13 octobre 2008

Homélie du 12 octobre 2008

Homélie du 28ème dimanche du temps ordinaire - Année A
Il n’y a pas si longtemps (2 semaines), j’ai eu l’occasion de vous parler de ce reproche que Jésus fait à ceux qui, connaissant bien la religion juive, n’ont pas la simplicité et la foi profonde de le reconnaître comme Messie. Dans cette parabole, c’est encore le cas, il dit aux juifs : « vous êtes les premiers invités, vous étiez les premiers sur la liste des fils de Dieu … et vous avez trouvé mieux à faire que de venir au festin, au moment où le Messie est là ! ».

Mais cette fois-ci nous allons plus loin : même ceux qui viennent en dernier, autrement dit les non-juifs, les païens convertis au christianisme, se voient ajouter une exigence, « mettre le vêtement de noce » … on pense évidemment au baptême, et alors on se dit : « il suffit d’être baptisé, et on est accepté au ciel, puisque le festin dont parlait Isaïe et celui dont parle Jésus, c’est le ciel ».

Mais évidemment, cela paraît un peu facile, et le ton de la parabole nous montre d’ailleurs un Dieu piquant une colère, une sainte colère, une colère amoureuse, de sorte que l’entrée au ciel, le salut, n’est pas le fruit d’un automatisme un peu niais à la Jacques Martin (« tout le monde a gagné »), mais il s’agit de quelque chose qui suppose un effort.

Alors nous interrogeons saint Pierre, le premier Pape, à propos du baptême, et voici ce qu’il nous dit : « être baptisé, ce n’est pas être purifiés de souillure extérieures, mais s’engager envers Dieu avec une conscience pure ».

Il y a donc d’un côté la promesse d’un festin, l’invitation au festin d’amour de Dieu, et une invitation large (Mt 28,16) … et de l’autre une exigence « revêtir le vêtement de noce », c’est –à-dire changer de vêtement, quitter le vêtement de l’esprit du monde, revêtir le vêtement de « l’engagement envers Dieu avec une conscience droite ».

L’éducation chrétienne des enfants consiste donc en cela : annoncer un festin -l’amour- et rappeler une exigence –l’engagement. Selon les périodes de la vie, les moments de la vie familiale aussi, ou l’éducation qu’on a reçue, on a tendance à n’écouter que l’un des deux aspects, mais il faut tenir les deux, et les annoncer toujours en même temps, de la façon la plus équilibrée possible.

Les adolescents, on le sait, crient souvent leur grand besoin d’affection, de tendresse, mais repoussent tout aussi fréquemment les manifestations de tendresse de leurs parents … nous faisons pareil avec Dieu ! Nous n’aimons pas les exigences ou les reproches, mais nous en avons besoin et plus encore de nous entendre dire qu’il nous aime.

Une fois qu’on a mis en évidence cet équilibre entre l’amour et l’exigence, il est bon de débusquer une bonne vieille hérésie, celle de Marcion …

En lisant St Paul (vers 100 après JC), tout seul et trop vite, celui-ci croit s’apercevoir que le Dieu du Nouveau Testament est complètement différent du Dieu de l’Ancien Testament : le Dieu du Nouveau serait bon et aimable, le Dieu de l’Ancien serait colérique et vengeur (cela ne vous rappelle rien ? ) …

Il décide donc de rejeter l’Ancien Testament et de ne garder que le Nouveau, et encore ce qui n’est pas trop marqué par l’Ancien dans le Nouveau … il est arrivé ce qui devait arriver : il ne restait plus grand chose du Nouveau testament (truffé de citations de l’Ancien), et Marcion dû fonder une nouvelle église qui a disparu en peu de temps.

C’est très répandu aujourd’hui, n’est-ce pas, que de considérer l’Ancien Testament comme un repère de dureté et de violence et le Nouveau comme un jardin d’agrément où les oiseaux gazouillent…

En réalité, c’est bien le même Dieu, très amoureux de nous, du livre de la Genèse à celui de l’Apocalypse qui connaît des colères et a des exigences et nous déclare son amour à tout moment opportun.

Et je voudrais terminer en évoquant un autre moment de l’histoire, plus récent, et qui permettra à ces textes d’aujourd’hui d’avoir un véritable écho, une véritable action en nous. Sous la pression notamment du marxisme, et aussi parce que l’après-guerre a généré une frénésie de consommation et de confort matériel, on a progressivement dans l’Eglise Catholique mis de côté la préoccupation du Ciel, pour ne plus s’attacher qu’à un Salut sur la terre et on s’est lancé, généreusement, dans des œuvres à caractère social.

Dans ces textes, on le voit bien, le festin est spirituel, il emprunte des images très terre à terre, mais il est presque exclusivement spirituel. Et le pape Benoît XVI a rappelé récemment aux prêtres que l’Eglise doit se distinguer par sa connaissance experte des choses spirituelles, (et notamment dans l’art de la prière), d’autant plus que de nombreuses actions sociales sont maintenant relayées par les états eux-mêmes, et que nous devons répondre à la soif spirituelle qui étreint tout homme normalement constitué.

Et nous commencerons en lui disant : « tout ce que tu auras aimé sur la terre, pourvu que cela légitime et bon (la viande et le vin d’Isaïe !), tu en seras comblé au Ciel, car Dieu veut combler ses enfants et leur donner encore plus de bonheur dans le Ciel qu’ici-bas sur la terre »

« heureux les invités au repas du Seigneur » : la messe est l’anticipation du Ciel, c’est « le Ciel sur la terre », « c’est déjà demain » a dit une grand marque … demain commence aujourd’hui, demandons à la maîtresse de maison la Très Sainte Vierge Marie, de nous aider à mettre la table et à préparer le festin !

P. Emmanuel d'Andigné

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