18 août 2010

Homélie du 15 août 2010-Dieu ne se révèle pas que dans la Bible

Homélie de l'Assomption 2010


Il n’est jamais inutile de relire la définition officielle de l’Assomption par Pie XII, le 1er novembre 1950 (définition qui ne fait que confirmer une conviction populaire et des traditions locales) : « En l'autorité de notre Seigneur Jésus-Christ, des bienheureux Apôtres Pierre et Paul, et par notre propre autorité, nous prononçons, déclarons, et définissons comme un dogme divinement révélé que l'Immaculée Mère de Dieu, la Vierge Marie, après avoir achevé le cours de sa vie terrestre, fut élevée corps et âme à la gloire céleste »

« Dogme divinement révélé » … il n’y a pas de trace de l’assomption dans l’Ecriture : comment peut-on dire qu’elle est divinement révélée ? Je souhaiterais répondre en deux temps, avec mon cœur et avec la raison.

Le cœur :
Lorsqu’un Pape s’exprime, je l’écoute avec confiance, car je crois vraiment que c’est le successeur légitime de Saint Pierre. S’il me dit que c’est « divinement révélé », j’ai toutes les raisons de penser que c’est vrai, à priori, d’autant plus que c’est la seule fois dans tout son Pontificat que Pie XII a utilisé cette capacité de s’exprimer infailliblement (ex cathedra), pour définir ainsi un dogme. 
Mais bien sûr, j’ai le droit de réfléchir, j’ai même le devoir de chercher avec ma raison, les raisons de cette affirmation.

La raison :
Voici ce que nous dit le Concile Vatican II (Dei Verbum, constitution dogmatique sur la Révélation) : Dieu se révèle de trois manières à l’homme ; la Révélation est unique, mais elle se produit de trois manières complémentaires, à savoir l’Ecriture (la Bible), la Tradition (les précisions qui ont été données par les Pères de l’Eglise, surtout,) et le Magistère (l’enseignement officiel des Papes et des Evêques) ; ces trois « canaux » ne sont pas étanches ni exclusifs les uns des autres, ils se confondent parfois, voici quelques citations du Concile : « ce n'est pas par la Sainte Ecriture toute seule que l'Eglise puise la certitude qu'elle a     sur tout ce qui est révélé. C'est pourquoi l'Ecriture et la Tradition doivent être reçues et vénérées l'une et l'autre avec un égal sentiment de piété, avec un égal respect (34). […]
Mais la charge d'interpréter authentiquement la parole de Dieu écrite ou transmise (37) a été confiée au seul Magistère vivant de l'Eglise (38), dont l'autorité s'exerce au nom de Jésus-Christ. […]
Il est donc évident que la Tradition sacrée, la Sainte Ecriture et le Magistère de l'Eglise sont entre eux, selon le très sage dessein de Dieu, tellement liés et associés, qu'aucun d'eux n'a de consistance sans les autres, et que tous contribuent en même temps de façon efficace au salut des âmes, chacun à sa manière, sous l'action du seul Saint-Esprit.

A l’appui de ces citations et de cet enseignement « officiel », je puis ajouter deux exemples vécus : ce jeune Papa qui m’a dit il y a deux ans avoir été –je cite- « converti par le Magistère (comme on pourrait le dire de la Bible elle-même) » ; je pense aussi à la communauté des petites sœurs de Bethléem, qui est née d’un paragraphe –si on peut dire- de l’homélie de Pie XII, en 1950, précisément le jour où le dogme fut déclaré officiellement (touchées par l’appel du Saint-Père à fonder des communautés contemplatives, des jeunes femmes ont fondé la communauté).

De même que Ecriture, Tradition et Magistère sont indissolublement liés, il y a un lien très fort entre trois dogmes qui dépendent les uns des autres : il s’agit de l’Assomption, l’Immaculée Conception et Noël

A l’origine, par sa conception immaculée, Dieu prépare pour son Incarnation une demeure digne de lui ; une fois la « demeure » prête, l’Incarnation se produit (c’est Noël) et lorsque prend fin son séjour sur la terre, Marie connaît une « assomption ». Préservée du péché, en effet, Marie n’a pas eu une mort comme les autres, étant donné le lien entre le péché et la mort. « Assomption », « Dormition », les mots sont faibles mais disent tous la même chose…

Ce que l’on comprend, en rapprochant les trois dogmes, c’est que ces deux dogmes mariaux bien connus qu’on fête le 08 décembre et le 15 août sont tournés entièrement vers le Christ, de même que le vocable « mère de Dieu », du Concile d’Ephèse en 431, veut souligner que Jésus est Dieu, plus que mettre Marie sur un piédestal. Marie est l’introduction nécessaire à la connaissance et à l’amour de Jésus, et d’ailleurs beaucoup de gens le sentent, même en dehors des frontières visibles de l’Eglise.

Je vous recommande la méditation de la préface, dont voici le texte intégral, et sur laquelle j’ajoute deux petits commentaires : « Vraiment, il est juste et bon de te rendre gloire, de t'offrir notre action de grâce, toujours et en tout lieu, à toi, Père très saint, Dieu éternel et tout-puissant, par le Christ, notre Seigneur. Aujourd'hui la Vierge Marie, la Mère de Dieu, est élevée dans la gloire du ciel : parfaite image de l'Eglise à venir, aurore de l'Eglise triomphante, elle guide et soutient l'espérance de ton peuple encore en chemin. Tu as préservé de la dégradation du tombeau le corps qui avait porté ton propre Fils et mis au monde l'auteur de la vie. C'est pourquoi, avec tous les anges du ciel, plein de joie nous (disons) chantons :

Aujourd’hui : ce petit mot est d’une importance capitale ! La vertu de la liturgie est de nous plonger aujourd’hui dans un événement qui appartient désormais à l’éternité, et non pas simplement à l’histoire ; autrement dit, l’Assomption est aujourd’hui, vraiment, mais pas dans le sens d’une retour dans le passé, sous forme de commémoration, mais par une plongée dans l’éternité qui n’est autre que l’aujourd’hui de Dieu.

« Aurore de l’Eglise triomphante » : cette expression nous rappelle les trois « états » de l’Eglise, dont on sait qu’elle est militante, ici-bas sur la terre, souffrante, là-haut dans le Purgatoire, triomphante, pour ses membres qui sont entièrement dans la lumière. Motivés par l’exemple des membres « triomphants », dont Marie est un membre éminent, tâchant de construire un monde beau et digne de Dieu, nous faisons toujours bien de prier pour les membres souffrants, les « âmes du Purgatoire », comme beaucoup d’entre vous le font.

Rendons grâce à Dieu de nous avoir donné pour mère celle qu’il avait choisie pour l’habituer au monde, grâce à elle, nous nous habituons à Dieu : elle est « le choix de Dieu », elle sera aussi le nôtre.

P. Emmanuel d'Andigné

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