30 octobre 2007

HOMELIES

HOMELIE DU 29ème DIMANCHE du TEMPS ORDINAIRE – C

27- 28 OCTOBRE 2007

« Le Seigneur est un juge qui ne fait pas de différence entre les hommes », nous disait Ben Sirac le Sage. – « Dieu ne regarde pas l’apparence, comme font les hommes : il sonde les reins et les cœurs », précisait le verset précédant l’Evangile.

La parabole proposée par Jésus met en scène deux personnages bien différents l’un de l’autre : « l’un était pharisien et l’autre publicain. Ce sont des noms que l’on rencontre assez souvent dans l’Evangile. Il peut être utile d’en rappeler le sens.

- Qu’est-ce qu’un pharisien ?

Ceux dont parle l’Evangile sont les descendants d’une secte juive apparue au IIème siècle avant Jésus-Christ et qui constitua un important mouvement politique et religieux. En fait, au temps de Jésus, les pharisiens jouissent d’un grand prestige auprès du peuple, dont ils sont les chefs et les guides religieux.

Soucieux du salut de leur peuple, ils ont toujours vécu au milieu de lui, tout en se distinguant de la masse. Ils occupent volontiers les fonctions des synagogues : président, prédicateur, chantre, gardien des livres, juge au tribunal. A l’époque du Nouveau Testament, beaucoup étaient scribes ou docteurs de la loi. D’autres gagnaient leur vie de leurs mains.

- Qu’est-ce qu’un publicain ?

Au temps de Jésus, ce sont les agents de la perception de l’impôt. La Palestine dépendait alors de trois juridictions différentes, correspondant à trois districts douaniers. Il semblerait que Zachée relevait du procurateur romain, et Lévi, d’Hérode Antipas, palestinien.

Les publicains étaient détestés de leurs compatriotes parce que complices des injustices qu’entraînait l’institution. Ils étaient doublement honnis lorsque, comme Zachée, ils travaillaient pour la puissance occupante. Ils étaient placés dans la catégorie des pécheurs, au même rang que les prostituées. Leur fréquentation était donc compromettante.

- Quelle était l’attitude de Jésus à leur égard ?

Nous avons tous en mémoire les paroles très sévères du Christ à l’encontre des pharisiens. S’adressant aux foules et à ses disciples, il leur déclare : « les scribes et les pharisiens siègent dans la chaire de Moïse : faites donc et observez tout ce qu’ils peuvent vous dire, mais ne vous réglez pas sur leurs actes, car ils disent et ne font pas… Ils mettent sur les épaules des autres de pesants fardeaux, alors qu’eux-mêmes se refusent à les remuer du doigt. Toutes leurs actions, ils les font pour se faire remarquer des hommes. Ils aiment à occuper les premières places dans les dîners et les premiers sièges dans les synagogues, à être salués sur les places publiques et à s’entendre appeler « Maîtres » par les hommes. »

A ces accusations d’hypocrisie, s’ajoute celle de négliger l’essentiel en se perdant dans les détails : « malheureux êtes-vous, guides aveugles, vous qui dites : « Si l’on jure par l’autel, cela ne compte pas, mais si l’on jure par l’offrande placée dessus, on est tenu. » « Vous versez la dime de la menthe et du fenouil, alors que vous négligez ce qu’il y a de plus grave dans la loi : la justice, la miséricorde et la fidélité… » « Malheureux êtes-vous, scribes et pharisiens, hypocrites, vous qui ressemblez à des sépulcres blanchis : au dehors, ils ont belle apparence, mais au-dedans, ils sont remplis d’ossements de morts et d’impuretés de toutes sortes… »

Et combien d’autres reproches de la même veine !

Après ce déluge de condamnations, on pourrait s’étonner de voir un pharisien, Nicodème, venir de nuit trouver Jésus. C’est un des notables juifs, il est membre du sanhédrin, c’est-à-dire le tribunal suprême des juifs. Nicodème est intrigué par la parole de ce Jésus. Il le salue respectueusement : « Rabi, nous savons que tu es un maître qui vient de la part de Dieu, car personne ne peut opérer les signes que tu fais si Dieu n’est pas avec lui. » Jésus voit son désir de chercher à s’éclairer. Il engage le dialogue et lui ouvre des horizons insoupçonnés. « Dieu n’a pas envoyé son Fils dans le monde – dit Jésus – pour juger le monde, mais pour que le monde soit sauvé par lui. » Ce même Nicodème prendra discrètement la défense de Jésus, lors de son jugement, et il participera à son ensevelissement.

Un autre pharisien sera Saul, converti sur le chemin de Damas, et devenu le grand apôtre Paul.

Jésus s’est également tourné vers certains publicains : « comme il s’en allait – nous dit l’Evangile – il vit en passant, assis au bureau des taxes, un homme qui s’appelait Matthieu. Il lui dit : « suis-moi. » Il se leva et le suivit. » Ce qui suscite un grand étonnement des pharisiens : « Pourquoi votre maître mange-t-il avec les collecteurs d’impôts et les pécheurs ? » Jésus répondra : « Ce ne sont pas les bien-portants qui ont besoin de médecin, mais les malades… Je suis venu appeler, non pas les justes, mais les pécheurs. »

Zachée était l’un d’eux, un publicain, un pécheur, touché par l’appel de Jésus : « Il me faut aujourd’hui demeurer dans ta maison. » « Eh bien, Seigneur – répond-il aussitôt – je fais don aux pauvres de la moitié de mes biens, et, si j’ai fait tort à quelqu’un, je lui rends le quadruple. »

La parabole n’a pas pour but de nous faire condamner les uns ou admirer les autres, mais de regarder en nous-mêmes.

Le risque de juger sur les apparences nous guette toujours, comme celui d’un certain pharisaïsme : agir en fonction de ce qui se voit, alors que Dieu regarde le cœur.

« Celui qui sert Dieu de tout son cœur est bien accueilli – disait Ben Sirac – et sa prière parvient jusqu’au ciel. La prière du pauvre traverse les nuées. »

Puissions-nous poursuivre notre prière, dans ces bonnes dispositions du cœur.

Amen.

Père Jean Rouillard

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