FÊTE de L’ASSOMPTION
15 août 2011
Le 15 août est une date marquante pour tous les Français. Ce n’est pas le cas pour les Anglais, les Chinois, les Israéliens et bien d’autres. Pour eux, aujourd’hui est un lundi ordinaire. En France, ce jour est férié, chômé. Mais combien de Français savent pourquoi ? Que fête-t-on ? Qui fête-t-on ? Quel est le nom de cette fête ?
Si l’on questionnait les gens dans la rue, il est à craindre que l’on embarrasse une bonne proportion de personnes.
Et que diraient de nombreux catholiques pratiquants ?
Il est sans doute utile de rappeler l’essentiel, au moins pour rafraîchir la mémoire…
Cette foi en l’Assomption de la Vierge Marie s’est manifestée plus tôt parmi les Chrétiens d’Orient, qui préféraient parler de la « Dormition de la Vierge », que chez les catholiques de l’Occident.
Il semble que la date du 15 août ait été choisie en Orient par l’empereur Maurice, à la fin du 6ème siècle, pour commémorer l’inauguration d’une église dédiée à la Vierge montée au Ciel. Le 15 août fut longtemps le jour de la fête nationale en France et le roi Louis XIII a consacré le pays à Notre Dame.
Le Concordat conclu entre le Pape et Bonaparte en 1802 a mis le 15 août au nombre des quatre fêtes chômées. La séparation de l’Eglise et de l’Etat en 1905 n’a pas remis en cause cette loi.
C’est le 1er novembre 1950 que le Pape Pie XII a prononcé solennellement ces paroles : « Nous affirmons, nous déclarons et nous définissons comme un dogme divinement révélé que l’Immaculée Mère de Dieu, Marie toujours vierge, préservée par Dieu de toute atteinte de la faute originelle, ayant accompli le cours de sa vie terrestre, fut élevée en corps et en âme à la gloire du Ciel et exaltée par le Seigneur comme la Reine de l’univers, pour être ainsi plus entièrement conforme à son Fils, Seigneur des seigneurs, victorieux du péché et de la mort. »
La première Lecture, la page de l’Apocalypse relative au signe de la femme annonce avant tout le combat de l’Eglise contre les forces du mal. C’est en Marie que l’Eglise a remporté sa victoire essentielle sur le péché et sur la mort.
La lettre de saint Paul aux Corinthiens n’évoque pas le nom de Marie, mais le choix de ce texte est une allusion à Celle qui s’est élevée à la suite du premier ressuscité d’entre les morts. « C’est dans le Christ que tous revivront, mais chacun à son rang : en premier, le Christ… » « C’est lui en effet qui doit régner jusqu’au jour où il aura mis sous ses pieds tous ses ennemis. Et le dernier ami qu’il détruira, c’est la mort. »
Un texte du Concile traitant du rôle de Marie par rapport à l’Eglise et à toute l’humanité dit ceci : « Marie a apporté à l’œuvre du Sauveur une coopération absolument sans pareille par son obéissance, sa foi, son espérance, son ardente charité, pour que soit rendue aux âmes la vie surnaturelle. C’est pourquoi elle est devenue pour nous, dans l’ordre de la grâce, notre Mère. »
Aucune page de l’Evangile ne conviendrait mieux pour cette grande Fête que celle où s’expriment l’action de grâce d’Elisabeth et celle de Marie. « Tu es bénie entre toutes les femmes, s’exclame la future mère de Jean-Baptiste. L’enfant a tressailli d’allégresse au-dedans de moi. Heureuse celle qui a cru. »
Et la réponse de la Vierge est une louange enthousiaste : « Mon âme exalte le Seigneur, mon esprit exulte en Dieu mon Sauveur… Le Puissant fit pour moi des merveilles, Saint est son nom. »
Marie nous invite à nous réjouir avec elle, car l’amour du Seigneur « s’étend d’âge en âge sur ceux qui le craignent. » « Il se souvient de son amour… en faveur d’Abraham et de sa race à jamais. »
La Vierge « soutient l’espérance du peuple de Dieu encore en chemin, » dira la préface.
Que son intercession nous obtienne de parvenir avec elle à la gloire de la résurrection.
Amen.
Père Jean Rouillard
08 septembre 2011
02 septembre 2011
Homélie du 28 août 2011-retour des JMJ
Homélie du 22ème dimanche du Temps Ordinaire - Année A
En 1997, des conseillers de Jean-Paul II lui ont dit : « très Saint-Père, vous feriez mieux de ne pas aller en France aux JMJ, ça être un échec … en plus, il y a des manifestations qui se préparent contre vous et l’accueil risque d’être froid, il y aura sans doute peu de monde … ». vous connaissez la suite de l’histoire !!! « passe derrière moi, Satan, tes pensées ne sont pas celles de Dieu mais celles des hommes » …
Pareillement, en 2005, à la mort de Jean-Paul II, certains disaient : « Jean-Paul II est mort, les jmj sont mortes … » Eh bien le cadavre se porte à merveille, j’en suis témoin ! « Passe derrière moi, Satan, tes pensées ne sont pas celles de Dieu mais celles des hommes » …
La toute première prière de la messe d’aujourd’hui demandait : « Enracine en nos cœurs l’amour de ton nom
Lors de l’une des catéchèses des évêques, Mgr Barbarin nous a dit que le thème des jmj (« enracinés et fondés en Christ, affermis dans la foi ») lui faisait penser au premier de tous les psaumes :
Heureux est l’homme
qui n’entre pas au conseil des méchants,
qui ne suit pas le chemin des pécheurs,
ne siège pas avec ceux qui ricanent,
mais se plaît dans la loi du Seigneur
et murmure sa loi jour et nuit !
Il est comme un arbre
planté près du ruisseau,
qui donne du fruit en son temps,
et jamais son feuillage ne meurt
Il faut du temps pour qu’un arbre plante ses racines dans la terre, on souhaite à la jeunesse de ne pas se déraciner, juste après avoir pris racine en Dieu aux JMJ ; or nous savons bien, nous qui sommes plus âgés, que l’enracinement, en fait, prend toute une vie, avec l’arrachage des mauvaises herbes, toujours prêtes à repousser … et voilà pourquoi nous sommes tous responsables de l’enracinement de la jeunesse dans le Christ
Je vois pour cela deux moyens simples et efficaces, à la portée de chacun d’entre nous, même les enfants
Par la prière, d’abord, bien sûr, car c’est le premier et le plus grand service que nous avons à leur rendre : prier pour eux !
Mais nous avons aussi une belle arme qui est celle de l’interrogation : demandez-leur ce qu’ils ont vécu ! Les premières questions concerneront la foule, l’ambiance, l’épreuve du soleil ou de la pluie (et ce n’est pas négligeable, nous ne sommes pas des statues de marbre ou de bois, nous avons besoin de sensations).
Et puis on peut leur poser d’autres questions, plus profondes : as-tu appris quelque chose là-bas que tu ne connaissais pas avant de venir ? Ton regard sur l’Eglise, sur le Christ est-il le même ou a-t-il changé ?
Voici ce que Benoît XVI a dit à la fin de la messe dimanche dernier :
« Chers Jeunes, vous allez maintenant revenir chez vous. Vos amis chercheront à savoir ce qui a changé en vous après avoir été dans cette noble ville avec le Pape et des centaines de milliers de jeunes. Que leur répondrez-vous ? Je vous invite à leur donner un témoignage audacieux de la vie chrétienne, vous serez alors le ferment de nouveaux chrétiens, afin que le l’Eglise naisse avec vigueur dans leur cœur. J’ai beaucoup pensé, ces jours-ci, a continué le Pape, à ces jeunes qui attendent votre retour, transmettez-leur mon affection, en particulier aux plus défavorisés, ainsi qu’à vos familles, et aux communautés de vie chrétienne auxquelles vous appartenez »
Voilà qui est fait …
J’ai un vieux souvenir et un autre très récent, qui se rejoignent tous deux concernant ce type d’évènement : le premier souvenir remonte à 1989, le second à cet Eté.
A Compostelle, en 1989, peu de gens participaient aux jmj, mais tout le monde avait un avis dessus (…). Des observateurs frileux de ces jmj naissantes avaient dit : « les jeunes applaudissent le Pape lorsque son discours est clair, net et exigeant, mais ensuite, ils font le contraire de ce qu’il dit »
Et de même, j’ai rencontré la semaine dernière un adulte qui était là pendant toutes les jmj, et qui me disait : « quand j’interroge les jeunes, là, maintenant, eh bien, je m’aperçois que les choses ne sont pas très claires pour eux, qu’ils ont des doutes, etc … »
Je ne nie pas qu’il puisse y avoir un décalage entre l’enthousiasme et la réalité des actes, mais je fais simplement deux remarques :
La première, c’est que chacun de nous constate en lui-même ce décalage entre ce que nous voudrions être et ce que nous sommes en réalité, et c’est justement cet espace entre le voulu et le vécu que se trouve le dynamisme spirituel, et la jouissance d’avoir progressé quand on a grignoté un peu d’espace vers la perfection évangélique.
Notez que Blondel y voyait une preuve de l’existence de Dieu : en effet, l’homme a toujours une aspiration plus haute que la condition qui est la sienne, son désir grandit à l’infini, et c’est dans cet espace (il parle de « hiatus ») que la raison peut poser l’existence de Dieu
La seconde chose, c’est que l’on juge un arbre à ses fruits, comme dit Jésus et non quand il est en train de pousser. J’en veux pour preuve cette très juste déclaration du Cardinal Rylko qui s’est exprimé à la fin de la messe de clôture dimanche dernier devant ces 2 millions de jeunes, évoquant 25 années de jmj : « combien de vies transformées, combien de décisions de vocation, choisies et accomplies, combien de fruits de sainteté !… »
On ne juge pas les jmj sur le moment, ni en elles-mêmes, ni dans notre itinéraire personnel. Il ne faut rien juger sur le moment … il faut « cultiver son jardin », comme disait Candide, en remerciant Dieu pour les temps de grâce, les moments où il a donné de la « pluie » à notre terre assoiffée -notre âme- et entretenir les dons de Dieu.
Ainsi, nous pourrons gagner quelques mm de racine, aujourd’hui, et dimanche prochain, et ne pas craindre les moments de sécheresse, car « ils ne nous empêcheront pas de porter du fruit ».
P. Emmanuel d'Andigné
23 août 2011
Homélie
DIMANCHE 21 août 2011
« Que dites-vous ? Pour vous, qui suis-je ? » demande Jésus à ses disciples.
Cette question, Jésus la pose à chacun d’entre nous, aujourd’hui comme il y a vingt siècles.
L’Evangile nous détaille les multiples interrogations et les multiples réponses données par les contemporains du Christ.
Les parents de Jésus eux-mêmes s’étonnent de son comportement lorsqu’ils le retrouvent dans le temple discutant avec les docteurs de la loi. Ils ne comprirent pas cette parole : « Ne saviez-vous pas que je dois être chez mon Père ? »
Jean-Baptiste laisse entrevoir la haute dignité de celui qu’il vénère : « Il vient, celui qui est plus grand que moi… Je ne suis pas digne de délier la courroie de ses sandales. »
Pour les Apôtres, Jésus est celui qui appelle chacun, semblant le connaître d’avance… Il en impose, il parle avec autorité.
La Samaritaine, elle aussi, est très surprise : « Venez voir, dit-elle aux gens, un homme qui m’a dit tout ce que j’ai fait… Ne serait-il pas le Christ ? »
Jésus accomplit de nombreuses guérisons : le fils d’un officier royal à Capharnaüm, un paralytique à Jérusalem. Beaucoup de samaritains en viennent à dire : « Nous savons qu’il est vraiment le Sauveur du monde. »
Mais les Juifs reprochent à Jésus de guérir des malades et des infirmes le jour du sabbat. Lorsqu’il déclare au paralysé : « Mon fils, tes péchés sont pardonnés », scribes et pharisiens s’écrient : « Il blasphème. Qui peut pardonner les péchés sinon Dieu seul. »
Les habitants de Nazareth aussi se questionnent : « N’est-ce pas le fils du charpentier, le fils de Marie ? » »D’où lui viennent cette sagesse et cette capacité de faire des miracles ? »
Après la multiplication des pains et des poissons, beaucoup sont convaincus : « C’est vraiment lui le prophète qui doit venir dans le monde. » Quand Jésus a marché sur les eaux, et invité Pierre à en faire autant, ceux qui étaient dans la barque se prosternèrent en disant : « Vraiment tu es le Fils de Dieu ! »
Nicodème vient trouver Jésus, lui disant : « Tu es venu de la part de Dieu. »
Quant à Hérode, entendant raconter tant de merveilles, il déclare : « C’est Jean le Baptiste, que j’ai fait décapiter, qui est ressuscité ! »
Nous voyons à quel point les opinions sur Jésus sont diverses et contradictoires. Nous comprenons d’autant mieux qu’il ait demandé aux disciples : « Et vous, que dites-vous ? »
La réponse de Simon Pierre : « Tu es le Messie, le Fils du Dieu vivant ! » lui est inspirée par le Père qui est aux cieux.
Jésus lui-même se définira, se présentera à l’aide d’images simples et parlantes : « Je suis la lumière du monde – Je suis la vraie vigne – Je suis le bon Pasteur – Je suis le pain de Vie. C’est moi qui suis le pain vivant descendu du ciel. »
Et à l’Apôtre Thomas, Jésus ajoutera : « Je suis le chemin, la vérité et la vie. Personne ne va vers le Père sans passer par moi – et encore – Je suis la résurrection et la Vie. »
Il est bon d’énumérer les richesses insondables du cœur du Christ, mais il nous appartient de le faire régner en nous, car, comme le lui faisait dire Pilate, il est Roi.
Que son règne vienne ! C’est le but des Journées Mondiales de la jeunesse.
Les exhortations du pape Benoit XVI sont toutes orientées dans ce sens, comme celles de saint Jean Eudes, notre voisin normand que nous fêtions hier, et dont je cite ces quelques lignes :
« Glorifiez et portez Dieu dans votre corps, et que la vie de Jésus paraisse visiblement en vous. »
« Non seulement vous êtes au Fils de Dieu, mais vous devez être en Lui, comme les membres sont en leur chef. Tout ce qui est en vous doit être incorporé en lui et recevoir vie et conduite de lui. Il n’y a de véritable vie pour vous qu’en lui seul, qui est la très unique source de la vraie vie. »
Amen.
Père Jean Rouillard
Homélies
DIMANCHE 3 JUILLET 2011
Pour le début des vacances scolaires, les lectures conviennent assez bien. Elles ont un ton paisible, joyeux. « Exulte de toutes tes forces, fille de Sion ! Pousse des cris de joie, fille de Jérusalem ! »
Le Seigneur nous parle du repos : « Devenez mes disciples, car je suis doux et humble de cœur, et vous trouverez le repos. »
Jésus n’oublie pas pour autant ceux qui souffrent, les malades, les personnes dans le deuil, ceux qui ne peuvent pas prendre de vacances, ceux auxquels les vacances ajoutent un surcroît de travail et de fatigue. Mais on ne peut pas tout dire à la fois, et il ne faut pas isoler les textes les uns des autres. Ils ne se contredisent pas, ils se complètent.
Aujourd’hui, les paroles du prophète, de l’Apôtre et du Christ nous donnent de bonnes indications pour passer de bonnes vacances de chrétiens. Le prophète Zacharie nous annonce que le Messie sera un grand roi, sa domination s’étendra jusqu’au bout du pays. Mais il sera humble. Il ne viendra pas sur un carrosse doré. Il se contentera d’un âne, un âne tout jeune. Ne serait-ce pas une invitation pour nous, qui ne sommes pas des rois, à faire preuve de simplicité et d’humilité ? Nous avons tellement tendance à vouloir être les premiers, à nous vexer de tout ce qui pourrait nous abaisser… La valeur n’est pas dans les signes extérieurs, mais dans la qualité du cœur.
L’Apôtre saint Paul nous dit : « L’Esprit de Dieu habite en vous. » Et cet Esprit doit nous empêcher d’être dominés par la chair, par le corps. Vous les enfants, particulièrement, ne prenez pas prétexte de ce que les vacances sont un temps de repos pour laisser les autres travailler sans les aider, pour vous lever à n’importe quelle heure, pour manger ou boire n’importe quand, et n’accepter que ce qui vous plaît. Agir ainsi, ce serait ce que saint Paul appelle « les désordres de l’homme pécheur. » Veillez plutôt à mettre en ordre ce qui vous appartient. Sachez rendre service. Vos vacances seront heureuses si vous rendez heureuses les personnes qui vivent avec vous, à commencer par vos parents, frères et sœurs. Cela montrera que l’Esprit de Dieu habite en vous.
Dans l’Evangile, Jésus remercie son Père de ce que les tout-petits comprennent ce qui échappe aux sages et aux savants. Sachons apprécier les signes que nous donne la vie de chaque jour. Ces simples sourires des petits enfants, qui sont comme un reflet de l’amour que le Créateur a mis en eux.
Vous les parents, vous êtes témoins des gestes pleins d’affection de vos enfants vous offrant spontanément des fleurs des champs ou des dessins dont la qualité est affective plus qu’artistique.
« Venez à moi – dit Jésus- vous tous qui peinez sous le poids du fardeau et moi je vous procurerai du repos. » Nous le savons bien, il ne suffit pas de se tourner vers le Seigneur pour que les difficultés disparaissent, mais tout ce qui est accompli dans un esprit de foi et de confiance en Celui qui est notre Père devient moins lourd à porter.
Les textes de cette messe nous engagent à rendre grâce ; rendre grâce pour ce que l’Esprit-Saint réalise en nous lorsque nous cherchons à être fidèles à notre baptême.
« Donne à tes fidèles une joie sainte : tu les as tirés de l’esclavage du péché ; fais-leur connaître le bonheur impérissable », disions-nous dans la prière du début de la messe.
Avec le Psaume, exprimons notre reconnaissance à notre Père du ciel : « Béni sois-tu à jamais, Dieu de l’univers. » « Je louerai ton nom toujours et à jamais. » « Que tes œuvres, Seigneur, te rendent grâce et que tes fidèles te bénissent ! »
Que le soleil brille dans le ciel ou que la pluie donne vie à tout ce qui a besoin d’eau, sachons louer le Seigneur pour toutes les splendeurs de la nature. Et que soient bénies les vacances de tous ceux qui pourront en profiter. De toutes manières, le Seigneur donne à chacun et à chacune les grâces qui leur sont nécessaires en temps voulu.
Amen.
Père Jean Rouillard
24 juin 2011
Homélie du 19 juin 2011-la trinité n'est pas un problème !
Homélie de la fête de la très Sainte trinité - Année A
En parlant avec des collégiens l’autre jour j’ai pu m’apercevoir de l’ignorance presque totale de l’existence de deux formes dans le rite latin. Ils savaient qu’il existait deux traditions grosso modo dans le monde : la tradition occidentale (L’Ouest de l’Europe, en Amérique du Nord et du sud, en Afrique, en Océanie et dans la plus grande partie de l’Asie) et la tradition orientale (Russie, grèce Est de l’Europe, Moyen-Orient). Mais à l’intérieur du rite occidental (latin ou romain) il y a désormais deux formes reconnues : la forme ordinaire (que l’on pratique à Sainte Bernadette) et la forme extraordinaire (indûment surnommée Messe de Saint Pie V, mais ce n’est pas le sujet).
Et voici ce qu’écrivit Benoît XVI en 2007, et que nous pouvons mettre en application dès aujourd’hui et maintenant
les deux Formes d’usage du Rite Romain peuvent s’enrichir réciproquement: dans l’ancien Missel pourront être et devront être insérés les nouveaux saints, et quelques-unes des nouvelles préfaces. […] Dans la célébration de la Messe selon le Missel de Paul VI, pourra être manifestée de façon plus forte que cela ne l’a été souvent fait jusqu’à présent, cette sacralité qui attire de nombreuses personnes vers le rite ancien.
Et plutôt que de simplement appliquer la loi promulguée par le Saint-Père -ça, c’est le travail des spécialistes de la liturgie- je vous propose d’aller plus loin, avec le cœur, en nous laissant enrichir par la forme du rite que nous ne pratiquons pas. Il y a un bon exemple cette semaine … on pratique, dans la forme extraordinaire ce que l’on appelle « l’octave de la Pentecôte (comme nous le faisons à Pâques) : tous les jours, pendant une semaine, c’est la Pentecôte ! Aujourd’hui, dans leur calendrier, c’est la Trinité, dimanche prochain la Fête-Dieu … mais ensuite, il n’y a pas de temps ordinaire, il y le « 3ème » , le 4ème , le 5ème … « dimanche après la Pentecôte »
Par cette pratique, on comprend que tout ce qui se passe dans l’Eglise, tout ce qui s’est passé après l’évènement fondateur de la Pentecôte a été le fruit de l’action de l’Esprit de Dieu … ça n’est pas bête … je trouve ça même enrichissant, en particulier pour tous nos jeunes amis qui sont confirmés depuis peu ou qui vont bientôt être confirmés et qui pourraient se dire qu’après la confirmation, on reprend le train-train ordinaire et le temps fait son œuvre qui peut nous mener à l’oubli. Au contraire ! L’Esprit Saint continue d’agir, et aimerait bien qu’on collabore à son action
En tous les cas, que Dieu nous préserve de l’orgueil et de la naïveté qui consisterait à croire que notre façon de célébrer la liturgie est évidemment la bonne, et que l’autre façon serait évidemment la mauvaise …
Lorsque nous nous trouvons en face du mystère de la sainte Trinité, nous pouvons l’aborder de façon intellectuelle (c’est horriblement difficile !) ou alors de façon mystique (ce qui est beaucoup plus simple !!!). L’image me vient d’une montagne à deux versants, dont l’un est très abrupt et dangereux, et l’autre au contraire, à pente douce. Curieusement, en face du versant le plus compliqué qu’est l’approche intellectuelle, nous nous précipitons dans cette voie alors que l’autre se présente à nous, plus longue, plus simple, et plus sûre.
Je voudrais vous raconter un fait réel, survenu dans la vie d’un grand théologien, Hans urs von Balthazar : il ne s’agit pas une conversion mais plutôt de ce que l’on pourrait appeler une effusion de l’Esprit.
Alors qu’il marchait sur un chemin, il fut tout à coup saisi par le mystère de Dieu. Ce fut une illumination dont il n’a pas pu mesurer la durée, phénomène au cours duquel il a été touché et il précise qu’il fut touché –je cite- « par la gloire de Dieu »
Et toute sa vie, dit-il, n’a été que l’expression imparfaite, ligne après ligne, de cette expérience mystique. Et il définit ainsi la théologie : « la théologie est expression de l’impression produite dans l’âme par la Gloire de Dieu »
Vous voyez bien que cette définition ne s’applique pas simplement aux théologiens : vous êtes tous en contact avec la gloire de Dieu, surtout à la messe, mais aussi à chaque fois que vous priez, et votre vie peut devenir « l’expression … » »
Il est vrai que pour qu’on parle de théologie, il faut aussi un bagage philosophique, sans lequel la rigueur de pensée risque de faire défaut … On ne peut pas faire de la théologie sans avoir fait de la philosophie.
Un autre fait mérite d’être mentionné : il s’agit de la rencontre d’Adrienne von Speyr, mystique allemande d’origine protestante passée au catholicisme, dont Balthazar a dit que l’inspiration a été décisive dans son œuvre théologique … il se peut qu’on soit plus performant qu’un théologien sans avoir fait toutes ces études.
J’ai pour preuve un exemple récent : pendant une année, j’ai fait du catéchisme à des 5ème à partir des icônes, et aux deux-tiers de l’année, nous sommes partis au monastère de Martigné-Briand ; à la fin d’un entretien que Sœur marie eut avec les collégiens, elle s’émerveilla en déclarant : « vous êtres de vrais théologiens ! »Et en effet, j’ai pu constater leur finesse de lecture des icônes, simplement avec leur cœur et leur relation avec Dieu.
Il suffit de se mettre en présence de Dieu, par exemple, par un beau, un vrai, un lent signe de croix, et de se laisser irradier par le mystère même ; ou alors on peut contempler longuement une icône et se laisser instruire par le mystère même …
Année après année, la liturgie est aussi une aide indispensable, avec ses magnifiques prières, pesées et parfaites sur le plan doctrinal : elle nous donne les deux pôles de ce grand mystère (vous verrez dans la préface), à savoir l’Unité de Dieu (il y a un seul Dieu, un seul Seigneur, le christianisme est un monothéisme) et d’autre part la réalité de chacune des personnes, dont on peut dire des choses précises et adorer comme des personnes divines.
Puisque notre intelligence est discursive (elle fait des discours), eh bien faisons des discours sur Dieu, les uns après les autres, et approchons ainsi le mystère de la gloire, qui en fait touche notre être tout entier, avant que notre intelligence ne soit capable d’exprimer des choses.
Balthazar disait qu’il fallait faire de la « théologie à genoux » : il voulait dire par là ne pas en faire une discipline purement intellectuelle ; eh bien nous-mêmes, tombons à genoux devant le mystère de la Trinité, et il nous sera révélé. Amen
P. Emmanuel d'Andigné
Homélie du 12 juin 2011-les sept voiles de mon bateau
Homélie de la Pentecôte 2011- Année A
La Pentecôte est pour nous aujourd’hui un grand appel adressé à Dieu : viens, Esprit Saint ! Juste après la Pentecôte (Actes 2), saint Pierre fait un certain nombre de discours et il termine l’un d’eux de cette façon : « Quant à nous, nous sommes les témoins de tout cela, avec l'Esprit Saint, que Dieu a donné à ceux qui lui obéissent (Actes 5, 32). » Quand Saint Pierre prononce ces mots, il vient de recevoir l’Esprit Saint. Il est certain que le Saint Esprit agit en tous les hommes, faisant ce qu’il veut et ce qu’il peut, mais ce qui aussi certain, c’est que celui qui obéit à Dieu aura une destinée semblable à celle des Apôtres, ce qui ne sera pas le cas de ceux qui désobéissent à Dieu …
Cela signifie que notre grand appel à Dieu –viens, Esprit Saint !- ne pourra réellement avoir de l’effet, que si nous sommes humbles et obéissants. A ce sujet, nous avons tous besoin de conversion : il faut la demander à Dieu (le sacrement du pardon, à cet égard, joue un rôle important). D’ailleurs, dans la liturgie du baptême, on pratique un « exorcisme » et la « renonciation à Satan », avant l’effusion de l’Esprit qu’est le baptême … c’est bien le signe que l’Esprit « s’installe » durablement en quelqu’un qui a été purifié ou qui se purifie !
Depuis le 4ème siècle dans l’Eglise (grâce à Saint Ambroise), on a établi la doctrine des « sept dons » à partir de la prophétie d’Isaïe (chapitre 11), que voici -il s’agit du Messie- :
« Sur lui reposera l'esprit du Seigneur : esprit de sagesse et de discernement, esprit de conseil et de force, esprit de connaissance et de crainte du Seigneur, qui lui inspirera la crainte du Seigneur. »
Isaïe 11, dans l’hébreu (c’est souvent ce texte auquel vous avez accès) : mentionne deux fois la crainte de Dieu, tandis que la LXX et la vulgate (versions respectivement grecque et latine) dédoublent et interprètent la deuxième mention de la crainte comme « piété » : on a ici une nouvelle fois l’illustration du lien qu’il y a entre Ecriture et Tradition ; la source de la révélation se trouve dans l’Ecriture, mais nous avons besoin de la Tradition pour mieux saisir ce que Dieu nous donne. Dieu se révèle dans l’Ecriture la Tradition et le Magistère … nous recevons bien sept dons de l’Esprit.
Bien sûr, le chiffre 7 évoque la plénitude, la marque de Dieu, même si, dans le même temps, cette liste exprime aussi la profusion : Isaïe, dans ce mouvement d’inspiration qui le fait parler de l’Esprit, ne peut s’empêcher de faire une liste suffisamment longue pour exprimer la richesse du don.
Car on peut dire tranquillement que l’Esprit Saint donne sans doute encore beaucoup plus, mais en tous les cas, certainement et parfaitement -7- ces dons-là.
Dans le petit jeu de traduction entre l’hébreu, le grec et le latin, nous avons déjà la distinction entre crainte de Dieu et piété. La crainte que nous éprouvons en rencontrant la puissance et la majesté de Dieu mesure la distance entre Dieu et nous (Dieu n’est pas un copain, c’est Dieu, il est normal de tomber à genoux devant lui). Mais cette distance est comblée par la piété, qui est ce lien fervent et tendre entre Dieu et nous
Saint Thomas d’Aquin, au Moyen-Age, précisera que la piété concerne autant le prochain que Dieu : avoir de la piété pour Dieu sans avoir un minimum de piété (c'est-à-dire de crainte d’offenser, de respect, d’amour révérend) est incohérent.
A titre d’exemple, j’ai rencontré un jour une petite fille de deux ans et demie qui m’a demandé à faire sa première communion. Croyez-moi, elle avait parfaitement compris que Jésus était présent dans l’hostie consacrée –elle était prête intellectuellement-, mais ses parents et moi-même avons estimé devoir attendre, non pas à cause de son âge, mais surtout parce que du côté de la piété filiale et fraternelle, de nombreux progrès se faisaient encore attendre …
Je vous ai déjà parlé du don de Sagesse, dont le mot latin nous éclaire beaucoup -« sapientia » de sapor, la saveur, l’art de goûter-, qui consiste à savoir reconnaître le bon goût et le mauvais goût, le bien du mal, le vrai du faux …
C’est encore le latin qui nous éclaire pour le don d’intelligence : « intus » « legere » « lire à l’intérieur », signifie ne pas se fier aux apparences, ni en ce qui concerne Dieu, ni en ce qui concerne les hommes, mais au contraire comprendre des choses sur Dieu, comme si on lisait à l’intérieur de Lui.
Les comprendre et les savoir, cela va de pair : le don de science (scio, savoir) est inséparable du don d’intelligence.
Le don de conseil, lui, découle du don d’intelligence : il s’agit de savoir quoi faire au bon moment, après qu’on a compris …
Je voudrais vous faire remarquer que ce qu’il y a de plus intéressant dans le don de conseil est le singulier : Dieu nous donne Le conseil, autrement dit la grande direction, l’objectif réel, la volonté de Dieu, à l’intérieur de laquelle plusieurs voies sont bonnes. Des jeunes, par exemple, se demandent s’ils vont devenir prêtre, père de famille, religieux … il n’y a pas un grand livre là-haut qui l’a décidé pour toi, pose-toi la question suivante, plutôt : moi qui ferai de ma vie ce que Dieu veut -c’est-à-dire une page d’Evangile-, quelle est la meilleure voie pour moi et pour les autres, au regard de ce que Dieu m’a donné ?
Mais évidemment, une fois identifié le bien, une fois le bien compris et aimé, et désiré, sans la force que Dieu communique, comment le réaliser ? Dieu nous la donne comme pour couronner ses efforts et les nôtres …
Cependant, une fois faites ces distinctions, empressons-nous d’unir tous les dons de Dieu qui sont en effet distincts les uns des autres, parce que notre être est complexe et que Dieu s’adapte à la complexité de notre constitution intérieure : tous ces dons ne sont en fait qu’un seul don, un seul « effort » : « sois marqué de l’Esprit Saint, le don de Dieu », dit le rituel de la confirmation.
L’autre jour, une collégienne est venue me voir pour me faire part de son problème : on lui avait dit d’écrire une lettre à l’Evêque, au cours de laquelle elle devait dire quel don en particulier elle voulait recevoir ; or, elle hésitait, me disait-elle, entre deux dons. Je lui ai alors conseillé de demander les deux dans la lettre et que de toutes façons, Dieu lui donnerait les sept !
Pourquoi ne pas en faire autant, nous qui sommes déjà confirmés ? Pourquoi cela serait-il réservé aux futurs confirmands ? Je vous encourage à le faire aujourd’hui et peut-être même maintenant …
Bonus : prière de saint Alphonse-Marie de Liguori, pour demander l’Esprit et ses dons.
Esprit Saint, divin Consolateur, je vous adore comme mon Dieu véritable, ainsi que Dieu le Père et Dieu le Fils. Je vous bénis et je m'unis aux bénédictions que vous recevez des Anges et des Saints.
Je vous donne mon cœur et je vous offre de vives actions de grâces pour tous les bienfaits que vous avez répandus et que vous ne cessez de répandre dans le monde.
Auteur de tous les dons surnaturels, qui avez comblé d'immenses faveurs l'âme de la bienheureuse Marie, Mère de Dieu, je vous prie de me visiter par votre grâce et par votre amour et de m'accorder :
le don de votre Crainte, afin qu'il me serve de frein pour ne jamais retomber dans mes fautes passées, dont je vous demande mille fois pardon,
le don de Piété, afin que je puisse à l'avenir vous servir avec plus de ferveur, suivre avec plus de promptitude vos saintes inspirations, observer plus exactement vos divins préceptes,
le don de Science, afin que je puisse bien connaître les choses de Dieu et, éclairé par vos saintes instructions, marcher sans jamais dévier dans la voie du salut éternel,
le don de Force, afin que je puisse surmonter courageusement toutes les attaques du démon et tous les dangers du monde qui s'opposent au salut de mon âme,
le don de Conseil, afin que je puisse bien choisir tout ce qui est le plus convenable à mon avancement spirituel, et découvrir tous les pièges et les ruses de l'esprit tentateur,
le don d'Intelligence, afin que je puisse bien entendre les divins mystères et, par la contemplation des choses célestes, détacher mes pensées et mes affections de toutes les vanités de ce misérable monde,
le don de Sagesse, afin que je puisse bien diriger toutes mes actions, en les rapportant à Dieu comme à ma fin dernière, afin qu'après L'avoir aimé et servi comme je le dois en cette vie, j'aie le bonheur d'aller le posséder éternellement en l'autre.
St Alphonse-Marie de Liguori
P. Emmanuel d'Andigné
Inscription à :
Articles (Atom)