Homélie du 26ème dimanche du Temps Ordinaire - Année C
Je vous parlais, bien sûr, dimanche dernier, du voyage de Benoît XVI : allez voir sur votre blog préféré (à droite, il vous suffit d’un clic) ! Vous êtes professeurs, instituteurs, regardez le discours du Pape sur l’Education Catholique ; vous êtes un homme politique ou vous vous intéressez à la politique, lisez le discours de Westminster ; si vous souhaitez un regard profond et intelligent sur l’actualité, la conversation dans l’avion vous sera profitable !
Quant à la deuxième lecture, elle convient parfaitement aux serviteurs d’Alpha : en effet, elle contient un encouragement et un horizon. L’encouragement consiste en ce que, en écoutant cette parole, vous vous apercevez que vous mettez en application la Parole de Dieu « Continue à bien te battre pour la foi, et tu obtiendras la vie éternelle ; c'est à elle que tu as été appelé, c'est pour elle que tu as été capable d'une si belle affirmation de ta foi devant de nombreux témoins ». L’horizon nous apparaît alors clairement, c’est d’obtenir la vie éternelle ! En ouvrant le journal vendredi, j’ai appris avec étonnement que j’avais dit que je voulais -je cite- « donner une image conviviale de l’Eglise ». En réalité, il s’agit d’obtenir pour vous et pour vos auditeurs de la vie éternelle !!! Regardez ce que le Saint-Père a déclaré dans l’avion à ce sujet :
Question du journaliste : […]Peut-on faire quelque chose pour rendre l'Eglise, en tant qu'institution, encore plus crédible et attirante pour tous?
Réponse du Pape . : Je dirais qu'une Eglise qui cherche surtout à être attirante ferait déjà fausse route. Parce que l'Eglise ne travaille pas pour elle-même, elle ne travaille pas pour croître en nombre et ainsi augmenter son pouvoir. L'Eglise est au service d'un Autre, elle n’est pas utile pour elle-même, pour être un corps fort, mais pour rendre accessible l'annonce de Jésus Christ, les grandes vérités, les grandes forces d'amour, de réconciliation apparues à travers cette figure et qui viennent toujours de la présence de Jésus Christ. Dans ce sens, l'Eglise ne recherche pas à être attirante, mais elle doit être transparente pour Jésus Christ.
J’en viens maintenant à l’Evangile ou plutôt à l’ensemble cohérent constitué de première lecture, psaume et Evangile … nous continuons la lecture de l’Evangile selon saint Luc, chapitre 15 il y a deux semaines, début du chapitre 16 la semaine dernière, et t aujourd’hui la fin du seizième chapitre. Tout ce chapitre n’est que le commentaire de la phrase suivante : « Vous ne pouvez pas servir Dieu et l’Argent."
Amos était notre instructeur dimanche dernier, il le demeure aujourd’hui, vous l’avez entendu : il stigmatise les « vautrés » !!!
Pour ma part :
1) je me contente de faire résonner cette parole dans l’église pour qu’elle puisse avoir son efficacité aujourd’hui, le cas échéant
2) mais je me garderais bien de juger les apparences, et je vous invite à faire de même, car il est probable que, discrètement, sans faire sonner de la trompette, un certain nombre d’entre nous servent les plus pauvres et constatent avec plaisir qu’ils mettent en application la parole de Dieu, et se sentent donc encouragés par ces mots.
L’Evangile, donc, nous offre une parabole, les choses sont bien tranchées, trop bien tranchées, pas comme dans la vie … Jésus durcit le trait pour provoquer une réaction, pour faire peur, pour réveiller notre conscience endormie. Il cherche clairement la conversion (comme Amos) et d’ailleurs le mot est prononcé …
Comme dans les fables de La Fontaine et comme souvent dans l’Evangile, la clé se trouve à la fin : « quelqu’un aura beau ressusciter d’entre les morts, ils ne seront pas convaincus ». Autrement dit, c’est -encore une fois- la mort et la résurrection de Jésus qui est la clé de la compréhension de la parabole. Une fois qu’on a la clé, il suffit d’entrer dans la maison …
Et donc, la première information, c’est que, si les chrétiens doivent servir les pauvres, et faire le bien en général, c’est pour obtenir la vie éternelle, ça n’est pas simplement une affaire de bons sentiments …Il ne faudrait pas que la question de la pauvreté occulte le grand sujet de l’Evangile : le Salut, le Ciel, le Paradis, promis à ceux qui aiment leurs prochains et Dieu. Etant bien entendu que celui qui prétend aimer Dieu sans aimer son prochain et surtout les pauvres révèle en fait qu’il s’aime surtout lui-même au prétexte de Dieu, car amour de Dieu et amour du prochain sont les deux faces d’une même réalité.
Jésus est venu d’abord pour nous ouvrir le Ciel. L’Eglise Catholique aujourd’hui doit parler du Ciel, ouvrir le Ciel à ceux qui regardent la terre et qui n’y voient que leurs pieds. Sommes-nous préoccupés du Ciel ? C’est une bonne question …
Cela dit, je crois que le principal défaut de cet homme riche de la parabole est d’avoir su, mais de n’avoir rien fait. Il entendait parler des pauvres, mais il n’écoutait pas ; autrement dit, il n’écoutait qu’avec ses oreilles, pas avec son cœur.
Et nous-mêmes, quand nous entendons Dieu parler au moment de la liturgie de la Parole , nous l’entendons, mais l’écoutons-nous ?
Souvent, quand il y a des disputes, on demande à l’autre : « tu m’écoutes quand je te parle ? » . Dieu nous pose la même question aujourd’hui : « tu m’écoutes quand je te parle ? »
« j’écoute, que dira le Seigneur Dieu » ; « aujourd’hui, écouterez-vous sa parole, n’endurcissez pas votre cœur », disent les psaumes …
Aujourd’hui, on fait, et c’est très bien, des « formations à l’écoute ». Quand on y pense, c’est curieux … n’est-ce pas pourtant très simple et très évident d’écouter quelqu’un ??? Nous pourrions demander aujourd’hui à Dieu qu’il nous débouche les oreilles, les oreilles du cœur pour Lui et pour les autres.
Je termine avec un témoignage qui je crois illustre un autre grand problème soulevé par cette parabole et qui serait le problème de la fixité des choses. J’ai connu à Jérusalem un dominicain dont l’apparence négligée me rebutait souvent, mais un jour, il prononça cette phrase extraordinaire « je ne me lasse jamais des personnes ». Il avait atteint un tel niveau d’humanité qu’il voyait à l’intérieur des personnes, et pas simplement à l’extérieur, superficiellement, avec cet « abîme » dont parle l’Evangile que nous mettons entre nous et les autres, dans un regard superficiel.
Le pire de tout, c’est de fixer les choses dans son esprit, comme par exemple : « les pauvres sont pauvres, c’est normal » ; « la société fonctionne comme ça, c’est ainsi, on ne peut rien y faire » … et de laisser se creuser un écart entre nous, en écart infranchissable déjà sur la terre entre les riches et les pauvres, de sorte qu’au Ciel l’écart demeure le même, mais dans un rapport inversé !
Demandons à Dieu la grâce d’un cœur blessé d’amour, d’un cœur encore chaud, qui ne se résout pas aux situations, mais veut transformer sa propre personne, et dans une certaine mesure le monde qui l’entoure.
P. Emmanuel d'Andigné
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