16 août 2012

Homélie du 08 juillet 2012 - se reposer est une preuve d'humilité

Homélie du 14ème dimanche du Temps Ordinaire - Année B


Juste après cet Evangile, une précision s’impose tout d’abord : non, Jésus n’a pas eu de frères et sœurs au sens moderne du terme ; la notion orientale de frère et de sœur est beaucoup plus large que celle que nous avons généralement aujourd’hui, du moins dans le langage courant, car nous disons des moines et des moniales ainsi que de tout religieux que ce sont des « frères » et des « sœurs » ; les « frères » et « sœurs » de l’Evangile sont donc des gens de la famille de Joseph ou de Marie, mais en aucun cas de la « fratrie » de Jésus.

Regardez l’icône de la Vierge qui se trouve dans l’église (sur ce blog, en-haut à droite, "Vierge de tendresse") : trois étoiles ornent chacun de ses épaules et sa tête (la troisième étoile est masquée par Jésus) ; il s’agit de la virginité de Marie, « avant, pendant et après l’enfantement » de Jésus, celui-ci est « fils unique », aussi bien sur la terre que dans le Ciel, d’ailleurs. C’est la manière dont la tradition iconographique a relayé cette certitude de la tradition selon laquelle Jésus n’a jamais eu de frères et de sœurs au sens moderne du terme.

Par ailleurs, il est intéressant de signaler que Jésus lui-même a commenté cet Evangile :

Mt 12, 47 et suivants :
« 47 Quelqu'un lui dit : « Ta mère et tes frères sont là dehors, qui cherchent à te parler. » 48 Jésus répondit à cet homme : « Qui est ma mère, et qui sont mes frères ? » 49 Puis, tendant la main vers ses disciples, il dit : « Voici ma mère et mes frères. 50 Celui qui fait la volonté de mon Père qui est aux cieux, celui-là est pour moi un frère, une sœur et une mère. »

Nous sommes vraiment, selon les paroles mêmes de Jésus, ses frères et ses sœurs, puisque, malgré tout, nous écoutons les volontés de Dieu et qu’il nous arrive tout de même de nous y conformer de temps à autre ! Le baptême est un sacrement (qui nous rend frères et sœurs de Jésus), pas une analogie : Philomène, que nous baptisons aujourd’hui, va très réellement devenir sœur de Jésus-Christ !

Et puis, Jésus fait par là un grand compliment à sa mère, car s’il y a bien quelqu’un qui a fait la volonté du Père, c’est bien elle.

Par ailleurs, Marie a prononcé dans le Magnificat ce qui pourrait servir de commentaire aux autres lectures : « Il s’est penché sur son humble servante. »

Les lectures, en effet, sont dominées par une tension entre l’humilité et l’orgueil, et ceci tombe très bien pour cette période dite « de vacances », car à bien y regarder, l’humilité est très reposante, tandis que l’orgueil est finalement très fatigant … Il est beaucoup plus reposant de faire la volonté de celui dont on reconnaît l’autorité, plutôt que de vouloir tout faire soi-même, sans être sûr qu’on est sur le bon chemin.

Je vous livre une anecdote : lors d’un rassemblement où je confessais des jeunes, je me suis retrouvé par hasard à l’infirmerie, pour saluer le médecin que je connaissais bien. Arrive un prêtre franciscain, visiblement extenué, qui demande à profiter du lit de l’infirmerie, afin de se reposer. Cinq minutes montre en main après s’être allongé, il se relève et déclare vouloir repartir !!! Je lui dis : « pardon, mais si tu veux vraiment de te reposer, c’est minimum vingt minutes, cinq minutes, ça ne sert à rien ... » eh bien, savez-vous ce qu’il fit ? Il retourna se coucher quelques minutes, sentant que ce qu’il venait d’entendre était juste, bien qu’il soit bien plus expérimenté et plus âgé que moi …

Pour ma part, je rêve d’avoir une humilité comme celle-là, qui d’ailleurs, en l’occurrence, s’est avérée reposante dans tous les sens du terme …

Il faut savoir être lucides aussi sur notre époque : l’orgueil s’est installé partout, nous sommes des insoumis. Quelle jeune fille aujourd’hui se dit spontanément : « moi, quand je me marierai, je serai soumise à mon mari … » ?

Saint Paul, qui a dit « femmes, soyez soumises à vos maris», a dit aussi (Ep 5, 21) « Par respect pour le Christ, soyez soumis les uns aux autres ») ; il faut donc également que les hommes soient soumis à leurs femmes, et ensuite, à chaque ménage de voir, dans quel domaine, dans quelles circonstances il est bon pour le foyer ou la famille que l’un se soumette à l’autre. « Rivalisez de respect les uns pour les autres », a dit aussi saint Paul (Rm 12, 10).

J’ai pris le sujet délicat des relations entre maris et femmes, mais ceci peut s’étendre à toute la relation à l’autorité, dans tous les domaines.

Une autre anecdote : des guides, pendant un camp, décident de faire cuire des pâtes à la bolognaise ; celles qui sont chargées de la cuisine trouvent un moyen –peu importe  lequel- pour que la sauce bolognaise ne refroidisse pas l’ensemble des pâtes ; à deux reprises, j’entends deux autres personnes dire, sans se concerter : « mais, ce n’est pas comme ça qu’on fait ! » … pour ensuite dire « bon, fais comme tu veux, après tout »...  On voit bien que nous avons du mal à ne pas contrôler tout, notre orgueil est toujours prêt à se réveiller.

La période des vacances est une occasion idéale pour faire des prises de conscience, mais spécialement sur l’humilité, puisque nous devons reconnaître, et c’est plus humiliant que flatteur, que nous avons besoin de nous reposer, de temps à autre.

Heureux êtes-vous, vous qui êtes venus ici vous reposer, dans les deux sens du terme, faire une pause dans votre semaine et re-poser votre vie sous le regard de Dieu, en plaçant sous vos yeux ce qui est vraiment important et ce qui l’est moins.

P. Emmanuel d'Andigné

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