19 décembre 2009

Homélie du 20 décembre 2009

Homélie du 4ème dimanche de l'Avent - année C
Les gestes de la messe, suite et fin
Nous avons exploré une bonne partie des gestes de la messe, et nous allons bientôt être à cours d’explication, et ce pour trois raisons : la première, c’est que la somme des gestes n’est pas infinie, la seconde et la troisième touchent à la nature même de la liturgie :

Par nature, la liturgie donne naissance à des gestes sans qu’il y ait toujours une explication claire et avérée historiquement,car elle est l’expression de la foi, et qu’on ne peut pas enfermer dans un code unique et immobile le culte public que nous rendons à Dieu (pas plus, d’ailleurs, qu’on ne peut le faire dans le culte privé, personnel ou familial, la vie de prière, qui ne peut pas rester toute une vie figée). Nous allons en avoir une illustration dans un instant.

Et puis, troisième et dernière raison : par nature, la liturgie a quelque chose d’artistique, de « dramatique », au sens théâtral du terme. La liturgie, c’est le chef d’œuvre de la prière, elle est faite pour être belle, et comme toutes les œuvres d’art, une fois réalisée, elle se prête à l’interprétation et échappe bien vite à ceux-mêmes qui l’ont conçue, de sorte qu’elle devient (pardon pour le gros mot) "polysémique" : un même geste peut avoir plusieurs sens, pourvu que tous les sens qu’on ajoute et qu’on peut légitimement ajouter soient conformes à la règle de foi.

Ce principe bien connu est celui selon lequel tout ce que nous pensons soit compatible parfaitement avec l’ensemble de la Révélation que Dieu nous a faite, et c’est l’œuvre des Papes, surtout, que d’avoir veillé à cette règle de foi, pour faire le tri, en quelque sorte, entre les opinions passagères, les erreurs, les intuitions excellentes et les progrès dans la compréhension du dogme chrétien. Il faut toujours soumettre ses intuitions au magistère de l’Eglise

Juste avant de proclamer l’évangile, on se signe sur le front, la bouche et le cœur : pourquoi ?

L’histoire de ces petites croix est très compliquée, l’Orient et l’Occident ont évolué tous les deux dans plusieurs directions, toutes complémentaires) signant d’abord uniquement le front, puis progressivement en plus, la bouche et le cœur. Personne ne sait avec précision à quand remonte cette pratique, ni ce qu’elle pouvait signifier exactement au moment où elle fit son apparition …

Ce qui est très probable, c’est son lien avec le baptême, car depuis toujours on signe le front du baptisé : ce geste rappelle donc le baptême, et le fait que le mystère de la croix est fondamental pour l’efficacité d’un baptême vécu et assumé toute la vie.

Quant à sa signification pour nous aujourd’hui, je vous propose cette interprétation : tout d’abord, je constate avec vous que notre corps est vraiment concerné par la religion, c’est bien lui que nous marquons à trois reprises de la croix ; une religion que ne serait que du cœur, que de l’intelligence ou que du discours serait en danger de disparition ou d’idéologisation. Un homme est fait de corps autant que d’âme, son corps est donc un acteur respectable de la liturgie
(des gens s’affligent de n’être à la messe que de corps : à ceux-là, je voudrais dire que en attendant que le cœur et l’intelligence s’y mettent, si le corps est là, c’est déjà pas mal, et c’est une belle prière ! Bravo d’avoir déplacé vos corps jusqu’ici, recommencez dimanche prochain !)

Ensuite, pour ce qui est de l’intelligence, nous devons la nourrir, et pas seulement pendant l’homélie : la catéchèse adulte commence cette année le 12 janvier. Il faut nourrir sa foi, et demander à Dieu qu’il apporte, au moment de l’Evangile, un éclairage à notre intelligence.

Pour ce qui est du cœur, il est bon de faire un signe de croix dessus, pour éviter que notre élan spirituel se borne à des sentiments, même s’ils sont bons : la croix ajoutée au cœur donne à celui-ci une vraie profondeur.

Enfin, pour ce qui est de la croix sur les lèvres, j’y vois deux intérêts : que toutes nos paroles soient dignes de Jésus, et que nous ayons la simplicité et l’audace de répandre l’évangile dans cette paroisse, pour ne pas garder pour nous cette parole qui donne la vie.

L’Evangile d’aujourd’hui, et je termine par là, donne confiance à celui qui partira évangéliser : en effet, Marie s’est déplacée « en hâte », « rapidement », pour aller rendre visite à sa cousine et Jean-Baptiste, dans le sein de sa mère, a tressailli d’allégresse en présence de Marie qui lui portait Jésus …

Les personnes qui habitent tout près de chez nous sont comme Elisabeth, ils portent une espérance et une attente de Dieu, ils tressailliront d’allégresse si nous leur portons Jésus, ils verront enfin ce qu’ils espèrent au fond d’eux-mêmes. Que l’Esprit Saint nous communique sa hâte, et suscite de nombreuses visitations !

P. Emmanuel d'Andigné

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