Homélie de la solennité de sainte Marie, mère de Dieu
Dimanche dernier, à la fin de la bénédiction Urbi et Orbi dans la salle paroissiale, j’évoquais avec un paroissien « l’Indulgence plénière » que le Pape a mentionnée juste avant sa bénédiction … et tandis que je lui disais « ce serait bien que je dise un mot sur l’Indulgence, à la paroisse », celui-ci m’a répondu, sans faire de phrase ( !) : « ah oui ? Le trafic des indulgences ?! ». Il a bien fait –je le remercie- de m’aider à me rendre compte que la mentalité catholique a désormais ce réflexe de disqualifier les Indulgences, simplement parce qu’il y a des abus (et c’est vrai) au cours de l’histoire de l’Eglise … quel dommage !
Les Indulgences sont un magnifique trésor, pourvu qu’on sache ce que c’est et qu’on s’en serve correctement.
Imaginez que j’aie volé à quelqu’un 500 euros : plein de remords, je vais finalement demander pardon, mais je ne peux pas rendre l’argent (j’ai tout dépensé en champagne pour le réveillon) ; je demande pardon, je reçois le pardon, imaginons que la personne en face me dise que ça va ainsi, et que je m’en sortirai en rendant un service en temps voulu.
Belle histoire d’une conversion, belle histoire d’un pardon donné, mais … drôle d’histoire de 500 euros perdus ! La justice exige que je « répare », que je paie ma dette, même si j’ai obtenu le pardon. Eh bien l’indulgence est au sacrement du pardon, ce qu’est le remboursement des 500 euros au pardon reçu !
Autrement dit : le péché a toujours une résonnance éternelle (dans le cœur de Dieu, car il est offensé) et une résonnance temporelle (dans le corps de l’Eglise, Eglise militante et souffrante, du moins).
L’indulgence est la remise de la peine temporelle du péché, tandis que le sacrement du pardon est la remise de la peine éternelle.
C’est le Concile Vatican II (en germe) et le pape Paul VI en 1967, exactement, qui ont fait entrer les Indulgences dans la modernité (j’en profite pour dire que Luther n’a pas l’apanage de la critique dudit « trafic des Indulgences », car dès 1215 –soient 302 ans avant Luther- le Concile de Latran IV mettait en garde les clercs contre les abus possibles dans la promulgation des Indulgences, sans compter la critique sévère qu’en fit le Concile de Trente, en 1563), voici comment :
Vatican II (Lumen Gentium 49 et 51) désigne clairement la réalité du Purgatoire, c’est-à-dire cette purification qui est nécessaire à celui qui est décédé et qui porte un poids qui n’est autre que « la peine temporelle » de ses péchés ; le concile insiste aussi beaucoup sur le lien qui unit tous les chrétiens, sur la terre et aux cieux.
Paul VI, en 1967, a écrit un document très court et très beau (Il est sur le blog – « Indulgentiarum doctrina », pour réexpliquer aux temps modernes cette doctrine très ancienne et qui n’est rien d’autre qu’un commentaire du « je crois en la communion des saints » …
En effet, Paul VI y rappelle la solidarité qui unit tous les membres de l’Eglise, dans le bien comme dans le mal, je cite :
« Dans le secret et la bonté du mystérieux dessein de Dieu, les hommes sont unis entre eux par une solidarité surnaturelle par laquelle le péché d’un seul nuit aussi aux autres, de même que la sainteté d’un seul profite également aux autres . C’est ainsi que les fidèles s’aident les uns les autres à parvenir à leur fin surnaturelle. » ID n° 4
C’est la raison pour laquelle nous faisons dire des messes pour les défunts (ainsi qu’en témoigne chaque semaine la feuille des intentions de messe) et c’est aussi la raison pour laquelle nous pouvons demander l’Indulgence pour un défunt …
Pour un défunt ou pour soi-même, voici comment cela fonctionne :
1) Il y a un acte dit « indulgencié » exemple : la bénédiction urbi et orbi ; autre exemple : une visite à l’église sainte-Bernadette le jour de la sainte-Bernadette ; encore un autre exemple : un chemin de croix …
2) Se confesser (car demander la remise de la peine temporelle sans demander la remise de l’autre peine n’a pas beaucoup de sens …)
3) Communier (vous savez, la communion des saints …)
4) Prier aux intentions du Saint-Père
Le Pape Paul VI a estimé et promulgué qu’on ne parlerait plus désormais que de deux
sortes d’Indulgence : l’Indulgence partielle et l’Indulgence plénière, dont les appellations parlent d’elles-mêmes …
Le soir de Noël, à 23h, j’ai eu la joie d’évoquer deux grandes figures de l’Eglise : le père Wresinsky (fondateur d’ATD quart-monde) et le Père Marie-Eugène de l’Enfant-Jésus (fondateur, quant à lui de l’Institut Notre-Dame de Vie) puisque désormais il est bien établi dans l’Eglise –je veux dire dans la mentalité catholique en général- qu’il faut que nous soyons solidaires des plus pauvres (ATD, bien sûr, mais aussi Secours Catholique, St Vincent de Paul, etc …), il nous reste à développer entre nous et autour de nous une solidarité spirituelle par les Indulgences et à alléger l’humanité d’un poids de péché ; ainsi rendrons-nous le monde plus paisible et plus joyeux par les mains de l’Eglise et grâce à Dieu ; notre solidarité pourra alors être désignée du très beau mot de « charité » !
P. Emmanuel d'Andigné
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