22 mai 2009

Homélie du 21 mai 2009

Homélie du jour de l'Ascension 2009 - Année B
Pour la fête de l’Ascension, les textes sont invariables, sauf l’évangile : l’année A nous fait écouter saint Mathieu, l’année B saint Marc, l’année C, saint Luc …

Chacun de ces évangiles (on les appelle « synoptiques », car ils « regardent les choses de la même façon ») raconte la fin du passage de Jésus sur la terre à sa manière ...

Saint Mathieu, par exemple, ne parle pas de l’Ascension ; il a été frappé par l’une des dernières rencontres sur une montagne de Galilée, et il parle des doutes de certains, ce qui est rassurant pour nous ! Il insiste sur le baptême et la mission.

Saint Luc, quant à lui, est sensible à l’accomplissement des Ecritures, et il précise que l’Ascension a eu lieu à Béthanie (à l’Est de Jérusalem), répondant ainsi à l’une de nos préoccupations modernes, c’est le plus « scientifique » des trois, dirions-nous aujourd’hui.

Saint Marc, que nous lisons cette année insiste lui sur les signes qui accompagnent l’œuvre de Dieu ; par ailleurs, il cite cette phrase de Jésus, dont on se serait bien passés au XXIème siècle : celui qui croira et sera baptisé sera sauvé, celui qui refusera de croire sera condamné. Vous imaginez-vous en train de dire cela lors d’un témoignage sur votre foi ?

Je vous propose d’affronter la question !!!

Premièrement, on écarte une tentation : celle de « zapper » la phrase et de faire comme si on ne l’avait pas entendue. Soyons un peu courageux !

Deuxièmement, on accepte la phrase de Jésus, telle qu’elle est, en faisant confiance totalement à saint Marc et à l’Eglise, qui ont porté fidèlement cette phrase jusqu’à nos oreilles et jusqu’à nos yeux. On ne bâtit pas sa religion à partir de la mesquinerie de nos esprits, on la reçoit de Dieu avec une totale confiance, en cherchant à comprendre.

Troisièmement, on cherche donc à comprendre … je vous propose de consulter deux sources : L’Evangile lui-même, bien sûr, mais aussi le Concile Vatican II, puisque, précisément, les problèmes que pose cette phrase viennent du décalage de mentalité entre l’Evangile et l’époque moderne, et que la principale intention du Concile est de permettre au monde moderne de comprendre l’héritage de la foi catholique avec les mots d’aujourd’hui …

L’Evangile, d’abord : rien que dans la phrase de Jésus, il y a déjà un enseignement assez précis sur l’obtention du Salut : il s’agit 1) de croire 2) d’être baptisé, ce qui veut dire, déjà, que le baptême lui-même n’est pas un acte magique qui est un ticket d’entrée au paradis, et que celui qui n’a pas son ticket …

Croire, c’est-à-dire, ratifier son baptême, c’est un acte du cœur, mais aussi de l’intelligence, et de la vie, qui est une adhésion à Jésus-Christ par toutes les dimensions de la vie (corps, cœur et âme, ainsi que j’ai pu le rappeler aux enfants qui faisaient leur 1ère communion). Celui qui est « techniquement » baptisé doit donc ratifier par sa vie le baptême qu’il a reçu, et alors, c’est sûr, il sera sauvé !

Nous emportons donc, dans notre bagage, dans un premier temps, ces deux réalités complémentaires (être baptisé et « croire »).

Et nous pouvons nous réjouir, au moins pour nous, de ce que nous sommes nous, dans cette logique, installée par Jésus lui-même !

Il ne faudrait pas que, sous prétexte de nous soucier du salut des autres, et en particulier de la difficulté intellectuelle de penser qu’il puisse y avoir des gens qui ne soient pas sauvés, on en oublie que nous-mêmes, en attendant, sommes sur la voie du Salut, une voie sûre, belle, joyeuse, profonde, difficile, et que Dieu nous a fait le grand cadeau de nous en apercevoir …

Toujours dans l’Evangile, Jésus dit : « celui qui refusera de croire sera condamné »

En fait, la question est : par qui ? Dans l’épisode de la femme adultère, Jésus conclut l’affaire par « moi non plus, je ne te condamne pas, va, et ne pèche plus ». Le Fils de Dieu lui-même ne condamne pas ! En Jn 16, Jésus dit «le Prince de ce monde est déjà condamné ». Le condamnateur est celui-là même qui est condamné, on se condamne soi-même ! Dieu, lui, « veut que tous les hommes soient sauvés (1 Tim) » et l’Evangile selon saint Jean (au même chapitre 16), précise que l’œuvre de l’Esprit est de « dénoncer l’erreur du monde sur le péché, sur le bon droit et sur la condamnation » et que l’Esprit « montrera où est la condamnation », il n’est pas dit qu’il la prononce …

Pour terminer, je vais avoir besoin d’un passage du Concile, car je n’ai toujours pas répondu, il me semble, à la question telle qu’elle se pose à un chrétien d ‘aujourd’hui, en particulier en ce qui concerne le salut des non-chrétiens …

Juste avant de l’écouter, rappelons-nous que tous les évangiles rappellent cette exigence du Christ de ne pas garder pour un petit groupe la Bonne Nouvelle, mais de le diffuser à tous les hommes, ce qui est d’ailleurs cohérent avec notre fameuse phrase !!!

Ecoutons Lumen Gentium (la lumière des Nations), aux numéros 14 et 16 (le n° 17 évidemment, parle de mission !!) :

14. Le saint Concile s'adresse donc avant tout aux fidèles catholiques. Il enseigne, pourtant, en s'appuyant sur la Sainte Ecriture et la Tradition, que cette Eglise voyageuse est nécessaire au salut. Seul, en effet, le Christ est Médiateur et voie du salut, lui qui se rend présent pour nous dans son Corps, qui est l'Eglise. Enseignant expressément la nécessité de la foi et du baptême (cf. Me 16, 16; Jn 3, 5) le Christ lui-même a du même coup affirmé la nécessité de l'Eglise, dans laquelle on est introduit par le baptême comme par une porte. Aussi ne pourraient-ils pas être sauvés, ceux qui, sans ignorer que Dieu, par Jésus-Christ, a établi l'Eglise catholique comme nécessaire, refuseraient cependant d'y entrer ou de demeurer en elle.

Sont pleinement incorporés à la communauté ecclésiale ceux qui, possédant l'Esprit du Christ, acceptent toute son économie et tous les moyens de salut établis en elle et sont, par les liens de la profession de foi, des sacrements, de la direction et de la communion ecclésiastiques, unis dans ce même ensemble visible de l'Eglise, avec le Christ qui la régit par le souverain Pontife et les évêques. D'autre part, n'est pas sauvé, même s'il est incorporé à l'Eglise, celui qui, faute de persévérer dans la charité, demeure dans le sein de l'Eglise "de corps ". mais non pas " de coeur". Au surplus, tous les fils de l'Eglise se rappelleront qu'ils ne doivent pas attribuer leur condition privilégiée à leurs propres mérites, mais à une grâce spéciale du Christ; et que, s'ils n'y correspondent pas dans leurs pensées, leurs paroles et leurs actes, bien loin d'être sauvés, ils seront jugés plus sévèrement. »

16. « Enfin, ceux qui n'ont pas encore reçu l'Evangile sont ordonnés de façons diverses au Peuple de Dieu (18). Et d'abord, le peuple qui reçut les alliances et les promesses et dont le Christ est né selon la chair (cf. Rom. 9, 4-5); peuple élu de Dieu et qui lui est très cher en raison de ses ancêtres, car les dons et la vocation de Dieu sont sans repentance (Rom. 11, 28-29). Mais le dessein de salut englobe aussi ceux qui reconnaissent le Créateur, et parmi eux, d'abord, les Musulmans qui, en déclarant qu'ils gardent la foi d'Abraham, adorent avec nous le Dieu unique, miséricordieux, qui jugera les hommes au dernier jour. Quant à ceux qui cherchent le Dieu inconnu sous les ombres et les figures, Dieu lui-même n'est pas loin d'eux non plus, puisqu'il donne à tous la vie, le souffle et toutes choses (cf. Act. 17, 25-28), et que le Sauveur veut le salut de tous les hommes (cf. I Tim. 2, 4). En effet ceux qui, sans faute de leur part, ignorent l'Evangile du Christ et son Eglise et cependant cherchent Dieu d'un coeur sincère et qui, sous l'influence de la grâce, s'efforcent d'accomplir dans leurs actes sa volonté qu'ils connaissent par les injonctions de leur conscience, ceux-là aussi peuvent obtenir le salut éternel (19). Et la divine Providence ne refuse pas les secours nécessaires au salut à ceux qui ne sont pas encore parvenus, sans qu'il y ait de leur faute, à la connaissance claire de Dieu et s'efforcent, avec l'aide de la grâce divine, de mener une vie droite. En effet, tout ce que l'on trouve chez eux de bon et de vrai, l'Eglise le considère comme un terrain propice à l'Evangile (20) et un don de Celui qui éclaire tout homme, pour qu'il obtienne finalement la vie. Mais bien souvent les hommes, trompés par le Malin, se sont abandonnés à la vanité de leurs pensées et ont échangé la vérité divine pour le mensonge, en servant la créature à la place du Créateur (cf. Rom. 1, 21 et 25). Ou encore, en vivant et mourant sans Dieu en ce monde, ils s'exposent au plus grand désespoir. Aussi, en vue de promouvoir la gloire de Dieu et le salut de tous ces hommes, l'Eglise, se souvenant du commandement du Seigneur qui dit: "Prêchez l'Evangile à toute créature" (Mc 16, 15), s'emploie-t-elle avec sollicitude à développer les missions. »

Confions-nous à Marie « étoile de la nouvelle évangélisation », afin qu’elle nous accompagne dans cette grande œuvre de salut qu’est l’annonce du baptême et de la foi !

P. Emmanuel d'Andigné

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