Homélie du 6ème dimanche du Temps Ordinaire - Année B
Aussitôt Jésus le renvoya avec cet avertissement sévère : « Attention, ne dis rien à personne, mais va te montrer au prêtre. »
Pourquoi cette interdiction ? Nous l’avons déjà vu la semaine dernière : Jésus est incompréhensible sans sa passion, mort et résurrection
Il est répandu, pourtant, encore aujourd’hui d’accepter cette réalité. J’en veux pour preuve cet épisode affreux qu’un ami m’a raconté il y a quelques années : deux personnes –je préfère rester vague- sont en train de choisir un signet pour un évènement religieux ; tout à coup apparaît parmi les signets possibles un Christ en croix ; « ah non, c’est un mauvais message ! », dit l’un d’eux, et l’image ne fut pas choisie !!!
Notez que Saint Pierre lui-même a eu une réaction similaire, lorsque Jésus annonce sa Passion, en lui reprochant de dire des choses désagréables ; vous connaissez la réponse de Jésus : « passe derrière moi, Satan, tes pensées ne sont pas celles de Dieu mais celle des hommes (Mt 16, 23)»
Jésus est incompréhensible sans sa passion, mort et résurrection, car il ne faut pas prendre le signe pour la réalité. Ceci a deux conséquences, l’une concerne l’Evangile lui-même -pour notre culture biblique et théologique-, l’autre concerne les miracles de Lourdes (et la recherche de guérison).
L’Evangile est, en fait, essentiellement, une montée vers Jérusalem (montée qui parle beaucoup au cœur des Juifs) et plus précisément une montée vers le mystère de la passion, de la mort et de la résurrection de Jésus, tous les évènements s’y rapportent
Prenons deux exemples en un : Cana et la multiplication des pains sont certes des signes, mais ils sont surtout l’annonce du grand signe de l’Eucharistie, ce pain et ce vin qui deviennent le corps et le sang du Sauveur, au moment de la Passion.
Lourdes
La guérison, disons-le tout net, n’est pas l’œuvre de la sainte Vierge. C’est l’œuvre de Jésus, qui guérissait jadis en Galilée et qui veut continuer à le faire aujourd’hui. Par conséquent, la guérison est un signe d’une œuvre plus grande que Jésus veut réaliser.
Je souhaite bien sûr à tous les malades d’être soulagés, mais s’ils le sont, ce sera pour que se réalise une œuvre plus grande : le Salut !
Il y a des tas de gens en bonne santé qui sont en grand danger spirituel (et des malades aussi d’ailleurs) !
Le professeur Tellier, qui fut pendant plusieurs années responsable de l’équipe chargée d’authentifier les miracles de Lourdes témoignait volontiers qu’il avait vu beaucoup plus de guérisons intérieures que de guérisons extérieures dans son « travail ».
Mais de toutes façons, même les guérisons intérieures sont le signe d’une volonté plus grande : sauver !!!
Saint Jean, dans son Evangile utilise toujours le mot « signe », jamais celui de « miracle ». Les trois autres Evangiles parlent de signes et de miracles … Saint Jean jette un regard plus « théologique » que les trois autres, il analyse d’avantage, mais la réalité est la même : quelqu’un était malade, et il ne l’est plus ! Cela veut dire que nous avons trois mots à notre disposition, et qu’il faut faire « jouer » les uns avec les autres :
Le mot « signe », qui permet de comprendre que le miracle renvoie à plus grand que lui (le Salut) ; le mot « miracle » qui a l’avantage de noter l’inexplicabilité du phénomène, et c’est nécessaire (Dieu est Tout-Puissant) ; et enfin le mot « grâce », par lequel nous comprenons que Dieu fait ce qu’il veut, et gratuitement, en attendant de nous faire la grâce des grâces : le Salut.
Chacun de ces mots comporte des avantages et des inconvénients, il faudrait les traiter comme des paramètres !
C’est par Saint Paul que je voudrais terminer. Cette « deuxième lecture » comporte deux expressions lapidaires, qui pourraient devenir comme deux devises, pour nous :
« Pour la gloire de Dieu », qui est effectivement devenue la devise des jésuites (ad majorem Dei Gloriam)
« Pour qu’ils soient sauvés » (encore cette préoccupation du Salut) : nous retrouvons cette « devise » dans notre fameux « pour la gloire de Dieu et le salut du monde » de la liturgie, car ce n’est pas simplement soi qui est en jeu, c’est le monde entier. Il y a un lien très fort entre la destinée d’un homme seul et la destinée du monde.
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