25 mai 2012

Homélie du 22 avril 2012-la paix du Christ et les autres paix


Homélie du 3ème dimanche de Pâques - Année B

Saint Jean, aujourd’hui, vient de nous dire « celui qui dit ’Je le connais’, et qui ne garde pas ses commandements, est un menteur : la vérité n'est pas en lui. »

C’est un texte assez dur, mais ça nous fait du bien qu’on nous remette un peu en place … le temps pascal ne risque-t-il pas de devenir le temps du relâchement après le carême ?

Je disais le soir de Pâques aux néophytes : votre mort et votre résurrection commencent dès maintenant, elles ne commencent pas le jour de votre mort physique (c’est dans ce sens que saint Paul disait [Col 3,1] « si donc vous êtes ressuscités avec le Christ, recherchez les réalités d'en haut : c'est là qu'est le Christ, assis à la droite de Dieu » ).

Si saint Jean se montre clair et net et un peu sec, c’est parce qu’il a fait la rencontre de Jésus ressuscité (celui qui n’aurait pas fait cette rencontre se voit obligé de faire une lecture morale, moralisante, de ce texte, et ne peut que le trouver insupportable)

Saint Jean a fait la rencontre de Jésus ressuscité, et il l’a entendu dire : « la paix soit avec vous » ! Il est fort d’une rencontre vivante avec un être aimant, et l’exigence, alors, se fait naturelle.

J’ai donc une proposition à vous faire pour cette semaine : prenez un temps de prière et demandez à Jésus qu’il vous redise « la paix soit avec vous », afin que vous puissiez faire une rencontre personnelle avec lui, du type de celle des apôtres.

Et pour éclairer cet « exercice » que je vous propose de faire, pour le nourrir, je voudrais reprendre une suggestion de Clive Staples Lewis, dans un livre remarquable, dont le titre est un peu terrible (Tactique du Diable) et qui propose de se représenter l’âme humaine comme trois cercles concentriques, et ce schéma –qui n’est qu’un schéma- permet de comprendre ce que signifie plus précisément « la paix soit avec vous ».

Le cercle le plus large est celui de l’imagination (auquel il faut ajouter « l’écorce » des sens qui nourrit l’imagination). Ensuite, le cercle de l’intelligence, instance qui analyse les données de l’imagination et enfin la volonté, qui est le « fond » de nous-même, ce qui nous tient le plus à cœur, ce qui fait que c’est nous et pas un autre (Dieu est encore plus au centre).

Maintenant, appliquons ce schéma à la phrase de Jésus, « la paix soit avec vous ».

Imagination :
Le ton de Jésus, son attitude, sa voix … devaient comporter une « couleur » paisible, apaisante, rassurante, mais bien sûr cela ne suffit pas.

Intelligence :
En rencontrant le ressuscité et en l’entendant dire « c’est bien moi ! », les apôtres ont fini par se souvenir de cette parole du prophète Michée (5,03) : « Il se dressera et il sera leur berger par la puissance du Seigneur, par la majesté du nom de son Dieu. Ils vivront en sécurité, car désormais sa puissance s'étendra jusqu'aux extrémités de la terre,  et lui-même, il sera la paix ! »

« La paix soit avec vous » ou « c’est moi » sont deux phrases en réalité identiques !!! 

Dans la liturgie romaine, l’Evêque se réserve la formule « La paix soit avec vous » car la présence du Christ en lui est très particulière.  Le prêtre et le diacre disent « le Seigneur soit avec vous », mais ces deux phrases, on le voit sont identiques !

Pourquoi Jésus est-il en lui-même et lui-même la paix ?

Voici ce que Saint Paul dit dans l’épître aux Colossiens (Col 1, 19) : « Car Dieu a voulu que dans le Christ toute chose ait son accomplissement total. Il a voulu tout réconcilier par lui et pour lui, sur la terre et dans les cieux, en faisant la paix par le sang de sa croix. »

Cela veut dire que la paix entre l’humanité et la divinité s’est parfaitement réalisée en Jésus, au moment où il a versé son sang sur la croix, voilà la paix véritable, voilà la source de toutes les paix !

« C’est la paix que je vous laisse, c’est ma paix que je vous donne », dit Jésus (Jn 14,27) « ce n’est pas à la manière du monde que je vous la donne » … cela signifie que toutes les paix ont quelque chose de superficiel, tandis que la paix du Christ, « sa » paix innerve toutes les « couches » de l’âme humaine, jusqu’à la plus profonde.

C’est par la prière, je le crois, que nous parvenons à « descendre » en nous-mêmes et ainsi présenter tout notre être intérieur à la paix de Jésus qui se répand alors. Au fur et à mesure que nous durons un peu dans la prière, la parole de Dieu imprègne tout notre être.

Il faut commencer par les sens (un certain « confort », une certaine ambiance, un certain décor nous aideront beaucoup), afin de nourrir l’imagination (former en nous l’image du Christ, imaginer une scène de sa vie, comme on le fait dans les exercices spirituels de St Ignace), puis réfléchir, afin que l’intelligence se nourrisse de Dieu ; et puis aimer, se laisser aimer … jusqu’à ce que l’on découvre qu’en réalité, Dieu n’est pas à l’extérieur de nous, mais à l’intérieur, et c’est donc de l’intérieur qu’il illumine tout l’être !

La paix, alors, sera avec nous.

Demain, il y aura forcément un peu de fébrilité à l’annonce des résultats pour les présidentielles, mais le fond de notre être sera dans la paix.

Conflits, dissensions, épreuves, agressions … ou au contraire déclarations d’amour, délicates attentions ne sont pas forcément des bons conseillers : le « merveilleux conseiller », c’est l’Esprit Saint, qui susurre à notre cœur « la paix soit avec vous ! »

P. Emmanuel d'Andigné 

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