09 mai 2008

Homélies

Homélie du 7ème dimanche de Pâques- 04 mai 2008
NB. à la messe de 11h, j'ai répondu à quelquers questions d'enfants, il n'y a pas de trace écrite. Cette homélie que voici a été prononcée aux deux autres messes du week-end
Un mot revient 9 fois dans les textes d’aujourd’hui, sous forme verbale ou sous forme nominale : c’est le mot de « Gloire (glorifier) » …

Jésus parlait l’araméen dans la vie courante, mais quand il parlait de la vie spirituelle, quand il citait l’Ecriture, il parlait hébreu. En hébreu, gloire se dit « kavod », et comme cette langue est très concrète, le mot « kavod » signifie originellement « poids »

La gloire de Dieu, c’est en quelque sorte le « poids » que Dieu pèse, et nous savons que le poids, surtout à l’époque de Jésus, mais aussi maintenant, détermine le prix de quelque chose …Or il se trouve que en grec, le terme qui désigne la gloire est « doxa », et ce mot signifie aussi, réputation, opinion …

Lorsque les évangiles se sont répandues dans le monde, il a fallu traduire en grec les paroles du Christ, et on a traduit « kavod » par « doxa » … grande catastrophe ! Le sens du mot « gloire » s’est mis à évoluer jusqu’à cette idée que nous avons aujourd’hui de réputation, de succès, de notoriété.

Du coup, lorsque l’on dit "Gloire à Dieu au plus haut des cieux", que dit-on ? Ou plutôt que pensons-nous ? Aujourd’hui, je vous propose donc de prononcer ce mot avec un sens plus profond que le sens populaire, un sens qui s’inspire de la langue biblique la plus ancienne, un sens moins abstrait et qui en plus convient mieux à Dieu !

Opinion sur Dieu, réputation de Dieu … on prendrait beaucoup de risques à prendre le mot grec comme référence … A cause de ce mot grec, les opinions vont et viennent et fragilisent la foi : de sorte que les chrétiens d’aujourd’hui, habitués à être ballottés d’une opinion à l’autre, par le règne des sondages, finissent par se demander s’il faut continuer à croire ce qu’on croyait avant…

A cause de ce mot grec, les non-chrétiens se disent que Dieu est une grand force (au lieu d’un Père plein de tendresse) et ils n’osent pas entrer dans une église ou dans un presbytère de peur d’être jugés ou écrasés par le regard de Dieu.

Prenons plutôt comme référence le mot hébreu, « Kavod », le « poids » de Dieu, là où Dieu met son « poids », ce à quoi il donne de l’importance, ce qui a du prix à ses yeux …Et c’est alors que nous nous tournons vers saint Jean, car c’est un mot qu’il affectionne particulièrement (il le prononce pas moins de 30 fois dans l’Evangile), je cite Jn 12

"Voici venue l'heure où doit être glorifié le Fils de l'homme. En vérité, en vérité, je vous le dis, si le grain de blé tombé en terre ne meurt pas, il demeure seul ; mais s'il meurt, il porte beaucoup de fruit. »

Il est très clair que le mot « gloire » dans l’Evangile selon saint Jean désigne surtout et d’abord la croix ! Ou pour dire la même chose autrement : c’est au moment où Jésus meurt sur la croix qu’il atteint le sommet de sa gloire.

Pourquoi ?
Eh bien parce que le poids de Dieu, la gloire de Dieu, c’est ce que pèse l’amour de Dieu et « il n’y pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime ». Aujourd’hui, en prononçant ce mot très souvent dans l’Evangile, au chapitre 17, juste avant sa passion et sa mort (chapitres 18 et 19), Jésus confirme quelle est la nature de la gloire qu’il recherche : cette gloire, ce poids d’amour qu’il a de tout éternité, qu’il partage avec le Père de toute éternité, il veut bien sûr le vivre sur la terre, mais surtout nous le partager ensuite …

Gloire à Dieu ! La gloire de Dieu, c’est l’Esprit-Saint, bien sûr, puisque l’Esprit-Saint, c’est l’amour qui unit le Père au Fils. Cette gloire a été répandue dans nos cœurs, de sorte que nous portons un motif de gloire, nous devons rechercher la gloire, celle qui vient de Dieu, afin de rendre Gloire à Dieu,et de reconnaître la gloire des autres.
Il faut être juste, cependant : il arrive que le mot hébreu et le mot grec se rejoignent et que celui qui aime, qui a beaucoup aimé (Mère Teresa, Jean-Paul II, Saint Vincent de Paul) reçoive une bonne réputation, de nombreuses bonnes opinions, bref une grande « doxa ». Et tant mieux ! Pourvu que les chrétiens se fassent connaître à l’amour qu’ils ont les uns pour les autres (« voyez comme ils s’aiment ») que l’Esprit Saint nous vienne en aide et que la Pentecôte nous donne de chercher la vraie gloire, amen !

P. Emmanuel d'Andigné

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