Homélie du 21ème dimanche du temps ordinaire-Année C
Tout d’abord, brièvement, je voudrais vous signaler qu’un reportage de bonne qualité a été diffusé sur France 2, hier à 13h (on peut le consulter sur le site de la chaîne) : il s’agit des personnes qui consacrent une semaine de leur Eté dans une abbaye pendant les vacances ; j’ai suffisamment ici-même dénoncé les caricatures de l’Eglise faites par les médias, il faut savoir aussi reconnaître honnêtement quand le ton est juste ; je vais leur écrire pour les remercier !
« Dans sa marche vers Jérusalem, Jésus passait par les villes et les villages en enseignant » . Jésus, lorsqu’il a structuré l’Eglise à partir des Apôtres, leur a donné trois charges, dont leurs successeurs, les évêques, sont revêtus de générations en générations, et puisque les évêques ne peuvent pas être partout à la fois, ils s’adjoignent des collaborateurs, prêtres et diacres, pour réaliser correctement ces trois charges : enseigner, sanctifier, gouverner ; le prophète enseigne, le prêtre sanctifie, le roi gouverne
Déjà dans l’Ancienne Alliance, on connaissait ces trois charges, jamais elles n’avait été cumulées par un seul homme : et c’est ainsi que ses contemporains ont identifié Jésus comme le Messie, pour ou contre, d’ailleurs, ce qui prouve que la chose était claire et avérée ! Jésus, ainsi, a répandu la révélation de Dieu, la sanctification par Dieu et la direction par Dieu.
Or, ce qui est vrai de la hiérarchie à l’intérieur de l’Eglise l’est aussi dans les relations entre l’Eglise et l’extérieur. Cela veut dire que nous devons en tant que communauté rendre au monde ces trois grand services : l’enseigner, lui donner accès à la sanctification, lui permettre de se soumettre à la seigneurie de Dieu par une vie qui ressemble à celle du Christ : c’est l’horizon d’Alpha, c’est à cela que sert Alpha !
Mais je voudrais m’attarder sur ce qui semble être malgré tout le propos principal de cet Evangile : la « porte étroite »
J’ai discuté avec un vieil homme qui avait lu les lectures d’aujourd’hui en avance : il me parle de l’ouverture à toutes les nations de la 1ère lecture, avec un visage éclairé, mais se met à froncer les sourcils en évoquant l’évangile, regrettant visiblement la dureté de Jésus. Il m’a fait penser à un prêtre que j’ai connu il y a quelques années et qui me disait toujours, à propos des scouts « il vaut mieux être poire que vache ». Comment Dieu peut-il être tour à tour bon et dur ?
Je voudrais répondre à cette question en deux temps, et en vous proposant deux principes :
1) il ne faut jamais frelater la parole de Dieu : nous devons prendre le Christ comme il est, tout entier, sans « zapper » les passages qui nous dérangent ; s’il s’avère que des phrases bousculent la mentalité actuelle, c’est peut-être le signe que la mentalité en question n’est plus évangélique ou qu’elle s’oppose à l’Evangile, il faut vérifier, et toujours faire le choix de l’Evangile (l’Evangile ou le Magistère, c’est pareil, souvenez-vous de ce que je vous ai dit dimanche dernier).
2) un évangile, je crois, se regarde de très loin et de très près, je m’explique.
Le regarder de très loin signifie regarder l’ensemble de la Révélation , en s’élevant au-dessus du texte, comme Saint Jean qui s’est élevé tel un aigle et qui a déclaré : « Dieu est Amour » ! Cette phrase en comme le point le plus élevé et la source de toutes les révélations de Dieu. Or, l’amour montre souvent sa bonté, sa tendre, mais il peut parfois se mettre en colère, comme un papa se met en colère quand il le faut dans une famille (ainsi que le montre la 2ème lecture). A titre d’exemple, vendredi dernier, le prophète Ezéchiel s’adressait à nous (et peut-être plus particulièrement à nous les prêtres, ça nous fait du bien) en ces termes dans la première lecture : « La parole du Seigneur me fut adressée : « Fils d’homme, parle en prophète contre les bergers d’Israël, parle en prophète pour leur dire ceci : Parole du Seigneur Dieu : Malheur aux bergers d’Israël qui sont bergers pour eux-mêmes ! N’est-ce pas pour les brebis qu’ils sont bergers ? « Au contraire ! vous buvez leur lait, vous vous êtes habillés avec leur laine, vous égorgez les brebis grasses, vous n’êtes pas bergers pour le troupeau. Vous n’avez pas rendu des forces à la brebis chétive, soigné celle qui était faible, pansé celle qui était blessée. Vous n’avez pas ramené la brebis égarée, cherché celle qui était perdue. » Ez 34
L’amour de Dieu qui montre si souvent sa bonté, parfois se met en colère, lorsque l’enfant bien-aimé ou l’épouse bien-aimé s’écarte de la voie droite et donc du vrai bonheur.
A présent, regardons le texte de très près : Jésus donne la solution à cette exclusion du Royaume qui semble si contraire à sa bonté et à l’universalité du Salut relevée par Isaïe : « éloignez-vous de moi, vous tous qui faites le mal ». C’est là que Jésus donne la raison fondamentale de cette exclusion qui ne vient pas de sa volonté, mais bien plutôt de la nôtre, puisque de son côté « Dieu veut que tous les hommes soient sauvés et parviennent à la connaissance de la vérité» (I Tim 2:4)».
Il y a pourtant un fait étrange, c’est le singulier que Jésus utilise (« la porte…»). Selon la tradition biblique, les justes entreront par les portes de Jérusalem (Is 26,2; Ap 22,14). Le Psalmiste souligne la préférence de Dieu pour les portes de Sion (Ps 87,2) et oppose celles-ci aux portes de la mort (cf. Ps 9,14-15). Dans la plupart des textes bibliques précités, comme dans d’autres, le juste accède au salut en passant par les portes (au pluriel) (cf. Is 26,2; Ps 118,19; Ap 22,14). Mais Jésus nous demande de passer par la porte (une seule); bien plus, une porte étroite. En Jean 10,9, Jésus s’identifie avec la porte par laquelle doivent entrer ses brebis. Passer par la porte étroite, c’est donc suivre Jésus.
Je crois que nous pouvons demander deux grâces à Dieu, aujourd’hui : l’humilité, qui fait que on peut passer par n’importe quelle porte, puiqu’on n’est pas « gonflé » de soi-même, et l’amour, puisque seul l’amour peut répondre à l’Amour.
St Bernard disait (nous le fêtions vendredi) « lorsque Dieu aime, il ne veut rien d’autre que d’être aimé. Il n’aime que pour qu’on l’aime, sachant que ceux qui l’aimeront trouveront dans cet amour même la plénitude la joie (sermon sur le Cantique des Cantiques)». Et j’ai plaisir aussi à citer, dans le même sens, le manuscrit B de l’Histoire d’une âme de Sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus : « O Jésus, je le sais, l'amour ne se paie que par l'amour, (NHA 922) aussi j'ai cherché, j'ai trouvé le moyen de soulager mon cœur en te rendant Amour pour Amour » .
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