18 octobre 2008

Homélie du 19 octobre 2008

Homélie du 29ème dimanche du temps ordinaire - Année A
L’année qui a suivi les JMJ de 1997, un groupe d’angevins (dont je fus) fut invité au Liban pour y séjourner une quinzaine de jours ; au cours de l’une des journées, un ermite rencontré dans la « Vallée Sainte » me déclarait : « la perfection de la vie chrétienne, c’est la vie monastique et la perfection de la vie monastique, c’est la vie érémitique » … autrement dit, prêtres diocésains, époux, célibataires dans le monde, ne peuvent prétendre à la perfection évangélique et donc à la sainteté !

Il avait raison sur au moins un point : celui qui veut être saint trouvera dans un monastère ou un ermitage les conditions en principe idéales pour parvenir à la sainteté. Mais on peut se poser une question : y a-t-il, dans l’histoire de l’Eglise, tant de saints moines et ermites que cela ?

Cependant, de toutes façons, depuis que Jean-Paul II a canonisé les époux Quattrocchi, le 21 octobre 2001, et parce que Benoît XVI a décidé de béatifier les époux Martin ensemble, lui aussi, en tant qu’époux chrétiens, et non en tant que l’un et l’autre saints séparément, il ne nous est plus permis de croire que la sainteté est réservé à une élite, moines, religieux, prêtres, consacrés en général ...

« Soyez saints », n’a cessé de dire Dieu à son peuple et après Dieu, les saints eux-mêmes au cours de 2000 ans de christianisme.

Il me semble que c’est Saint François de Sales qui ouvrit, au XVIIème siècle, la voie de la sainteté aux laïcs, je lui laisse la parole : « C’est une erreur, et même une hérésie, de vouloir bannir la vie dévote de la compagnie des soldats, de la boutique des artisans, de la cour des princes, du ménage des gens mariés (Introduction à la vie dévote) ».

Deux siècles plus tard, Sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus, la fille de Louis et Zélie Martin, confirme la doctrine de saint François de Sales, en insistant sur le fait que la grâce de Dieu s’épanouit de manière originale en chacun de nous. Je lui laisse la parole : « Il a mis devant mes yeux le livre de la nature et j'ai compris que toutes les fleurs qu'Il a créées sont belles, que l'éclat de la rose et la blancheur du Lys n'enlèvent pas le parfum de la petite violette ou la simplicité ravissante de la pâquerette... J'ai compris que si toutes les petites fleurs voulaient être des roses, la nature perdrait sa parure printanière, les champs ne seraient plus émaillés de fleurettes...
Ainsi en est-il dans le monde des âmes qui est le jardin de Jésus. Il a voulu créer les grands saints qui peuvent être comparés aux Lys et aux roses mais il en a créé aussi de plus petits et ceux-ci doivent se contenter d'être des pâquerettes ou des violettes destinées à réjouir les regards du bon Dieu lorsqu'il les abaisse à ses pieds, la perfection consiste à faire sa volonté, à être ce qu'Il veut que nous soyons...
(Manuscrit A) ».

Un siècle plus tard, la doctrine de la sainteté des laïcs reçoit une nouvelle impulsion, avec Saint José-Maria Escriva de Balaguer, le fondateur de l’Opus Dei, c’est une véritable « démocratisation » de la sainteté : « Il importe de répéter sans cesse que Jésus ne s’est pas adressé à un groupe de privilégiés mais qu’Il est venu nous révéler l’amour universel de Dieu. Tous les hommes sont aimés de Dieu et Il attend de tous leur amour. De tous, quels que soient leurs conditions personnelles, leur position sociale, leur profession ou leur métier ». Tous, où qu’ils se trouvent, quel que soit leur état : des agents de bourse, des ouvriers d’usine, des programmateurs informaticiens, des vendeurs, des étudiants, des retraités, tous ! sont appelés à la sainteté non pas en dépit de leur vie dans le monde, mais précisément dans et à travers les situations et les activités qui tissent leur vie quotidienne (homélie « vers la sainteté ») ».

Terminons notre parcours avec Jean-Paul II, à qui nous devons la première canonisation d’un couple en tant que tel ; la doctrine s’enrichit donc d’une dimension nouvelle, puisque non seulement les laïcs sont appelés à la sainteté, mais c’est dans l’exercice même des vertus conjugales et familiales que les époux trouvent la voie de la sainteté ! Ecoutons-le : « la richesse de foi et d'amour des époux Luigi et Maria Beltrame Quattrocchi est une démonstration vivante de ce que le Concile Vatican II a affirmé à propos de l'appel de tous les fidèles à la sainteté, en spécifiant que les époux poursuivent cet objectif "propriam viam sequentes", "en suivant leur propre voie" (Lumen gentium, n. 41). Cette indication précise du Concile trouve aujourd'hui sa réalisation effective avec la première béatification d'un couple d'époux: leur fidélité à l'Evangile et l'héroïcité de leurs vertus ont été constatées à partir de leur vie comme époux et comme parents (homélie de la béatification de 2001) ».

Nous verrons bien ce que Benoît XVI dira à l’occasion de cette béatification de 2008, lui-même et à travers son légat, mais les époux chrétiens sont en tout état de cause aujourd’hui encouragés d’une manière très forte, l’Eglise veut leur montrer le prix qu’ils ont à ses yeux, que leur mission est belle et indispensable et que l’Esprit Saint est déposé avec force en eux par le sacrement du mariage. Je leur souhaite de développer cette grâce particulière, par exemple en renouvelant aujourd’hui leur « oui » initial, ou alors en se replongeant dans le rituel du mariage, les lectures de leur mariage …
P. Emmanuel d'Andigné

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