Homélie du 27ème dimanche du Temps ordinaire - Année B
Petite histoire de la
répudiation :
Entre 1900 et 1250 avant JC (pendant 600
ans !), un mari pouvait répudier sa femme du jour au lendemain,
« sans autre forme de procès », comme dirait Monsieur de la Fontaine.
1250 : avec Moïse, Israël fait un gros
progrès : on exige que soit rédigé un acte de répudiation (de la femme par
l’homme, bien sûr… pas le contraire !)
A l’époque du Christ, celui-ci supprime la
répudiation, purement et simplement, ce qui nous fait assez plaisir, d’autant
plus que Jésus conçoit intellectuellement la répudiation dans les deux sens, et
non pas seulement du côté masculin …
Commentaire de l’Evangile :
J’en ai fait l’expérience cette
semaine : il n’y a pas un évangile aujourd’hui, il y en a deux ! Le premier est difficile à avaler, à
notre époque, tant sont nombreux les cas que nous connaissons d’échec en
matière conjugale.
Or, la deuxième partie éclaire la première,
je vais donc commencer par la deuxième, si vous voulez bien patienter un peu …
Il y a un tout petit mot très important
dans la deuxième partie : « Amen. »
Amen est un mot qui signifie
« solidité », « inébranlable », « in déplaçable ». Amen
est un mot liturgique juif qui finalement veut dire : Dieu est la
« chose » la plus solide qui soit, le fondement absolu, le repère qui ne bougera jamais, la
seule chose qui soit absolument sûre.
On compare Dieu souvent à un rocher, ce qui
exprime la même réalité ; c’est la
raison pour laquelle Jésus dit qu’il faut bâtir sur le roc, et non sur le sable :
le roc est cette pierre solide et unique qui représente Dieu, le sable
représente les multiples dieux qui ne peuvent fournir une base solide à quoi
que ce soit.
Par ce simple mot, Jésus indique, juste
après avoir affirmé l’indissolubilité du mariage, qu’il faut reposer cette
union et cette indissolubilité sur Dieu, sans quoi, l’homme laissé à ses
propres forces est beaucoup plus fragile.
Conclusion : Dieu ne se contente pas
de donner des exigences, il donne surtout sa grâce, lui-même, pour conférer
persévérance et solidité aux époux. Cela veut dire que, en attendant de savoir
comment il faut faire - au plan individuel ou au plan ecclésial- quand le
mariage au vinaigre, il faut de toutes façons donner à la jeunesse et à ceux
qui sont ensemble dans la concorde et dans la paix l’enseignement de Jésus qui
leur dit : que votre roc soit Dieu, appuyez-vous sur Dieu, revenez à Dieu,
que Dieu soit lui-même la solidité et la paix de votre union, et non pas
simplement vos deux bons caractères, la chance ou l’absence de trop gros
problèmes dans votre famille.
« Amen »
indique aussi que les époux ont entre eux –c’est capital- un lien qui est le
même que celui qui unit le Père et le Fils dans la Trinité : c’est ce qui
explique la netteté du discours de Jésus ; le mariage a pour vocation de
signifier à sa manière la Trinité, à savoir la distinction des personnes et
l’unité indissoluble, l’amour, la fécondité …
La Trinité montre aux époux la beauté de ce
qu’ils sont : ils ressemblent spécialement à Dieu par leur communion, leur
différence et leur unité.
Mais il faut ajouter autre chose : on
ne peut pas lire cet Evangile seulement avec cet éclairage immédiat, il est
toujours profitable d’éclairer un passage par un autre passage, ainsi que les
Pères avaient coutume de procéder. Nous allons donc nous demander dans quel
autre passage de l’Evangile il est question d’adultère.
En Jean, 8,11, Jésus a prononcé cette
phrase si célèbre : « moi non
plus je ne te condamne pas », dit-il à la femme adultère. Cela
signifie que Jésus distingue fortement les principes, sur lesquels il se montre
intransigeant, pour notre bien, et les personnes, pour lesquelles il a une
infinie tendresse. Notons au passage que, à ceux qui se jugent impeccables, il
déclare : « que celui qui n’a
jamais péché lui jette la première pierre », rappelant aux époux
fidèles d’aujourd’hui qu’ils doivent purifier encore cet attachement qu’ils n’ont
pas sali gravement.
Jésus a dit aussi : « je ne suis pas venu pour juger le monde, mais
pour le sauver (Jn 12) ». Il a dit aussi « venez à moi, vous tous qui peinez … et je vous procurerai le repos (Mt
11) »
Jésus est ferme sur le principe, mais doux
avec les personnes : « Mt 11, 29 Prenez sur vous mon joug, devenez
mes disciples, car je suis doux et humble de cœur, et vous trouverez le repos. Oui,
mon joug est facile à porter, et mon fardeau, léger. »
Dans une église, celui qui a souffre ou a
souffert quant à l’amour ou quant à tout autre chose d’ailleurs trouve le repos
et le regard tendre et aimant du Christ. « Retrouve ton repos mon âme car Le Seigneur t'a fait du bien, Il a sauvé
mon âme de la mort gardé mes yeux des larmes et mes pieds du faux pas »
dit le psaume 114.
L’Eglise, aujourd’hui, ne fait que
continuer fidèlement à être la présence moderne de Jésus dans le monde … inébranlable
sur les principes, précise sur les circonstances du mariage -afin d’établir
s’il y a eu ou non mariage en cas d’échec- et mettant en place des structures
d’écoute et d’accompagnement dont les affiches ornent le fond des églises, mais
curieusement pas celui des mairies.
Cependant, les structures ne suffisent pas,
et rien ne remplacera les fantassins, je veux dire chaque chrétien, qui doit se
faire le proche de tous et spécialement de ceux qui ont eu à souffrir.
P. Emmanuel d'Andigné
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