nous l’aimons, nous ?

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Homélie des messes de 9h30 et 11h

Comment aimer quelqu’un qu’on n’a jamais vu ???

C’est une question légitime pour un non-croyant … mais une question qui peut s’avérer difficile pour nous ! De toutes façons, il est délicat et difficile de parler de soi et d’amour, n’est-ce pas …

La question est posée de façon irrévérencieuse dans le psaume 41 : « où est-il ton Dieu ? » disent les impies avec ironie. Mais la même question est posée de manière déférente dans la deuxième lecture d’aujourd’hui : « ce n'est pas nous qui avons aimé Dieu, c'est lui qui nous a aimés, et il a envoyé son Fils qui est la victime offerte pour nos péchés. » Et pareillement, Jn 15 : « Ce n'est pas vous qui m'avez choisi, c'est moi qui vous ai choisis et établis afin que vous partiez, que vous donniez du fruit, et que votre fruit demeure. »

Il est donc normal que nous n’éprouvions pas à priori une attirance amoureuse pour Dieu, semblable à celle que nous avons pu connaître dans l’amitié ou dans l’amour conjugal. Ce que Dieu nous dit aujourd’hui, c’est qu’il nous aime :
-          Nous le savons parce qu’il nous a créés (lui qui n’avait nul besoin de nous)
-          Nous le savons parce qu’il est mort pour nous sur la croix (il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ses amis)

Le chemin qui nous sépare de l’amour profond et joyeux pour Dieu connaît plusieurs étapes :
-          L’étape de la reconnaissance (nous célébrons « l’Eucharistie », comme on dit, c’est-à-dire l’action de grâce »).
-          L’étape de la fidélité (demeurez dans mon amour, dit Jésus) ; il s’agit de l’observance des commandements.
-          L’étape de la joie ; là, il s’agit essentiellement de la prière, mais aussi de la formation (lisez le texte de Benoît XVI sur le blog, il est splendide et résume tout l’enseignement du saint-Père sur ce sujet depuis cinq ans) ; en voici un extrait :

« Chers amis, pour terminer, je voudrais vous exhorter à être missionnaires de la joie. On ne peut pas être heureux si les autres ne le sont pas: la joie doit donc être partagée. Allez dire aux autres jeunes votre joie d’avoir trouvé ce trésor qui est Jésus lui-même. Nous ne pouvons pas garder pour nous la joie de la foi : pour qu’elle puisse demeurer en nous, nous devons la transmettre. »

P. Emmanuel d'Andigné