03 août 2010

Homélie du 1er août 2010-être riche en vue de Dieu ?

Homélie du 18ème dimanche du Temps Ordinaire - Anné C

« Vanité des vanités, tout est vanité » nous dit l’Ecclésiaste. Propos d’un homme désabusé par la monotonie de l’existence humaine, la futilité de toutes les activités du monde, l’éternel recommencement du temps… Sentiments qui sont peut-être les nôtres aujourd’hui. Cette attitude s’oppose à l’émerveillement suscité par l’adoration du Créateur à travers sa création… Le ciel et la terre, la mer et l’univers sont l’œuvre de Dieu et en cela objet d’adoration et source d’émerveillement.

A l’origine, le terme vanité signifie « buée », « haleine », « vent »… pour décrire, dans la poésie hébraïque à la fois la légèreté de l’être et la fragilité humaine. C’est le sens que les beaux arts ont repris pour désigner le genre pictural des natures mortes soulignant ainsi la fragilité et l’éphémère des choses de la terre. Chez l’Ecclésiaste, ce mot évoque l’être illusoire des choses de ce monde et de nos actions et par conséquent la déception qu’elles réservent à l’homme si elles ne sont orientées que vers lui.

Or toutes nos activités devraient être portées, non vers nous-mêmes, mais vers Dieu, comme nous le montre la parabole de l’Evangile que nous venons d’entendre. Comme souvent, Jésus profite d’une question surgie de la foule pour nous inviter à aller plus loin. Par la réponse qu’il donne, il montre d’abord à celui qui la pose qu’il s’est trompé d’interlocuteur. Jésus ne se place pas comme un Rabbin intervenant auprès de ses contemporains pour régler leurs problèmes domestiques. Il se place comme l’unique médiateur entre Dieu et les hommes.

Dans une première lecture de cette parabole, nous pourrions penser que Jésus nous encourage à une certaine insouciance qui nous ferait dire : « la Providence pourvoira ». Une telle interprétation laisserait alors penser que Jésus reste étranger à nos préoccupations humaines et conduirait finalement à nier le réalisme de l’Incarnation. Le Christ nous invite à être riche en vue de Dieu et non pas à amasser pour nous-même et à faire de l’appât du gain le but et le terme de notre existence.

Mais qu’est-ce qu’être riche en vue de Dieu ?

Saint Paul nous donne un premier élément de réponse : « Rechercher les réalités d’en haut en faisant mourir ce qui appartient à la terre : débauche, impureté, passions, désirs mauvais… » autrement dit le péché. Et de mettre notre espérance dans le Christ. « En elle, comme le dit l’auteur de l’épître aux Hébreux, nous avons comme une ancre de notre âme sûre autant que solide et pénétrant par delà le voile. » Ce n’est pas l’ancre que l’on jette au fond des abîmes de la mer mais bien celle que l’on jette vers le ciel pour qu’elle nous mène à Dieu le Père.

Etre riche en vue de Dieu, c’est faire fructifier les grâces reçues des sacrements depuis notre baptême. Grâces renouvelées dans notre fréquentation fidèles des sacrements. Reprenons à notre compte, l’interpellation de Jean Paul II : « France, fille ainée de l’Eglise, qu’as-tu fait de ton Baptême ? » Souvenons-nous sans nostalgie stérile comme le Christ peu à peu façonne notre être au fil du temps par les sacrements.

Etre riche en vue de Dieu, c’est faire en sorte que notre vie quotidienne soit le lieu de notre sanctification, c’est là que nous pouvons rencontrer le Christ. N’oublions pas que le Christ a appelé ses disciples au cœur de leurs activités professionnelles : c’est alors qu’il réparait ses filets que Pierre a croisé le regard de Jésus, et c’est à son bureau de publicain, que Matthieu a répondu à l’appel du Christ.

Etre riche en vue de Dieu, c’est se faire des amis au ciel parmi les saints inconnus ou inconnus. Mais si nous arrivons au ciel les mains pleines, nous risquons de ne pas pouvoir saisir la main qu’ils nous tendent pour nous mener dans le sein du Père. Il est illusoire ou peut-être avons nous besoin de nous rassurer, marqués par quelque relent de paganisme, que nous emporterons quelque chose au ciel. Comme le dit le titre d’un roman policier « Un linceul n’a pas de poche »

"Sorti nu du ventre de notre mère, nu nous y retournerons" nous dit Job. Au seuil de notre vie, nous avons été enfantés par l’Eglise notre Mère, c’est elle qui nous accueillera en son sein au terme de notre vie terrestre, au jour du face à face avec le Christ qui est le seul héritier et par qui nous sommes devenus cohéritiers.
Amen

P. Stanislas Lemerle

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