23 novembre 2008

Homélie du 23 novembre 2008

Homélie de la fête du Christ-Roi 2008 - fin de l'année liturgique A
Deux baptêmes auront eu lieu durant ce week-end dans la paroisse. Je voudrais avec vous m’attarder un peu sur une phrase du rituel du baptême, au moment de l’onction d’huile ; on dit au baptisé : « tu es membre du corps du Christ et tu participes à sa dignité de prêtre, de prophète et de roi ». Avouez que cela tombe bien pour la fête du Christ-Roi ! Que signifie donc être « prêtre, prophète et roi ? »

Dans l’Ancien Testament, prêtre, prophètes et rois avaient des fonctions particulières : le Prêtre offrait des sacrifices, il appartenait à une tribu particulière (les lévites), faisant le lien entre Dieu et les hommes par le culte, et plutôt dans un sens ascendant ; le Prophète, lui n’appartient pas à une tribu particulière, il peut être appelé en plein travail (on se souvient d’Amos, le bouvier), son rôle est d’apporter des messages de Dieu à son peuple (plutôt dans un sens descendant cette fois) pour éclairer sa route ; « prédire l’avenir (qui a été retenu par le sens populaire) » est une partie seulement de son travail, éventuellement, mais en réalité, il s’agit de dire la vérité sur le passé, le présent et l’avenir, au prix de la vindict populaire. Le Roi, enfin, a une fonction plus purement politique : « mener le peuple » ; la royauté n’a pas toujours existé en Israël, c’était par exemple le cas au moment de la venue du Christ.

A chaque fois que l’on devenait roi, prêtre ou prophète, on recevait une onction, mais attention ! Une vraie, une pleine corne de bovin qui dégoulinait littéralement sur la tête de celui qui était choisi…

Pour terminer ce bref parcours historique, il faut bien dire que le trois fonctions étaient d’une nature « politiques », politique et religion étant intimement liées l’une à l’autre et à vrai dire inséparables.

Lorsque Jésus s’est fait connaître, dans les trois années de sa vie publique, on a rapidement compris, dans le milieu juif, qu’il avait toutes les caractéristiques du roi, du prophète et du prêtre … et c’est du reste la raison pour laquelle il a été si fortement combattu ! Prêtre ? Impossible ! Il n’est pas de la tribu de Lévi. Roi ? Pas plus ! Il n’y pas de roi à cette époque. Prophète, à la rigueur, pourvu qu’il ne nous dérange pas trop … et puis il y a un problème de rite, il n’a jamais reçu d’onction d’huile !

« Mon royaume n’est pas de ce monde » : Jésus non seulement explique qu’il cumule les trois fonctions, mais que en plus, bien au-delà du seul Israël, il vient étendre ce qu’il appelle « le Royaume de Dieu », un royaume qui n’est pas de même nature que ceux qui existent déjà. Dieu devient lui-même Roi du monde, et son Fils devient prophète du monde et grand-prêtre du monde.

Et désormais, celui qui est baptisé devient dans le monde un autre Christ, non pas pour se prendre pour un roi, un grand-prêtre ou un prophète, mais pour -je cite-« participer à sa dignité de prêtre, de prophète et de roi » ; d’étendre le Royaume de Dieu avec les moyens que Jésus nous a indiqués dans l’Evangile. Quant à savoir si nous sommes dans la bonne voie, il nous demande : as-tu donné à boire à celui qui avait soif ? A manger à celui qui avait faim ? etc …

Je vous invite à remarquer que nulle part, Jésus ne dit : « au moment où tu as donné à manger à celui qui avait faim, l’as-tu fait avec cœur ou un peu rapidement ? » Nous avons beaucoup développé, en France, depuis le XVIIème siècle en particulier, la qualité intérieure des actes, au point de dire parfois : « ce n’est pas la peine de faire du bien lorsque mes dispositions intérieures sont mauvaises ». Je pense à ces discussions avec les jeunes qui me disent, « à quoi cela sert-il d’aller à la messe si on passe son temps à penser à autre chose, il vaut mieux ne pas y aller et y aller quand on est sûr d’avoir de bonnes dispositions ». Il faut aller à la messe tous les dimanches, sans aucune exception ! Et demander à Dieu de raviver en nous ces dispositions et en effet faire des efforts pour les améliorer… tout est une question d’équilibre !

Je vous invite fortement à lire ces quelques lignes extraites du Concile Vatican II, texte magnifique dont tout le monde a parlé et que personne-ou presque- n’a lu ; j’ai choisi un extrait de « Lumen Gentium », constitution dogmatique du Concile qui traite de l’Eglise, et plus précisément le court passage qui développe de quelle manière nous sommes « prêtres, prophètes et rois ». Voyez plutôt :

Lumen Gentium, n°34 et suivants : « Voulant poursuivre également, par le moyen des laïcs, son témoignage et son service, le Christ Jésus, prêtre suprême et éternel, leur apporte la vie par son Esprit, et les pousse inlassablement à réaliser tout bien et toute perfection.

A ceux qu'il s'unit intimement dans sa vie et dans sa mission, il accorde, en outre, une part dans sa charge sacerdotale pour l'exercice du culte spirituel en vue de la glorification de Dieu et du salut des hommes. C'est pourquoi les laïcs reçoivent, en vertu de leur consécration au Christ et de l'onction de l'Esprit-Saint, la vocation admirable et les moyens qui permettent à l'Esprit de produire en eux des fruits toujours plus abondants. En effet, toutes leurs activités, leurs prières et leurs entreprises apostoliques, leur vie conjugale et familiale, leurs labeurs quotidiens, leurs détentes d'esprit et de corps, s'ils sont vécus dans l'Esprit de Dieu, et même les épreuves de la vie, pourvu qu'elles soient patiemment supportées, tout cela devient "offrandes spirituelles, agréables à Dieu par Jésus-Christ" (1P 2,5) ; et dans la célébration eucharistique ces offrandes rejoignent l'oblation du Corps du Seigneur pour être offertes en toute piété au Père. C'est ainsi que les laïcs consacrent à Dieu le monde lui-même, rendant partout à Dieu dans la sainteté de leur vie un culte d'adoration.


Participation des laïcs à la fonction
prophétique
du Christ et au témoignage

35 Le Christ, grand prophète, qui par le témoignage de sa vie et la puissance de sa parole a proclamé le royaume du Père, accomplit sa fonction prophétique jusqu'à la pleine manifestation de la gloire, non seulement par la hiérarchie qui enseigne en son nom et avec son pouvoir, mais aussi par les laïcs dont il fait pour cela également des témoins en les pourvoyant du sens de la foi et de la grâce de la parole (cf. Ac 2,17-18 Ap 19,10), afin que brille dans la vie quotidienne, familiale et sociale, la force de l'Evangile. Ils se présentent comme les fils de la promesse, lorsque, fermes dans la foi et dans l'espérance, ils mettent à profit le moment présent (cf. Ep 5,16 Col 4,5), et attendent avec constance la gloire à venir (cf. Rm 8,25). Cette espérance ils ne doivent pas la cacher dans le secret de leur coeur, mais l'exprimer aussi à travers les structures de la vie du siècle par un effort continu de conversion, en luttant "contre les souverains de ce monde des ténèbres, contre les esprits du mal" (Ep 6,12).

Tout comme les sacrements de la loi nouvelle, où s'alimentent la vie et l'apostolat des fidèles, préfigurent le ciel nouveau et la nouvelle terre (cf. Ap 21,1), ainsi les laïcs deviennent les hérauts puissants de la foi en ce qu'on espère (cf. He 11,1) quand ils unissent, sans hésitation, à une vie animée par la foi la profession de cette même foi. Cette action évangélisatrice, c'est-à-dire cette annonce du Christ faite et par le témoignage de la vie et par la parole, prend un caractère spécifique et une particulière efficacité du fait qu'elle s'accomplit dans les conditions communes du siècle.

Dans cet ordre de fonctions apparaît la haute valeur de cet état de vie que sanctifie un sacrement spécial, à savoir la vie du mariage et de la famille.

36 Le Christ s'étant fait obéissant jusqu'à la mort et pour cela même ayant été exalté par le Père (cf. Ph 2,78-9), est entré dans la gloire de son royaume ; à lui, tout est soumis, en attendant que lui-même se soumette à son Père avec toute la création, afin que Dieu soit tout en tous (cf. 1Co 15,27-28). Ce pouvoir, il l'a communiqué à ses disciples pour qu'ils soient eux aussi établis dans la liberté royale, pour qu'ils arrachent au péché son empire en eux-mêmes par leur abnégation et la sainteté de leur vie (cf. Rm 6,12), bien mieux, pour que servant le Christ également dans les autres, ils puissent, dans l'humilité et la patience, conduire leurs frères jusqu'au Roi dont les serviteurs sont eux-mêmes des rois. En effet, le Seigneur désire étendre son règne également par les fidèles laïcs , son règne qui est règne de vérité et de vie, règne de sainteté et de grâce, règne de justice, d'amour et de paix(4) règne où la création elle-même sera affranchie de l'esclavage de la corruption pour connaître la liberté glorieuse des fils de Dieu (cf. Rm 8,21). Grande vraiment est la promesse, grand le commandement donné aux disciples: "Tout est à vous, mais vous êtes au Christ, et le Christ est à Dieu" (1Co 3,23).

Les fidèles doivent donc reconnaître la nature profonde de toute la création, sa valeur et sa finalité qui est la gloire de Dieu ; ils doivent, aussi à travers les travaux du siècle, s'aider mutuellement en vue d'une vie plus sainte, afin que le monde s'imprègne de l'Esprit du Christ et atteigne plus efficacement sa fin dans la justice, la charité et la paix. Dans l'accomplissement universel de ce devoir, les laïcs ont la première place. Par leur compétence dans les disciplines profanes et par leur activité que la grâce du Christ élève au-dedans, qu'ils s'appliquent de toutes leurs forces à obtenir que les biens créés soient cultivés dans l'intérêt d'absolument tous les hommes, selon les fins du Créateur et l'illumination de son Verbe, grâce au travail de l'homme, à la technique et à la culture dans la cité, que ces biens soient mieux distribués entre les hommes et qu'ils acheminent selon leur nature à un progrès universel dans la liberté humaine et chrétienne. Ainsi, par les membres de l'Eglise, le Christ éclairera de plus en plus la société humaine tout entière de sa lumière qui sauve.

Que les laïcs, en outre, unissant leurs forces, apportent aux institutions et aux conditions de vie dans le monde, quand elles provoquent au péché, les assainissements convenables, pour qu'elles deviennent toutes conformes aux règles de la justice et favorisent l'exercice des vertus au lieu d'y faire obstacle. En agissant ainsi, ils imprégneront de valeur morale la culture et les oeuvres humaines. Par là tout à la fois, le champ du monde se trouve mieux préparé pour accueillir la semence de la parole de Dieu, et les portes de l'Eglise s'ouvrent plus larges pour permettre au message de paix d'entrer dans le monde.

En raison de l'économie elle-même du salut, les fidèles doivent apprendre à distinguer avec soin entre les droits et les devoirs qui leur incombent en tant que membres de l'Eglise et ceux qui leur reviennent comme membres de la société humaine. Qu'ils s'efforcent d'accorder harmonieusement, les uns et les autres entre eux, se souvenant que la conscience chrétienne doit être leur guide en tous domaines temporels, car aucune activité humaine, fût-elle d'ordre temporel, ne peut être soustraite à l'empire de Dieu. Aux temps où nous sommes, il est extrêmement nécessaire que, dans la façon d'agir des fidèles, brillent à la fois très clairement et cette distinction et cette harmonie, pour que la mission de l'Eglise puisse répondre pleinement aux conditions particulières du monde d'aujourd'hui. De même, en effet, qu'il faut reconnaître à la cité terrestre légitimement appliquée aux soucis du siècle, le droit d'être régie par ses propres principes, de même, c'est à juste titre qu'est rejetée la doctrine néfaste qui prétend construire la société sans aucune considération pour la religion […].


Cependant, une fois que nous aurons lu ces belles pages, rien encore ne sera fait, l’Evangile nous donnera, de dimanche en dimanche, ou dans une lecture continue, notre feuille de route, pour étendre son règne, le plus concrètement possible.

Alpha, dans lequel nous allons nous lancer en janvier, c’est une manière d’étendre le Règne de Dieu, en trouvant au Seigneur de nouveaux sujets qui seront des rois … en faisant la diffusion de l’invitation à Alpha, nous pouvons, humblement, avec les moyens dont nous disposons, étendre ce Royaume ! « Jésus, étends ton règne, de l’univers sois roi ! »

Ainsi que l’art nous l’a montré souvent, et comme le dit le 5ème mystère glorieux du chapelet, Jésus a confié son Royaume à sa mère, en la couronnant. Cela signifie qu’elle a le rôle de donner l’exemple, et de nous aider à réaliser cette tâche, prions-là de nous y aider !

P. Emmanuel d'Andigné

15 novembre 2008

Homélie du 16 novembre 2008

Homélie du 33ème dimanche du Temps Ordinaire - Année "A"
Recommençons à faire un effort ! Tâchons, tout d’abord, avant de nous jeter sur la question des chiffres et des talents, de faire de cette évangile une lecture spirituelle. Après seulement, nous pourrons en faire une lecture morale.

Lecture spirituelle : « Jésus parlait à ses disciples de sa venue » … Nous sommes au chapitre 25 de l’Evangile selon saint Mathieu, qui traite du jugement dernier, et nous sommes parvenus aujourd’hui au 33ème dimanche du Temps Ordinaire (sur 34 !), qui évoque, liturgiquement la fin des temps.

Et quant à sa venue, Jésus lance un refrain : « entre dans la joie de ton maître », dit-il aux deux bons serviteurs, et il promet au mauvais des pleurs et grincements de dents …

Jésus nous donne là les deux définitions du Paradis et de l’Enfer. Le Paradis ? C’est « entrer dans la joie de son maître ». l’Enfer ? Etre en dehors de Dieu « dans les ténèbres » … La doctrine du purgatoire se situe du côté « de la joie du maître », mais avec une purification nécessaire, avant que la joie soit parfaite

Paradoxe d’aujourd’hui, c’est la peur de Dieu qui envoie le mauvais serviteur en Enfer, et on a cessé depuis quelques dizaines d’années de parler de ces choses d’en haut (paradis comme enfer !) parce que on pensait que cela était de nature à faire peur, peur aux gens et peur aux enfants …

Au contraire, la doctrine du Christ au sujet de la vie après la mort est une doctrine basée sur la confiance ! Les deux bons serviteurs ont eu confiance en leur maître, le mauvais dit « j’ai eu peur, je suis allé enfouir ton talent … ».

Un très beau chant nous dit : « En toi, j’ai mis ma confiance, ô Dieu très saint, toi seul est mon espérance et mon soutien, c’est pourquoi je ne crains rien, j’ai foi en toi, ô Dieu très saint ». Et peut-être bien que l’un des secrets pour être sauvé -avec l’amour comme base- pour accéder dans la joie du maître, c’est l’humilité, tandis que l’orgueil éloigne de Dieu, il fait son salut tout seul ballotté entre la présomption et le découragement … L’humilité consiste à recevoir de Dieu un talent, et à le faire fructifier

Le talent, historiquement correspond sans doute à peu près à une trentaine de kilos d’or ou d’argent : c’est une somme très importante ! Ce qui veut dire que même celui qui a n’a reçu qu’un talent a reçu, en fait, une grosse somme d’argent. Voilà qui est très important pour une lecture d’avantage « morale », qui nous permet de comprendre les questions de répartition et de chiffre …

Tout d’abord, une remarque : alors que je participai, avec des scouts de France, à un « Jamboree bleu (rassemblement des scouts et guides de 11-14 ans) », nous avons pris le temps de méditer avec un petit groupe sur cet Evangile d’aujourd’hui. Un de mes confrères se mit alors à leur faire un commentaire qui disait : "avez-vous remarqué que dans cette parabole, tout le monde a au moins un talent ? Un scout avec 0 talent, ça n’existe pas ». Bien entendu, nous nous sommes amusés à transposer cette phrase, ce refrain, à tous les niveaux : « un chef avec O talent, ça n’existe pas, un prêtre un avec O talent, ça n’existe pas, un évêque (car il y en avait un au Jamboree) avec O talent, ça n’existe pas …

Ainsi donc, et Evangile de la confiance en Dieu, c’est aussi un Evangile de la confiance en soi, d’abord parce que Dieu lui-même place en nous sa confiance (il confie des talents à ses serviteurs), mais aussi parce que les serviteurs de Dieu que nous sommes prennent conscience aujourd’hui qu’ils ont reçu beaucoup

Et ma question, la voici : êtes-vous tous ici persuadés que vous avez reçu beaucoup de Dieu ?

Mon expérience de la confession me fait douter un peu du fait que les chrétiens ont tous la certitude d’avoir reçu beaucoup, d’être aimables & aimés par Dieu … je demande à Dieu la grâce pour vous et pour moi d’être confirmés aujourd’hui par l’Evangile dans la certitude que Dieu a placé beaucoup de trésor en nous, et nous avons beaucoup de prix à ses yeux.

Cette confiance et cette tendresse de Dieu à notre égard se solde par une exigence qui est sanctionnée en effet par un destination éternelle de bonheur ou de malheur : amputer la foi chrétienne de cette doctrine du Christ (la doctrine du salut et de la perdition, du Paradis et de l’Enfer) serait donc non seulement un appauvrissement, mais aussi un affaiblissement de notre responsabilité, une forme subtile d’infantilisation, qui consiste à déposséder l’homme complètement de son salut, alors que Jésus insiste bien pour dire que nous préparons nous-mêmes notre salut, que nous avons la charge de nos talents que nous sommes pas des pantins.

Je vous invite à remarquer que c’est Dieu qui attribue les sommes dans la parabole, et non les hommes : le problème est que souvent, nous nous demandons si nous avons des talents reconnus par les hommes, au lieu de traiter cette affaire avec Dieu, selon les critères de Dieu. Relisez Mathieu 25 ! Vous saurez les critères de Dieu …

Après la consécration, à la messe, nous chantons l’Anamnèse : « gloire à toi qui était mort, gloire à toi qui es vivant, notre Sauveur et notre Dieu, viens, Seigneur Jésus ! » Nous attendons en effet le retour du Christ « son dernier avènement », qu’on appelle aussi la parousie. Vivons cette attente avec confiance, en nous-mêmes et en Dieu, avec le désir du Ciel, entrant déjà un peu « dans la joie du maître »
P. Emmanuel d'Andigné

Homélie du 09 novembre 2008

Homélie pour la fête de la dédicace de la basilique Saint-Jean-de-Latran

L’Eglise nous donne de célébrer aujourd’hui la fête de la dédicace de la basilique Saint-Jean-de-Latran. C’est la cathédrale du pape, la cathédrale de l’évêque de Rome, l’église où se trouve son siège ou sa cathèdre. Bien entendu, il ne s’agit pas pour nous de fêter l’anniversaire de l’inauguration de ce bâtiment. Alors pourquoi l’Eglise nous invite-t-elle à célébrer un tel évènement ?

L’Evangile de ce jour a sans doute un rapport avec cette fête, et il nous parle du Temple de Jérusalem, un lieu dans lequel Dieu est présent. Pourquoi le Temple de Jérusalem ?
C’est parce que, pour nous chrétiens, le Temple de Jérusalem est l’image de l’Eglise du Christ animée par l’Esprit de Dieu reçu le jour de la Pentecôte. Nous faisons donc mémoire aujourd’hui de cela en nous rappelant aussi que nous sommes chacun d’entre nous temple de l’Esprit Saint, de par notre baptême, et nous sommes une pierre vivante de cette Eglise.

Si un temple se construit avec des pierres, l’Eglise, elle, se construit avec des pierres vivantes. Dans la prière d’ouverture nous demandons à Dieu qui choisit des pierres vivantes pour bâtir la demeure éternelle de sa gloire, de nous donner en abondance les fruits de l’Esprit Saint, afin que son peuple ne cesse de progresser pour l’édification de la Jérusalem céleste.

Saint Paul nous dit que nous sommes la maison que Dieu construit. Et nous pouvons faire confiance à Dieu car les fondations sont solides : c’est son Fils, c’est le Christ lui-même, sa Parole et son enseignement. Et nous sommes invités à poursuivre la construction, mais par n’importe comment, en respectant les fondations. L’Eglise est temple de Dieu et l’Esprit Saint habite l’Eglise. De même nous les fidèles, nous les pierres vivantes, nous sommes temples de Dieu et l’Esprit habite en nous. Mais, nous sentons-nous responsables de cette édification ? Sommes-nous au rendez-vous ? Prenons-nous les bons moyens pour construire l’Eglise ?

Nous sommes l’Eglise, nous sommes les pierres vivantes dont nous parle la prière d’ouverture, ces fidèles unis au Christ, dans une même foi, recevant les mêmes sacrements, unis au Christ par le lien de la charité envers nos frères, envers les plus pauvres de nos frères.


Nous avons un temple à construire dont nous sommes les pierres vivantes.


Mais revenons à l’Evangile de Saint Jean. Jésus nous dit : « Ne faites pas de la maison de mon Père une maison de trafic ».
Le Temple de Jérusalem est vide. Mais il est plein de la présence de Dieu, et Dieu a besoin de ce vide pour entrer en relation avec nous. C’est lorsque le Temple est vide que Dieu nous parle. C’est pourquoi Jésus vide le Temple de tous ses commerces : la promotion de la semaine, on achète une colombe et la seconde à moitié prix, et pour ceux qui ont un plus gros budget un taureau ou une vache grasse payable en trois fois sans frais. Mais Dieu, on ne l’achète pas. Alors Jésus fait le vide. Le vide qui plaît à Dieu. Il en a besoin pour nous parler, pour nous rencontrer.
Et nous-mêmes, nous sommes temples de Dieu. Alors, qu’est-ce que nous allons mettre dehors pour laisser toute la place à Dieu, pour le prier dans le silence, pour qu’il puisse entrer en relation avec nous, pour l’aimer sans conditions, sans marchandage.
Laissons Dieu nous libérer, laissons-lui toute la place en nous-mêmes pour que nous puissions témoigner de sa présence dans notre vie.
Ne sommes-nous pas parfois tentés de construire l’Eglise à notre manière, en ne prenant que ce qui ne nous dérange pas, en modifiant les plans de Dieu et en nous appuyant que sur une partie des fondations, que sur une partie de l’enseignement du Christ. En retirant une partie des fondations, nous risquons de fragiliser l’édifice.
Laissons-nous au contraire modeler par l’Esprit, afin que notre pierre vivante s’inscrive bien dans le projet que Dieu a sur nous et qu’elle ne manque pas à l’édifice voulu par lui-même, afin que, par notre témoignage, nous soyons un signe visible de sa présence en nous-mêmes et parmi nous, et que notre vie ait un style chrétien, un style d’Eglise.
N’ayons pas peur du désir de nous sanctifier, d’être fidèles à notre Eglise et à son pasteur, l’évêque de Rome, afin que nous puissions chanter avec les saints les merveilles de Dieu. Ainsi soit-il.

Jean-Paul Rousseau, diacre

Homélie du 02 novembre 2008

Homélie pour la commémoration des fidèles défunts - Dimanche 02 novembre 2008
Lorsque, à l'improviste, on pose la question : « à la Toussaint, que fêtons-nous ? », la plupart des gens répondent : « c'est la fête des morts. » Réponse à la fois vraie et fausse, car ceux que l'on fête sont morts à la vie terrestre, mais vivants dans l'au-delà. « Quand ils nous ont quitté, disait le livre de la Sagesse, on les croyait anéantis, alors qu'ils sont dans la paix. Par leur espérance ils avaient déjà l'immortalité. Dieu les a mis à l’épreuve et les a reconnus dignes de lui. Au jour de sa visite, ils resplendiront, ils étincelleront comme un feu qui court à travers la paille. »
Le calendrier de 2008 a l’avantage de distinguer plus nettement le 1er et le 2 novembre, par deux jours fériés.
Le 1er novembre est la fête totalement joyeuse qui nous unit à toutes les personnes qui sont dans le bonheur du Ciel pour toujours. On les appelle tous : les saints et les saintes.
Le 2 novembre est la journée de commémoration de tous les fidèles défunts, c'est-à-dire la journée de prière pour tous ceux qui ont quitté cette terre, mais ne sont pas encore assez purifiés pour se présenter devant Dieu. Ils sont au Purgatoire. Voilà un mot qui peut paraître désuet à certains mais qui fait authentiquement partie de la foi de l'Eglise.
Je cite le catéchisme de l'Eglise Catholique, publié par Jean-Paul II : « ceux qui meurent dans la grâce et l'amitié de Dieu, mais imparfaitement purifiés, bien qu'assurés de leur salut éternel, souffrent après leur mort une purification, afin d'obtenir la sainteté nécessaire pour entrer dans la joie du ciel. L'Eglise appelle purgatoire cette purification finale des élus qui est tout à fait distincte du châtiment des damnés. L’Eglise a formulé la doctrine de la foi relative au Purgatoire surtout au concile de Florence (en 1439) et de Trente (en 1563).
Cet enseignement s’appuie aussi sur la pratique de la prière pour les défunts dont parle déjà la Sainte Ecriture. Dès les premiers temps, l'Eglise a honoré la mémoire des défunts et offert des suffrages en leur faveur, en particulier le sacrifice eucharistique, afin que, purifiés, ils puissent parvenir à la vision béatifique de Dieu. L'Eglise recommande aussi les aumônes, les indulgences et les oeuvres de pénitence en faveur des défunts »
Cela correspond précisément à ce que l'on appelle « la communion des saints », à laquelle nous disons croire lorsque nous récitons le « je crois en Dieu ». Cette «communion des saints » a de nombreux aspects, mais nous en retiendrons aujourd'hui ce qui concerne la communion avec les défunts. Et je cite encore le catéchisme : « nous croyons à la communion de tous les fidèles du Christ, de ceux qui sont pèlerins sur la terre, des défunts qui achèvent leur purification, des bienheureux du ciel, tous ensemble formant une seule Eglise, et nous croyons que dans cette communion l’amour miséricordieux de Dieu et de ses saints est toujours à l'écoute de nos prières. » Le texte dit encore : « notre prière pour les défunts peut non seulement les aider mais aussi rendre efficace leur intercession en notre faveur. »
Ce 2 novembre n'est donc pas tourné vers la nostalgie, la tristesse et les regrets. Il nous oriente vers l'espérance, au-delà de l'épreuve de la séparation. Saint Paul va jusqu'à dire : « j'estime qu'il n'y a pas de commune mesure entre les souffrances du temps présent et la gloire que Dieu va bientôt révéler en nous. »
Et Jésus, dans l'Évangile, engage ses disciples à rester vigilants : « heureux les serviteurs que le maître à son arrivée, trouvera en train de veiller. Il prendra la tenue de service, les fera passer à table et les servira à chacun son tour. »
Puissions-nous être de cela.
Et retenons le verset qui introduisait Évangile : « notre Sauveur Jésus-Christ a détruit la mort ; il a ouvert à tout croyant les portes de la vie, alléluia. »

P. Jean Rouillard

04 novembre 2008

Homélie de la Toussaint 2008

Homélie de la Toussaint - 1er novembre 2008

Heureux les pauvres de cœur : le Royaume des cieux est à eux !
Heureux les doux
Heureux ceux qui pleurent !
Heureux les miséricordieux
Heureux les cœurs purs
Heureux les artisans de paix
Heureux ceux qui sont persécutés pour la justice et à cause du Christ
Qui n’aspire pas à cette béatitude dont nous parle Jésus? Qui éprouve de la joie à être triste, malheureux ?
Et à côté voilà un autre décor que nous plante l’apocalypse de saint Jean « il cria aux quatre anges qui avaient reçu le pouvoir de dévaster la terre et la mer : «Ne dévastez pas la terre, ni la mer, ni les arbres, avant que nous ayons marqué du sceau le front des serviteurs de notre Dieu. ». La terre sera dévaster voilà une certitude sinon systématiquement du moins à la fin de la vie de tout un chacun car nul n’est immortel.
Dans un article de notre foi, nous disons : Je crois à la sainte Eglise catholique, à la communion des saints, à la rémission des péchés, à la résurrection de la chair, à la vie éternelle. L’article du crédo, et la certitude que les fronts des serviteurs de Dieu seront marqués du sceau vient dissiper nos peurs d’une fin certaine de toute chose. Après notre vie terrestre nous ressusciterons, mais déjà sur cette terre, nous communions à la vie des saints, des serviteurs de Dieu, dont les fronts ont été marqués du sceau. Il y a donc un autre monde qui est là, tout près de nous, séparé seulement par la notion de temps. Car ils sont dans le monde de l’Eternel. Le monde dans lequel nous vivons et le ciel ne sont autres qu’une pièce et son revers, elles ne portent pas toujours les mêmes écriteaux mais il n’y a pas une face sans l’autre. Il n'y a pas pour nous que du mal, de la souffrance ou de la mort. Aujourd'hui, nous est révélé l'endroit, le monde vu du côté de Dieu, vu d'en haut : un coin du ciel est déchiré... Et ce que nous serons est déjà apparu à travers la vie de tant de personnes qui sont parties avant nous ...Tout sera plus beau encore. Aucun regard humain ne peut voir ce que Dieu a préparé pour ses enfants, dit St Paul. Saint Jean dans son épitre nous dit dans la deuxième lecture, « nous sommes enfants de Dieu, mais ce que nous serons ne paraît pas encore clairement. »
L’image de l’apocalypse est forte et très beau à la fois. Le sang est la vie, celui de l’agneau arrose la graine de nos vies, la fait germer et porter du fruit pour sa moisson.
Heureux les pauvres de cœur : le Royaume des cieux est à eux !
Heureux les doux, ceux qui pleurent, ceux qui ont faim et soif de la justice…
Dieu nous appelle à la vie, la mort n’est qu’un passage, une condition pour accéder au revers de la pièce. Ce revers, c’est un monde sans deuil, ni pleur, composé d’une foule immense, composite, bigarrée. Toutes les langues et les cultures sont représentées, les couleurs aussi. Il y a de la joie au ciel, c’est d’ailleurs l’image de noce qui symbolise très souvent ce grand rendez-vous de l’épouse qu’est l’église avec l’époux. C’est une noce grandiose festin de viande grasse et de vin capiteux avec une vrai ambiance, où tout le monde est présent ; c’est encore plus fort, plus durable que la joie d’un festin même si ce festin est éternel, une joie qui ne passe pas.
Les circonstances de la proclamation des béatitudes nous laissent voir une volonté de rassurer de la part de Jésus. « Quand (il) vit toute la foule qui le suivait »… Il n’a pas prononcé ces béatitudes en privé à ces apôtres, le début de l’évangile nous fais voir une opportunité qu’il a saisit pour traiter un sujet d’importance capital. La préoccupation du monde à venir n’est pas nouveau, on se souvient des sadducéens qui ne croyaient pas en la résurrection des morts, il y en avait certainement dans la foule ce jour là. Et Jésus rassure.
Mais en même temps il nous invite, à nous engager, la peur de la mort éternelle oui mais on peut y échapper :
Chers frères et sœurs, prenez le temps de visiter ces stands que nous dresse Jésus, et que l’église complète par le tapis rouge qu’elle déroule pour nos bienheureux auprès de Dieu. Tout es là, des marques hauts gamme :
La sainteté est possible aujourd’hui, malgré les vicissitudes de notre quotidien.

Il faut surtout y penser, le programmer et en faire une priorité. C’est en cela que c’est admirable de lire les œuvres de Sainte Thérèse, celle qui a trouvé sa sainteté comme tous les autres d’ailleurs dans les banalités quotidienne. Nous avons très souvent un regard trop obscur sur le monde qui nous empêche de voir avec tout leur éclat, la vie de nos contemporains que Dieu nous donnent en exemple. Aujourd’hui c’est exposition, vente de la sainteté. Ils sont tous au rendez vous chacun avec le charisme propre qu’il a développé et qui lui vaut d’être cité en exemple. Ces vertus ils nous les vendent seulement au prix de l’amour. Venez acheter ramassez et qu’aucune vertu ne traîne car elles sont toutes fruits de l’Esprit pour rassasier la faim du monde.
il y a de la sainteté pour tous les goûts et couleurs (gout ou couleur Jacques, Pierre ou Paul, couleur Blanche-Blandine aussi, Rose ou Rosine, Bernadette, pour toutes les pointures ( L, M, XL, XXL)
Prenons le temps aujourd'hui, de visiter tous les stands de tous les saints.
Le premier stand ou salon VIP : les saints canonisés, reconnus, dûment répertoriés.
Nous les connaissons. Nous portons leurs noms et faisons de leur vie un programme : Pierre, Paul, Thérèse, Jean, Françoise, Bernadette…
C'est intéressant de les connaître, je suppose au moins que chacun de vous connaît l’histoire des saints dont il porte le nom et dont les membres de sa famille portent le nom ?
C'est merveilleux de lire leur vie ; comment ils ont vécu l'Évangile.
C'est précieux de nous en faire des amis et de leur demander de prier pour nous, afin que leur programme de vie puisse être aussi le nôtre pour nous introduire un jour dans la vision béatifique de Dieu, l’implacable face à face.
Après le stand de ceux qui portent le macaron vient le stand le plus vaste. Ce sont des hommes et des femmes, nos parents et amis très proche que Dieu a accueillis dans sa maison pour leur donner le salaire du serviteur dévoué. Ils ont vécu l’Evangile, ils ont eut un dévouement inlassable pour les autres, sans même penser qu'ils pourraient en tirer gloire.
C’est l’entrepreneur créateur d’emploi, le médecin, l’infirmière, l’humaniste sur les terrains des grands conflits ou l’homme politique qui refuse les compromissions, cette mère de famille….
Les saints c’est aussi ceux qui auraient eu bien des raisons de désespérer de la vie, ou de leur santé, ou de leur conjoint, mais qui ont tenu bon, non par résignation, mais en sachant que cette croix conduisait à la vie après la vie. N’oublions pas les sacrifiés de la vie et de notre société qui caché témoignent pourtant d’une certaine sainteté.
Les saints que nous fêtons aujourd’hui c’est aussi cet incroyant au cœur droit qui a vécu au jour le jour l'Évangile qu'il n'avait jamais lu ni entendu.
La foule immense, est beaucoup plus importante que les prix Nobel évoqués plus haut ! Bien plus nombreuse que les 144 000 de l'Apocalypse !
Dans cette foule immense, nous en connaissons sûrement quelques-uns… nos parents, nos amis, un frère, une sœur, un voisin…
Des hommes, des femmes qui ont vécu tout simplement l'une ou l'autre des Béatitudes. Ils ont été les premiers surpris d'entendre le Seigneur leur dire : « Bon et fidèle serviteur, tu as été fidèle dans les petites choses… Entre dans la joie de ton maître. »
Après la messe, beaucoup rejoindrons les cimetières où reposent dans la paix du Seigneur les membres défunts de la famille, en déposant une fleur sur les tombes, c’est en quelque sorte le tour des stands qui se poursuit, car ce sont eux les saints de la vie quotidienne.

C'est avec des gens imparfaits que Dieu veut faire les saints.
Jésus est venu « sauver ceux qui étaient perdus ».que parvenus au bonheur éternel tous prient pour nous et nous tiennent la main afin que nous partagions un jour le bonheur auprès de Dieu.
Saints et Saintes de Dieu dont la vie et la mort ont crié Jésus Christ sur les routes du monde, saints et saintes de Dieu priez pour nous.

Abbé Cyrille Bouda